Pour séduire les libéraux, ni Laurent Wauquiez ni François-Xavier Bellamy n’ont ménagé leur temps et leur peine pour parler notamment baisse des dépenses publiques et autres promesses de campagne qui n’engagent qu’eux. Mais, quand on commence à gratter le sujet, on s’aperçoit que les Républicains continuent en sous-main à nourrir leur éternelle méfiance contre le marché et contre les entreprises, et à chérir partout où c’est possible le monopole et les arrangements entre amis dignes du plus vieux des capitalismes de connivence. Le sénateur Bizet vient d’en donner un nouvel exemple avec des amendements enjambant allègrement les principes du marché unique. Libéral à l’extérieur, mais monopolistique à l’intérieur, Bellamy et sa clique de politicards à l’ancienne méritent une bonne leçon de dégagisme.
Au début les bras nous en tombent et on a peine à y croire. On tombe sur deux amendements déposés par le docteur vétérinaire Bizet, accessoirement sénateur LR de la Manche, dans le cadre d’une proposition de loi déposée par En Marche pour introduire plus de concurrence dans le domaine de la complémentaire santé, où les assureurs sont accusés de se goinfrer en commissions et frais de gestion en tous genres. En principe, c’est le genre de texte qui devrait ravir les Républicains version Wauquiez, qui se répand partout pour dire du bien de la libre concurrence et de la baisse des dépenses publiques. Et paf! Bizet propose lui de revenir à une situation juridique qui a disparu depuis 6 ans! celle du monopole d’un assureur choisi de façon opaque pour toute une branche professionnelle par des négociateurs syndicaux désignés on ne sait trop comment.
Et les libéraux voient LR rappeler les vieilles lunes des arrangements entre amis syndicalistes
Et soudain, c’est la bascule dans une autre dimension. Depuis 2013, ce système de désignation monopolistique est interdit en France. Plusieurs instances se sont clairement prononcées sur le sujet: le Conseil Constitutionnel, le Conseil d’État, la Cour de Cassation, le Cour de Justice de l’Union Européenne, ont toutes invalidé par exemple la désignation d’AG2R comme assureur unique des boulangers en santé.
C’est quand même pas compliqué, quand on adhère aux Républicains, de prendre acte de décisions maintes fois réitérées depuis 2013, de supprimer un système qui, sous couvert de protéger les salariés, visaient en réalité à financer les organisations syndicales en cachette, par un scandaleux mécanisme de rétro-commissions. On peut trouver regrettable, éventuellement, que ce système ait disparu. Mais utiliser son étiquette LR pour promouvoir un retour vers le futur, c’est déjà le terrible aveu que derrière la façade bien repeinte de Bellamy et Wauquiez, le même enduit glauque et putride continue à imprégner des murs couverts de lézardes.
Les Républicains font semblant de changer, mais demeurent les mêmes vieux gaullistes combinards
D’un coup, on comprend donc que la révolution culturelle que François Fillon avait promise (et que son entourage de hauts fonctionnaires freinait déjà des quatre fers pendant la campagne), qu’il a naufragée dans les conditions qu’on connaît, n’a malheureusement été ni menée ni poursuivie par Laurent Wauquiez. D’un coup on comprend que le blabla bellamien sur la baisse des dépenses publiques est un argument d’emprunt, de circonstance, et disons même de composition. En réalité, la bonne vieille machine héritée de De Gaulle où un mauvais arrangement avec la CGT ou avec le parti communiste était toujours préféré à une modernisation franche du pays, n’a pas changé.
Chez LR, sous la surface lisse de la modernité alto-ligérienne de Wauquiez, la même croûte filandreuse, celle des combinazioni sordides où l’argent suinte par les crevasses d’un système vérolé pour tenir le pays dans un filet d’obsolescence, continue à bouillonner et ne demande qu’une secousse sismique pour surgir telle le prurit d’une plaie mal soignée.
Voilà pourquoi il ne faut pas croire un mot des belles promesses formulées par les leaders d’un parti qui, tel un vieux chien fatigué, fait le beau en espérant retrouver la place qu’on lui a volée près de la cheminée. Pour que tout redevienne comme avant.
Les libéraux doivent pratiquer le tout sauf Bellamy
Bien essayé Wauquiez! bien essayé Bellamy! on aurait presque voulu croire que vous aviez réalisé l’aggiornamento dont la droite française a tant besoin. Mais derrière les apparences, derrière les postures de communication, votre réalité est aussi lépreuse que celle des autres partis. Vous êtes démasqués.
