Au moment où la France, et plus largement de nombreux pays, sont en guerre contre le terrorisme islamique, au moment où les risques de conflits se multiplient avec le retour du comportement belliciste de certains États-Puissance et le renforcement quasi général des capacités militaires, la Cour de Justice de l’Union Européenne (CJUE) est interrogée sur la possible réglementation du temps de travail au sein des armées, en référence à la directive 2003/88CE. Celle-ci prescrit à tous les secteurs d’activités privés et publics un repos journalier de 11 heures consécutives au moins par période de 24 heures ainsi qu’un repos hebdomadaire de 24 heures au cours de chaque période de 7 jours. La question qui est posée à la CJUE est la suivante : les militaires (et donc les gendarmes) sont-ils des travailleurs comme les autres ?
1.Oui, les militaires sont des travailleurs comme les autres… ou presque
En 37 pages et 112 points, les conclusions de l’avocat général près la CJUE, rendues publiques fin janvier dernier, sont claires : « Les militaires relèvent du champ d’application de la directive 2003/88 ».
Pour l’avocat général, au regard du droit de l’UE, les soldats, marins et aviateurs sont des travailleurs comme les autres. Pourtant, la directive prévoyait des dérogations pour certaines activités dans la fonction publique comme dans les forces armées ou la police. De fait, les armées avaient été d’emblée considérées comme non-concernées par celle-ci.
A suivre les conclusions du haut magistrat, les militaires dont les gendarmes doivent bénéficier d’un repos journalier d’au moins 11 heures consécutives par période 24 heures, d’une pause hebdomadaire de 24 heures pour chaque période de 7 jours, d’un temps de travail de nuit ne devant pas dépasser huit heures en moyenne par jour et d’une durée de travail ne devant pas excéder les 48 heures par semaines, heures supplémentaires comprises.
Ou presque…
L’avocat général poursuit. Car dans les situations particulières que sont les Opérations extérieures (Opex – exemple : Opération Barkhane), Opérations intérieures (Opint – exemple : Opération Sentinelle), et les phases de préparation opérationnelle, il est exclu d’appliquer le droit du travail : dans ces cas, écrit-il, « les militaires doivent être préparés à la fatigue, à la discipline collective, à la violence de l’ennemi et à des conditions de travail rustiques. »
Il propose “de séparer le ‘service courant’, pour lequel les directives 89/391 et 2003/88 sont applicables, des véritables ‘activités spécifiques’ des forces armées, en particulier celles effectuées dans le cadre des opérations militaires et de la préparation opérationnelle, qui en sont exclues.”
2.La position française et la notion de service en tout temps et en tous lieux
Devant les sénateurs, la ministre des Armées, Florence Parly a déclaré être “farouchement opposée à l’application de la directive (…). L’ultima ratio de la Nation ne peut dépendre de règles sur le temps de travail” car être “militaire c’est une vocation au service de la Nation, ce n’est pas un métier comme les autres” a encore martelé la ministre.
Interrogé par France Info, le sénateur Cédric Perrin (LR – Territoire de Belfort), vice-président de la Commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées, peste contre ce qui pourrait créer « une usine à gaz monstrueuse. Avec des armées en partie aux 35 heures, on aurait un surcoût en RH de 20 à 30%. » « L’armée française, poursuit l’élu, a une singularité : c’est une armée opérationnelle, déployée sur plusieurs théâtres, et qui assure au Sahel la sécurité de toute l’Europe. » Cette singularité a selon lui fabriqué la configuration moderne des armées et vouloir y appliquer la directive 2003/88 reviendrait à tout désorganiser. Comment, en effet, ignorer la singularité de la fonction militaire par rapport à toutes les autres : seuls les militaires possèdent le droit de donner la mort, assorti du devoir de risquer leur propre vie si la mission l’exige.
Dans une tribune publiée par Le Figaro, l’ancien ministre et très pro-européen, Jean-Louis Borloo n’y va pas par quatre chemins. “La non-transposition par la France de la directive en ce qui concerne ses forces armées se justifie pleinement, car l’état militaire est très spécifique. Disponibles “en tout temps et en tout lieu” prêts à aller jusqu’au sacrifice suprême, astreints à une obligation de discipline et de solidarité renforcée, les militaires bénéficient d’un statut propre, protecteur des hommes et de la singularité du métier.”
