Face au gouffre financier que la crise creuse et va continuer à creuser, une part de l’opinion réagit par une tentation maduriste à la française : il suffit de fermer les yeux, de mettre la tête dans le sable, et de prendre l’argent des riches, pour résoudre le problème sans rien changer au reste. Cette illusion, qui a débouché sur les pires appauvrissements au Venezuela ou ailleurs, menace la France. Pour comble de malheur, c’est le Président de la République lui-même qui l’anime et la porte, en comptant sur des dépenses à guichet ouvert pour assurer sa réélection.
Même si le PIB français baisse de 10 ou 15% cette année, même si les déficits publics explosent au-delà de l’imaginable, Macron a promis : intervention ad libitum de l’État pour que tout se passe bien, pas d’augmentation d’impôt, et pas d’effort nouveau demandé aux Français. Telle est la tentation maduriste à la française, que nous évoquons depuis plusieurs semaines, et qui commence à prendre forme sous la houlette de notre grand conducator.
La tentation maduriste à la française
On a bien compris le fil rouge de cette brillante pensée. À l’approche des élections présidentielles, il faut expliquer sur tous les tons et toutes les gammes que rien ne changera. Les acquis sociaux seront les mêmes. Le train de vie sera le même. Et ce ne sont pas quelques points de PIB en moins qui y changeront quelque chose. Dans tous les cas, on ne fera aucun effort particulier.
La France de Macron ressemble à ces châtelains qui peinent à réparer le toit du château, et qui annonce à leurs métayers qu’ils ne seront pas payés ce mois-ci : vous comprenez, nous avons un train de vie à tenir ! Et sous aucun prétexte il ne baissera.
Dans le rôle du châtelain, on trouve Macron lui-même, qui annonce urbi et orbi qu’on ne lâchera rien, qu’on ne sacrifiera rien, et même qu’on peut raser gratis. L’ensemble de la politique gouvernemental est désormais tournée vers le maintien en vie de cette illusion selon laquelle la profonde crise qui frappe n’imposera aucun sacrifice aux Français, à commencer par ses chouchous, les fonctionnaires.
225 milliards de déficit public en 2020
Dans le 3è plan de finances rectificative, les chiffres alignés donnent le tournis :
“La prévision de croissance est révisée à -11% pour 2020. Le déficit public atteint un niveau sans précédent (225 milliards d’euros). Il est revu à 11,5% du PIB, contre 9,1% dans la deuxième loi de finances rectificative du 25 avril 2020, 3,9% dans la première loi de finances rectificative du 23 mars 2020 et 2,2 % dans la loi de finances initiale pour 2020.
La dette française est estimée à 121% du PIB en 2020.”
Autrement dit, la situation des finances publiques est catastrophique.
Le coût du chômage partiel est connu
Face aux conséquences de la crise, les dispositifs d’urgence en faveur des salariés et des entreprises sont prolongés et renforcés pour atteindre au total près de 31 milliards d’euros pour le chômage partiel (soit 1,4% du PIB) et 8 milliards d’euros pour le fonds de solidarité pour les très petites entreprises (TPE).
Ils sont complétés par des plans de soutien d’urgence aux secteurs les plus touchés par la crise, pour un montant d’environ 45 milliards d’euros. Sont concernés le tourisme, l’automobile, l’aéronautique, les entreprises technologiques et le secteur culturel.
Relance discrète de l’emploi public
Le plan de relance à 100 milliards doit être présenté le 25 août. Beaucoup (notamment parmi les syndicats de fonctionnaires) espéraient des créations de postes “en dur” dans la fonction publique. Finalement, le gouvernement a arbitré : les créations de postes se feront sous forme de CDD de un à six ans.
On peut d’ores et déjà dater de cette annonce le début de la tentation maduriste en France. Car tout le monde sait, désormais, que l’administration s’est spécialisée dans la sédimentation progressive de l’éphémère. Autrement dit, dans quatre ou cinq ans, on parlera de plan de titularisation, avec des concours simplifiés, pour tous ceux qui seront recrutés prétendument pour quelques années. Et ainsi on aura concilié en apparence les deux contradictoires : ne pas expliquer qu’on augmente les dépenses publiques et ne pas les diminuer.
L’effet sera le même : pour combattre la crise, on crée de l’emploi public. L’argent qui passera dans les dépenses de l’État ne servira pas à relancer l’activité, mais à la plomber avec un peu plus de réglementations, de rigidité et d’inefficacité.
Vers un grand bond en avant des dépenses publiques
Au demeurant, la question de l’emploi public reste secondaire dans cet ensemble où l’État est sollicité partout et par tous pour mettre du beurre dans les épinards. Nous évoquions l’idée, ce matin, formulée par des élus locaux, de demander à l’État de compenser les milliards de pertes fiscales locales dues au coronavirus. Il s’agit là d’un exemple parmi tant d’autres de plaidoyer en faveur d’une “garantie” de l’État supposé se mêler de tout, et surtout éviter à tout le monde de payer le prix d’une crise qui est pourtant bien réelle.
Officiellement, le troisième collectif budgétaire, promulguée le 30 juillet, prévoit un déficit public de “seulement” 225 milliards, ce qui constitue néanmoins un record historique. La dette publique devrait augmenter de 20 points de PIB en quelques mois.
