2 461,4 milliards d’euros de dettes, des infrastructures délabrées, un Etat social pléthorique et peu d’améliorations en vue. A cela s’ajoutent une politique industrielle et énergétique totalement erronée, une récession et une politique étrangère à la botte des Américains. Quand on regarde la plus grande économie d’Europe, on ne peut que secouer la tête. Qu’est-ce qui ne va pas avec la politique allemande ? Le regard extérieur peut être trompeur. Il est dominé par les représentations stéréotypées des élites politiques et médiatiques. Cela change lorsque nous nous focalisons sur certains aspects, que nous faisons des zooms avant et arrière et que nous pouvons ainsi aiguiser notre regard. Dans une nouvelle série, nos lecteurs découvriront ma propre focalisation sur l’Allemagne et les événements actuels. Il s’agit d’une sorte de journal politique personnel qui aborde explicitement certains aspects, mais qui est loin d’être exhaustif. Ce sera une expérience interculturelle passionnante, c’est certain !
La première fois qu’Éric Verhaeghe m’a présenté en vidéo, il l’a fait en ces termes : « Elle est magnifique, bon, elle a un défaut, elle est autrichienne, c’est mieux qu’allemand, mais c’est quand même de là-bas ! » Ma réaction émotionnelle à ce constat, il est vrai, inattendu, a été un mélange d’un tiers de malaise et de deux tiers d’amusement : c’était encore ça, ce cliché bien connu ! En tant qu’Autrichienne, je parle la même langue que les Allemands et j’ai également été élevée dans la tradition de la communauté culturelle allemande. Je me sens liée à l’espace culturel et linguistique allemand et j’y ai mes racines. Le peu de malaise dans ma réaction s’explique par cette circonstance. Les critiques non objectives sur mes origines me dérangent. Je ne la rencontre pas seulement en Europe de l’Ouest, mais aussi en Europe de l’Est. Mais j’ai appris à faire preuve d’humour face à de telles déclarations et j’essaie toujours (ou à nouveau) de surmonter les barrières culturelles existantes.
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Je suis un fan absolu de Ulrike Reisner et je comprend que l’humour de Eric verhaeghe puisse être parfois dur à comprendre quand on a pas le détachement un peu désespéré nécessaire pour ne pas déprimer ou ne pas être en colère permanente.
Pour comprendre immédiatement et visuellement que l’Autriche n’est pas l’Allemagne, il suffit de rouler sur l’autoroute vers Vienne, par exemple, et de regarder les automobiles des autrichiens. Vous verrez alors que vous êtes en France. Et puis, comme j’ai longtemps habité sur Bajczy Zsylinszky, juste en face de la cathédrale Saint Étienne, à Budapest, j’ai souvent passé quelques minutes à méditer devant le cénotaphe de Zita, dressé à l’époque où l’on pensait sérieusement à la béatifier. J’ai, quant à moi, toujours pensé que l’empire des Habsbourg était un bon format pour l’Europe.
J’ai l’impression que les puissances occupantes après 1945 ont tout fait pour inculquer dans l’inconscient allemand une culpabilité collective sur tout ce qui touche au nazisme, par le conditionnement scolaire, culturel, juridique…
Je connais bien le domaine militaire, et les soldats français sont frappés par l’absence totale de tradition militaire au sein de la Bundeswher. Pas de récits épiques, pas de monuments commémoratifs, pas de cérémonies du souvenir, pas de chants militaires (et pourtant l’armée allemande a été à l’origine de très beaux chants de soldats). Leurs navires de combat ne portent pas le nom de grands marins, mais le nom des régions allemandes… En fait tout a été fait pour éviter la résurgence d’un sentiment nationaliste et des qualités guerrières.
Evidemment ce conditionnement ne touche pas que l’armée, il irrigue toute la société. A tous les niveaux et même chez les décideurs, les Allemands ont été conditionnés pour éprouver un sentiment de culpabilité collective dont certains commencent à peine à se dégager.