COVID 19 : le Conseil d’Etat favorise-t-il l’Islam ?

COVID 19 : le Conseil d’Etat favorise-t-il l’Islam ?


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Le Conseil d’Etat favorise-t-il l’Islam au détriment de la majorité catholique du pays ? À la lecture rapprochée de divers éléments, on peut s’interroger sur la conception très anti-catholique de la laïcité déployée par les fonctionnaires du Palais-Royal. En référé, l’un d’eux vient en tout cas de rendre une ordonnance déboutant les requérants catholiques qui demandaient la réautorisation des messes. Le prétexte donné pour maintenir une mesure mal vécue parait très douteux. Dans le même temps, le Conseil d’Etat multiplie les précautions vis-à-vis de l’Islam.

Arrêt du Conseil d'Etat sur l'interdiction de la messe pendant le confinement from Société Tripalio

Le Conseil d’Etat devait statuer sur une requête en référé introduite par une multitude d’organisations ou associations catholiques, dont l’association Civitas (mais pas que… loin de là). Le principe du référé est qu’il est rendu en urgence, sans trancher sur le fond, mais en s’occupant essentiellement des apparentes ou flagrantes illégalités d’un texte ou d’un acte. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que le juge qui a rendu son ordonnance n’a pas ménagé la susceptibilité des évêques qui le saisissaient.

Le Conseil d’Etat et les clusters catholiques

Le fond de l’argumentation apporté par les requérants était simple. D’une part, le culte a lieu dans des églises dont la taille permet une aération suffisante pour limiter les risques de contamination. D’autre part, les offices sont donnés selon un protocole sanitaire strict (qui prévoit jusqu’à la désinfection des mains avant l’eucharistie) et vérifiable qui explique qu’aucun cluster n’ait été jamais constaté dans une église.

Pour les catholiques, ce point était essentiel, dans la mesure où l’église revendique un engagement dans les normes sanitaires sans comparaison possible avec le « relâchement » des assemblées évangéliques dont on se souvient qu’elles ont causé pas mal de dégât l’hiver dernier. On a même perçu que ce respect républicain des règles par le clergé catholique était vécu comme une pierre angulaire, pour ainsi dire identitaire, par les requérants.

En vain, le juge des référés n’a pas pris de gant sur le sujet et a expédié la question par une phrase bien sentie (voire ci-dessous) qui a fermé tout débat. Selon le juge, les officiants ne portent pas le masque, et la distanciation entre les fidèles n’est pas respectée. Bim ! Bien entendu, le Conseil d’Etat n’apporte, à l’appui de cette affirmation gratuite, aucun élément sérieux de nature à étayer sa position.

"il résulte de l’instruction que si des protocoles sanitaires ont été élaborés, lors du déconfinement, pour les lieux de culte à l’initiative notamment, pour ce qui concerne l’Eglise catholique, des évêques, ils n’ont pas été actualisés depuis lors et ne sont pas toujours strictement appliqués, notamment depuis l’été, en ce qui concerne la distanciation entre les fidèles, y compris à l’entrée et à la sortie des lieux de culte, et le port du masque par les officiants, alors même qu’un public âgé et donc fragile, participe aux cérémonies religieuses."   

Ordonnance du Conseil d'Etat

La date fatidique du 16 novembre

Entre les lignes de l’ordonnance, on comprend surtout que le juge s’en remet aux décisions qui seront prises par le gouvernement le 16 novembre, à l’issue du premier bilan du confinement. En soi, ce choix n’est pas absurde : à une semaine près, rien n’exclut que le gouvernement ne lève les interdictions. Alors pourquoi donner le sentiment de lui forcer la main en anticipant l’une des mesures qu’il pourra annoncer devant les caméras ? Pourquoi le priver de ce bénéfice politique ?

Et dans l’hypothèse où le confinement se durcirait, il serait fâcheux que le Conseil d’Etat (présidé, rappelons-le, par le Premier Ministre) ne donne le sentiment d’entrer dans un gouvernement des juges en cassant par avance les arbitrages politiques qui seront rendus.

Une fois de plus, la tentation de judiciariser l’action publique se heurte à la réticence (plutôt saine, au demeurant) de nos juges, qui nous disent en creux : si vous n’êtes pas contents, faites la révolution, mais pas des recours.

Le Conseil d’Etat protège-t-il l’Islam ?

Comme par hasard, quelques jours avant cette décision vexante, l’ancien vice-président du Conseil d’Etat, Jean-Marc Sauvé, chiraquien devenu désormais président de la commission sur les abus de l’église catholique, donnait une interview tout à fait révélatrice sur sa conception de la laïcité au journal l’Opinion. Le titre du quotidien : «On ne peut pas blesser sciemment et gravement des fidèles d’autres confessions », en dit long sur l’orientation de ce grand et haut fonctionnaire.

Autrement dit, le Conseil d’Etat est prêt à interdire les caricatures du prophète pour ne pas blesser gravement les Musulmans.

Au passage, on peut s’interroger sur la signification de la formulation visant « d’autres confessions ». Faut-il comprendre que la laïcité selon Sauvé autorise à blesser sciemment et gravement des catholiques, mais pas les « fidèles d’autres religions » ? D’autres religions que la sienne ? C’est bizarre, quand même, cette façon de s’exprimer.

Par un avis du 27 novembre 1989, le Conseil d’Etat a indiqué que les élèves ont la liberté d’exprimer et de manifester leurs croyances dans les établissements scolaires, dans le respect du pluralisme et de la liberté d’autrui, et sans qu’il soit porté atteinte aux activités d’enseignement, au contenu des programmes et à l’obligation d’assiduité.    

Site du Conseil d'Etat

Le Conseil d’Etat est-il à l’origine de la mode du voile islamique dans nos rues ?

Rappelons qu’en termes de deux poids deux mesures vis-à-vis de l’Islam, le Conseil d’Etat n’en est pas à son coup d’essai. En 1989, déjà, il avait rendu un avis (le tout premier moment juridique en France sur la question) favorable au port du voile dans les lycées. C’est le fameux avis sur le voile, qui a causé tant de dégâts dans l’esprit des jeunes Musulmans de France.

Ces derniers ont trouvé, en effet, dans l’institution du Palais-Royal, un redoutable allié en faveur d’un signe religieux qui a semé le trouble dès lors. On sent bien que l’inclination naturelle du Conseil porte à l’indulgence vis-à-vis de l’Islam et à l’absence d’indulgence vis-à-vis de l’église catholique. Au point qu’on peut s’interroger sur l’apparente partialité de sa décision rendue en référé.

Les élites technocratiques, derniers suppôts du Vivre Ensemble

Ces inégalités de traitement de la part de la justice administrative ne surprennent que ceux qui vivent dans un monde de bisounours. Mais les autres savent quelle idéologie inspire la technostructure qui referme chaque jour un peu plus son pouvoir et son contrôle sur la société française : faire la guerre par tous les moyens à ces vieux Gaulois réfractaires qui défendent leur identité ancestrale, les éradiquer, les diluer dans un melting pot où tout se vaut pourvu que tout obéisse au doigt et à l’oeil aux injonctions tombées des bureaux du Château.

La réaction technocratique est à l’oeuvre, et elle fait très mal, car elle ns s’embarrasse même plus d’une apparente équanimité. Elle met le paquet pour changer les fondements de notre société.


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