Le masque en entreprise sera obligatoire à partir de demain, mais… le ministère du Travail n’a, à ce stade, sorti aucune consigne claire sur la mise en pratique de cette mesure. Pourtant, la ministre a consulté différentes instances cet été. Mais le gouvernement se révèle aujourd’hui incapable d’expliquer comment les chefs d’entreprise doivent appliquer les mesures qu’il a prises dans l’urgence. Un premier très beau loupé d’Élisabeth Borne.
Le masque en entreprise donne lieu au premier très beau loupé (disons même qu’il est magistral !) d’Élisabeth Borne, promue cet été ministre du Travail, et déjà dans les cordes. La ministre a en effet annoncé de façon précipitée dans le courant du mois d’août l’obligation du port du masque en entreprise à compter du 1er septembre. Elle a également beaucoup glosé sur la responsabilité que les chefs d’entreprise portaient désormais vis-à-vis de leurs salariés et de leur santé face au coronavirus. Tout le monde comprend donc que le chef d’entreprise qui ne ferait pas respecter l’obligation du port du masque dans ses murs serait tenu pour responsable (et probablement auteur d’une faute inexcusable répréhensible pénalement) en cas de contamination par un salarié qui ne porterait pas son masque.
Petit problème : les seuls textes d’application de cette décision générale sont les “guides métier” rédigés… au mois de mars. Depuis cette date, aucune précision n’a été donnée sur la façon dont les entreprises devaient appliquer la décision gouvernementale.
Certes, la ministre annonce des dérogations et des nuances. Mais la mesure s’applique demain et, pour l’instant, son département ministériel n’a rien produit sur ce sujet.
Borne n’a pas voulu faire travailler ses fonctionnaires l’été…
L’explication la plus probable à ce silence ministériel est assez évidente : les chefs de bureau du ministère du travail étaient en vacances, et, coronavirus ou pas, les vacances, c’est sacré. Les rédacteurs habituels des textes étant vraisemblablement aux abonnés absents, les chefs d’entreprise ont été sommés en plein mois d’août d’adapter leur organisation… mais les services de l’État, fidèles à une longue tradition de bureaucratie, n’ont pas jugé que l’urgence justifiait de travailler pour leurs administrés.
Déjà épargnés de tout chômage partiel, les fonctionnaires du ministère du Traavil poussent le vice jusqu’à trouver normal de ne pas être là pour faire leur boulot quand les entreprises doivent, elles, le faire sans attendre.
Alors que le port du masque sera obligatoire à compter de demain en entreprise, la CPME s’étonne de l’absence de texte apportant les précisions nécessaires pour la mise en œuvre de cette nouvelle obligation. La Confédération des PME a notamment réclamé aux pouvoirs publics des dérogations portant sur des points précis tels que : l’utilisation de véhicules utilitaires ; les règles à respecter en espace partagé (« open space ») lorsqu’existent déjà des protections ; les consignes en milieu industriel avec une faible densité de personnel…
Communiqué de la CPME Tweet
On notera que la CPME a réagi plus vivement à ce silence que le MEDEF. Tout occupé à négocier des subventions, celui-ci n’a guère envie d’énerver les décideurs publics qui promettent d’être si généreux et si peu regardants sur l’utilisation qui sera faite de l’argent donné aux entreprises.
L’entrée en matière d’Élisabeth Borne montre en tout cas qu’elle ne sera pas la ministre de la compréhension des entreprises.
Bonjour à tous,
lors d’une émission sur Cnews, une juriste indiquait qu’aucun décret ou loi n’ayant été pris sur le port du masque en entreprise, le flou juridique subsiste. En effet, quid d’une injonction qui ne repose sur aucun texte officiel applicable (nous sommes sortis de l’état d’urgence), non inscrite au code du travail, et contre laquelle un salarié va pouvoir exercer son droit de retrait en raison de l’obligation faite à l’employeur de protéger son salarié.
De fait, le chef d’entreprise reçoit une obligation “douce” (soft law), juridiquement non fondée, aux conséquences plus que lourdes.
Mais ce n’est pas grave, un fonctionnaire ou un ministre ne peut être que coupable, jamais responsable, contrairement à un chef d’entreprise qui est coupable avant d’avoir eu l’opportunité d’être responsable…
Bien dit.