Mais nous sommes convaincus que l’atterrissage en fin 2020 sera bien pire, et bien supérieur aux mauvais rêves qu’aucun cerveau n’avait pu avoir depuis plus d’un siècle. Le moteur de cette dégradation exponentielle est bien connu : le président Macron est aussi le candidat Macron. Et quand on veut être réélu, on ne compte pas.
Du fil à retordre avec la majorité ?
Parallèlement aux discussions budgétaires qui s’achèvent dans les ministères, Macron devra faire face à une réorganisation de sa majorité parlementaire qui pourrait le mettre dans l’embarras. La candidate la mieux partie pour emporter le morceau est Aurore Bergé, qui espérait devenir ministre, et dont beaucoup soutiennent qu’elle a pris ombrage de son absence dans l’équipe Castex. Aurore Bergé a donné une interview au Journal du Dimanche et répète partout que le groupe majoritaire n’est pas là pour porter les valises du gouvernement. Dans l’hypothèse de son élection, on se réjouit donc par avance des petits cailloux qu’elle laissera sur la route du Président.
François Bayrou, grand manitou du madurisme
Pour maintenir entier le rêve maduriste qu’il commence à tisser, Emmanuel Macron devrait choisir François Bayrou, à qui reviendront les fonctions de commissaire au plan. Probablement nommé en septembre, Bayrou sera rattaché au Président et devra trouver de bonnes idées pour dépenser l’argent que l’État n’a pas. Cette mission devrait lui aller comme un gant !
Les dangers de la tentation maduriste
Ces mesures de distribution massive d’argent public déboucheront immanquablement sur une montée des inquiétudes quant à la capacité française à rembourser un jour l’argent qu’elle emprunte pour maintenir son rêve éveillé. Et on connaît déjà le refrain, qui fleurit dans tous les journaux : redistribuer les richesses, faire payer les riches, comme au Venezuela.
Reste que, dans l’histoire, on cherche vainement la trace d’une expérience maduriste qui aurait bien fonctionné. Partout où il a été question de redistribution massive des richesses (comme même le Modem l’évoque aujourd’hui), les conséquences collectives ont été délétères et ont débouché sur un appauvrissement général de la population. Le choix n’est pas entre une société égalitaire et une société inégalitaire, mais entre une société riche avec des inégalités, et une société pauvre avec des inégalités.
Nous devrions rapidement en faire l’expérience, puisque, de l’aveu même de Bercy, les Français les plus riches ont accéléré les départs en exil. La prochaine loi de finances devrait d’ailleurs assouplir l’imposition qui pèse sur leurs revenus français, tant elle est dissuasive. Mais il s’agira sans doute d’une escarmouche isolée dans une guerre déclarée aux plus riches, et qui paupérisera le pays tout entier.
Tellement vrai, vive Macronduro ! l’espoir porteur d’un vrai cauchemar. Bonjour le réveil en sueurs.
cher Monsieur, votre vision du chatelain a quelque peu changé : tout d’abord personne ou presque ne vit sur des métayages et les métayages ne consistent pas du tout à payer son métayer chaque mois : il correspond à partager les revenus et les pertes. Le métayage a fortement disparu au profit du fermage. Enfin, un métayer n’est pas un salarié.
C’est la vision socialiste pure et dure ; c’est gratuit c’est l’état qui paye, les riches ? vous plaisantez il ne reste en France que le fond de caisse, le reste est bien à l’abri !
La France est au 5ème rang des pays ayant au monde le plus de millionnaires. Un nombre ayantaugmenté de 11% entre 2018 et 2019 “sous Macron”.
Il est vrai que pour certains être millionnaire en € ne suffit pas pour se considérer riche 🙂
Vu que riche, suivant le divers pantins qui nous ont dirigés, se situe entre 2000 et 4000 euros, on peut raisonnablement penser que la grande majorité de la population va passer à la caisse. Ce seront juste des “prélèvements exceptionnels” à la méthode vignette auto pour les vieux (lol). Pas besoin de Maduro comme exemple, nos 40 dernières année ayant bien montré que nous étions plutôt précurseurs de ce vénézuélien plutôt que suiveurs actuels.
Et accessoirement voir ce qui se passe en ce moment en Australie et Nouvelle Zélande concernant les “mesures” liées au covid-1984, bien que ces pays soient, disons, en bas des statistiques épidémiques. Outre le parcage en camp forcé en cours là-bas on pourra peut-être avoir aussi la méthode saoudienne de séquestration jusqu’à paiement de “rançon”. Les idées pourries ne manquent pas et durant cet épisode de peur suscitée, il semble que chacun de nos gougnafiers se lance dans le pire.
Le vice inhérent au capitalisme consiste en une répartition inégale des richesses. La vertu inhérente au socialisme consiste en une égale répartition de la misère. Winston Churchill.
Proverbe Chinois : c’est quand les gros maigrissent que les maigres crèvent de faim.
Pour le gouvernement, il est important qu’une majorité de Français ne participe pas directement aux dépenses publiques par le biais de l’imposition. Pour qualifier ce réflexe, on hésite entre populisme et esprit de défaite, à moins que ce ne soit les deux.