Les libéraux de ce pays, qui savent combien la France a besoin d’un choc systémique, combien elle a besoin d’oxygène pour se relever, fuiront soigneusement vos entourages, vos vieux élus, vos vieux barons qui sentent la naphtaline et les pratiques cradoques.
Au passage, on serait intéressé de savoir par quel étrange lobbying ce vétérinaire Bizet a pu ressortir des thèmes qui ne sont plus défendus aujourd’hui que par Force Ouvrière.
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Non mais je rêve !!
Surpris par ce titre, j’ouvre le lien, et que vois-je ?? Un obscur amendement technique d’un obscur sénateur sur un obscur projet de loi suffit à M. Verhaeghe pour déclarer Les Républicains indignes de la moindre confiance, avec force outrances et insultes !
Alors que Les Républicains ont un projet européen des plus cohérents et des plus solides, le seul d’ailleurs présenté à ce jour, M. Verhaeghe ne prononce pas une seule fois le mot “Europe” dans son réquisitoire complètement hors sujet ! Il suffirait que M. Bizet quitte LR demain matin pour que M. Verhaeghe nous dise de voter Bellamy ? C’est donc cela, le débat de fond en politique aujourd’hui ?
Pire : il nous dit de ne pas voter Bellamy, mais ne nous dit pas… pour QUI d’autre voter ! Alors que Macron s’enfonce dans le hollandisme et le fédéralisme hors-sol, que ni DLF ni le RN n’offrent le moindre début d’ouverture à leurs programmes économiques protectionnistes, M. Verhaeghe s’enfonce lui dans le cynisme intégral, l’abstentionnisme qui désespèrera encore un peu plus les libéraux sincères et qui veulent encore y croire.
Consternant.
Je vote Bellamy… et envisage sérieusement un désabonnement au si mal nommé “Courrier des Stratèges”.
Bonjour M Calot,
Votre indignation n’est pas très lucide. Pour tout libéral qui a un devoir d’utopie et un droit au pragmatisme en ayant compris les énormes faiblesses de là où notre beau pays est arrivé dans le contexte d’aujourdhui, il faudra encore beaucoup de preuves que la vielle droite a changé . Nous avons aussi hélas les preuves maintenant que la macronie a tenté de faire illusion sur le renouveau et la mobilisation des forces.
Vous avez raison sur un point : pour qui voter? Ce n’est pas encore pour aujourd’hui le bon coup pour qu’emerge une offre politique crédible et attractive ! Renouvelez vous tous.
@CALOT : difficile d’imaginer que la demande d’amendement de ce sénateur n’ait pas été approuvée par les instances dirigeantes de LR…
Je ne crois pas un instant au libéralisme de LR qui reste pour moi étatiste, voir socialiste comme l’ont été toutes les vieilles badernes qui les ont précédés (Giscard, Chirac et même Sarkozy).
Voter pour eux est un peu moins difficile que voter pour LREM, mais mieux vaut l’abstention ou le vote RN qui a un avantage: celui de précipiter l’effondrement final au-delà duquel la destruction créatrice pourrait faire son effet. Rêvons à l’avènement d’une démocratie libérale.
En attendant mieux vaut une fin dans la douleur… qu’une douleur sans fin.
Fin dans la douleur dont ce pays ne pourra pas faire l’économie avant toute reconstruction.
Un obscur amendement? Mais le sujet concerne la vie de 1,5 millions d’entreprises, de 16 millions de salariés… et porte sur un marché d’environ 35 milliards € annuels. Des start-ups comme Alan ont levé 50 millions € pour numériser et ubériser ce marché. En matière d’obscurité, on a fait mieux, à mon avis.
Entièrement d’accord avec Eric Verhaeghe : les politiciens français détestent l’économie libérale. Ils préfèrent une économie administrée avec les résultats qu’on connait pour le niveau de vie. Pour le maintien au pouvoir, en revanche, c’est plus efficace…. (Sans doute une question de concentration de moyens et de finance plus pratique…) Le problème qui en résulte pour les démocraties centralisées, c’est que les minoritaires n’ont pas la parole, l’initiative privée stagne, la misère gagne. Pour preuve, des régimes de retraites obligatoires alors que 30 % des Français souhaitent un système facultatif (Sondage IFOP octobre 2018 : Le regard des Français sur l’actuel système des retraites). Ce despotisme à vocation pseudo scientifique ne va pas disparaître rapidement : Tocqueville l’avait annoncé au milieu du XIXème… Les inventeurs de la constitution américaine ont trouvé la parade, il suffit de la lire !
Le ton injurieux est regrettable. Habituellement vous êtes bien informé et pertinent.