Police : une organisation du travail inadaptée

Depuis plusieurs années, la police nationale est confrontée à des défis de sécurité majeurs et à des attentes fortes des citoyens. Pour y faire face, elle a bénéficié de moyens supplémentaires importants, comme en témoignent l’augmentation de 21 % de sa masse salariale en dix ans, et le concours accru de nouveaux acteurs de la sécurité (polices municipales, réservistes, sécurité privée). Néanmoins, les résultats affichés, notamment en termes de présence sur le terrain ou d’élucidation des faits de délinquance, ne connaissent pas d’amélioration significative, voire se détériorent. Les travaux récemment publiés sur le sujet par la Cour soulignent qu’une meilleure utilisation et une gestion rénovée des ressources humaines de la police nationale s’imposent. Plusieurs leviers d’action doivent ainsi être prioritairement mobilisés : une allocation des effectifs mieux ajustée aux besoins des territoires et aux missions, une organisation du travail plus adaptée aux besoins opérationnels, ainsi qu’une formation renforcée et modernisée. La Cour estime, par ailleurs, que des mutualisations entre la police et la gendarmerie pourraient améliorer la qualité du service rendu aux citoyens.
Chiffres clés
- 10 Md€ consacrés à la masse salariale de la police nationale, en augmentation de 21 % depuis 10 ans.
- Un taux de présence sur le terrain des policiers de 37 %, en baisse depuis 10 ans.
- De 2014 à 2020, le taux d’admission au concours de gardien de la paix est passé de 2 à 18 % des candidats.
- Un parc automobile de 7 ans d’âge moyen contre 3 ans en Allemagne.

De 2010 à 2020, la masse salariale de la Police nationale (10 milliards) a augmenté de 21%, alors que les effectifs restaient les mêmes (+1%).
Mieux payés, les policiers ne sont malheureusement pas plus efficaces, comme le montrent les mauvais chiffres de la présence sur le terrain ou d’élucidation des affaires. Pourquoi ? « Une organisation du travail inadaptée », dénonce la Cour des comptes qui plaide pour une « une meilleure gestion des ressources humaines » par le ministère de l’Intérieur. Pas facile, lorsqu’on sait que « la police connaît un dialogue social asymétrique qui donne facilement droit aux demandes catégorielles et n’aboutit pas à des contreparties suffisantes ».
Le « taux d’engagement » des policiers sur le terrain diminue depuis dix ans : il se situe à 37% (-2 points) contre 58% pour la gendarmerie. Le taux d’élucidation des homicides (62,6 %) baisse lui aussi, de plus de 4 points. Si l’élucidation des vols avec violence augmente (15,4 %), celle des cambriolages reste désespérément bas, autour de 10 %. La police judiciaire est « en difficulté ».
Cette priorité à la masse salariale se traduit par la faiblesse des moyens mis à la disposition des policiers dans leur travail (parc immobilier insatisfaisant, vétusté des véhicules). Les problèmes de la Police nationale sont partiellement compensés par les mairies, via le développement récent des polices municipales (35 000 agents) et le secteur privé, avec 183 000 salariés, en hausse de 25 % en dix ans.
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