En octobre 2017, le président Macron, pourtant lui aussi “très attaché aux institutions européennes” comme le rappelle le journaliste Laurent Lagneau d’OPEX 360 avait pris position en tant que chef des armées. “Sur ce sujet, du temps de travail, je dirai aussi très clairement que ma détermination est complète pour que, aussi bien la Gendarmerie que le ministère des Armées, ne soient pas concernés par la directive bien connue. […] Les choses sont claires, notifiées à qui de droit, et seront portées jusqu’à leur terme”, avait assuré Emmanuel Macron, lors d’un discours sur la politique de sécurité.
3.Un militaire particulier : le gendarme.
La Direction Générale de la Gendarmerie Nationale (DGGN) applique l’instruction provisoire n° 36132 du 8 juin 2016 qui intègre des aménagements d’une partie des prescriptions européennes*. La mesure la plus ostensible est le repos journalier d’au moins 11 heures consécutives par période de 24 heures. L’administration a toutefois évité d’être trop rigide dans l’application des directives car si on évoque 48 heures de travail maximum par semaine, on indique aussi ce droit à une pause hebdomadaire de 24 heures par période de 7 jours. Dans un long billet publié sur le site de la Gendarmerie par l’APNM Gendarmes & Citoyens, et intitulé “La notion de service en tout temps et en tous lieux selon la lecture du droit européen !”, l’APNM voit dans la position de l’avocat général un danger pour le statut militaire de la Gendarmerie : “la morale de l’histoire (…) c’est qu’à force de vouloir ressembler à un fonctionnaire on finit par le devenir !“ et de conclure : “Un équilibre statutaire est toujours fragile et manipuler un domino peut s’avérer, à terme, très dangereux.”
Dans la revue La Voix du Gendarme, pour le général de division (2s) Bertrand Cavallier, cette directive “est une menace inacceptable pour la protection des Français.” Celui qui avait déjà écrit sur ce sujet précis dans la revue des officiers de la Gendarmerie “Le Trèfle” en janvier 2019 sous le titre : “la Gendarmerie : une indispensable clarification” tire la sonnette d’alarme en affirmant en écho à la déclaration de la ministre des Armées devant le Sénat “qu’il s’agit bien d’une question centrale pour la Gendarmerie, non seulement pour elle-même mais pour ce qu’elle apporte à la sécurité de la Nation.”
Détaillant l’évolution de la situation sécuritaire de la France depuis janvier 2019, – ensauvagement de la société, radicalisation des comportements, instabilité d’un corps social de plus en plus éprouvé, syndromes de séparatisme- l’officier général constate que la Gendarmerie, sous l’impulsion de son nouveau Directeur, “a entamé un mouvement de fond portant sur une meilleure conjugaison des impératifs de modernisation et de renforcement de ses atouts singuliers” et se félicite du “retour de la militarité assumé en Gendarmerie”.
“La problématique du temps de travail en Gendarmerie est cependant indissociable d’un questionnement beaucoup plus poussé sur l’évolution de cette institution, qui relève d’une réflexion politique” analyse encore l’officier en deuxième section qui regrette “la mortifère dynamique mimétique, et non suffisamment contrecarrée, avec la Police nationale, un des facteurs majeurs de la mutation constatée de la Gendarmerie, qui l’éloigne de la représentation idéale que l’on veut bien en donner”.
(*) Florence Parly, le 7 novembre 2017 : “La Gendarmerie a pris l’initiative de transposer à sa manière cette directive, ce qui est dommageable, pour ce qui concerne la disponibilité des forces dont dispose la Gendarmerie, et aussi malheureusement dommageable pour le reste des forces armées, puisque cela crée une sorte de précédent dont nous ne souhaitons surtout pas l’extension“.
Que fera le gouvernement français si la CJUE suit les réquisition de l’avocat général ?
La question, posée par le sénateur Cédric Perrin (déjà cité) reste en suspens. La France aura la capacité de réagir en activant l’article 4-2 du Traité de l’Union européenne, qui consacre le droit de chaque état-membre à faire à peu près ce qu’il veut en matière de sécurité nationale, pour conserver souveraineté et autonomie.
L’Europe = la mort des peuples et des nations à petit feu !
Il faut sortir de cette nasse « quoi qu’il en coûte » !
FREXIT ! URGENTISSIME!!!
Les européens qui en ont la possibilité doivent voter avec leur pieds c-à-d déménager de la zone euro corrompue par les politichiens jusqu’à la moelle.