Le bonus des banquiers est actuellement encadré par des dispositions contraignantes de l’Union Européenne pour éviter les dérives connues en 2008 : prise de risque inconsidérée qui rapportent des sommes colossales en cas de succès, et qui sont financées par le contribuable en cas d’échec. La France demande à ses partenaires d’assouplir cette réglementation… Tout un symbole.
Le bonus des banquiers revient sur la table des revendications françaises dans l’Union. C’est ce qui ressort d’un document que Reuters a consulté. En l’espèce, il s’agit d’un courrier commun de Bruno Le Maire et de son homologue allemand à leurs partenaires européens pour les exhorter à assouplir les règles bancaires. Parmi ces règles figurent celles qui encadrent les bonus des banquiers…
Bonus des banquiers et Union bancaire
Nous évoquions la semaine dernière le passage précipité de Bruno Le Maire à Berlin, en marge de l’Eurogroupe. Nous rappelions que l’empressement français à déterrer le dossier de l’Union bancaire était une façon éloquente de manifester l’angoisse des pouvoirs publics vis-à-vis des désordres bancaires que même les dirigeants de la BCE annoncent depuis plusieurs mois.
On en sait plus, désormais, sur les discussions que les deux ministres ont eues en coulisse. Elles ont essentiellement porté sur l’assouplissement des règles prudentielles applicables aux banques, héritées de la crise de 2008. Et parmi ces règles, les ministres français et allemands (ils sont deux, Outre-Rhin) ont ciblé l’encadrement des bonus dans les “petites banques”, sujet étrange dont on attend de voir s’il recouvre ou non les banques d’affaires.
En tout cas, on comprend que les banquiers n’ont pas perdu de temps pour marchander pied à pied leur soutien à l’économie en difficulté.
H2O et Natixis
Nous avons récemment relaté les malheurs d’H2O, le fonds d’investissement financé par Natixis, qui s’est vu intimer l’ordre par l’AMF de suspendre toute activité sur plusieurs compartiments. Tout indique que ce genre “d’incidents” pourrait se multiplier dans les semaines à venir. Pour l’instant, tout le monde fait bonne figure et déclare sa confiance dans une reprise économique foudroyante. Mais l’avenir dira si ce traditionnel optimisme des élites françaises se justifie ou non…
Le prétexte de l’accès au crédit
L’argument utilisé pour justifier cet assouplissement ne manque pas de surprendre : les règles prudentielles étouffent les banques et les découragent de financer l’économie en difficulté. Autant cet argument s’entend sur les fonds propres, où l’attribution de crédit crée mécaniquement un besoin en fonds propres coûteux pour les banques, autant il est mystérieux sur les bonus : certains banquiers refusent-ils d’accorder des crédits à des entreprises en difficulté sous prétexte qu’ils ne sont pas rémunérés en conséquence ?
Ce point mériterait d’être éclairci… car il sert de justification à une mesure discrète dont on imagine mal l’impact et l’ampleur à ce stade.
La crainte d’une panne dans le crédit aux entreprises
Sur le fond, ces demandes émises dans la plus grande des discrétions relaient une crainte majeure des pouvoirs publics : que le financement de la reprise ne soit compromis par de trop importantes exigences prudentielles dans le secteur bancaire. De fait, l’octroi de crédits oblige les banques à provisionner des sommes en cas de faillite de l’emprunteur.
C’est sur ce segment que la France et l’Allemagne proposent une décote de 65% des fonds propres à provisionner en cas de crédit accordé à une entreprises solide. Sur le papier, le raisonnement fait bien. Toute la difficulté est évidemment de savoir si la crise va laisser debout des entreprises solides, qui ne présenteront pas de risque systémique pour les banques qui leur prêtent de l’argent. Et là, on a un doute, et un vrai.
De là à penser que cet assouplissement fait le lit de crises futures, il n’y a qu’un pas que nous franchissons allègrement.
Attention aux marchés financiers
Nos lecteurs savent que nous mettons régulièrement en garde sur les effets trompeurs des “4 sorcières” sur les marchés financiers. Nous rappelons que nous avons annoncé une tenue “correcte” des marchés jusqu’aux 4 sorcières de septembre, et un mois d’octobre très compliqué. Nous maintenons cette prévision.
Les banques n’en finissent pas d’être aidées
Nos lecteurs se souviennent que les banques (et les assurances) n’en sont pas à leur coup d’essai en matière d’assouplissement prudentiel. Déjà, en début d’année, avant le confinement, Bercy avait adopté une mesure favorable aux assureurs-vie. Durant le confinement, les banques avaient déjà bénéficié d’une première intervention favorable de l’Union.
Ce qui transparaît dans cette obsession de réduire les amortisseurs mis en place après la crise de 2008, c’est évidemment l’impossibilité pour les banques de respecter les règles de prudence nécessaires pour conjurer un nouvel épisode boursier désagréable. Or, à force de réduire le coût du risque, les gouvernements de l’Union vont inévitablement nourrir une nouvelle course aux actifs pourris, qui a d’ailleurs déjà commencé.
La position allemande et française revient à dire que le financement de la reprise passe par des prises de risque, déléguées aux banques, qui pourraient bien mal se terminer.
Le secteur bancaire n’est pas sorti d’affaire
Redisons-le, donc, les banques européennes continuent à prendre des risques inconsidérés, et sont loin d’avoir cédé ou purgé tous leurs actifs toxiques. Le cas de la Deutsche Bank est emblématique de ce point de vue. Et toute difficulté majeure au sein de la Deutsche Bank aurait des répercussions immédiates sur l’ensemble du système bancaire et financier mondial.
Bonjour Eric je n’arrive pas à récupérer les tutos relatifs à lexpatriation du patrimoine. Que dois je faire. Merci