La Commission européenne effectuera bientôt des inspections surprises pour vérifier la bonne application des accords Schengen

La Commission européenne effectuera bientôt des inspections surprises pour vérifier la bonne application des accords Schengen

Ce jeudi 3 mars, le Conseil de l’UE a adopté une orientation générale sur un nouveau mécanisme de contrôle de Schengen. Ursula von der Leyen a déroulé son agenda de réforme de l’espace Schengen en juin 2021 – en s’octroyant le droit de définir elle-même quand un Etat a le droit de fermer ses frontières, notamment – et l’on peut compter sur Emmanuel Macron pour exécuter. La Présidence française du Conseil de l’UE est décidemment marquée par plus de souveraineté européenne, on ne peut pas dire que le Président n’ait pas tenu cette promesse-là. On touche ici à la gestion territoriale de nos frontières intérieures, dans l’indifférence générale. A force de grignoter du terrain, la Commission finit surtout par pousser le bouchon.

Ursula von der Leyen muss Europas Probleme lösen

Avec le conflit en Ukraine, les questions de contrôles aux frontières et d’accueil des réfugiés de guerre se mélangent pêle-mêle dans l’actualité. A ce jour la directive 2001/55/CE offre une protection pour les personnes fuyant la guerre en Ukraine. Elles pourront bénéficier d’un statut protecteur similaire à celui de réfugié – mais cet article traite d’une stratégie de fond dévoilée par la Commission en juin 2021 (« A strategy towards a fully functioning and resilient Schengen area ») qui est à différencier d’avec la gestion de ce conflit.

Le Schengen d’aujourd’hui

En son sein, l’espace Schengen supprime les contrôles aux frontières intérieures. Une fois entrée sur le territoire d’un pays membre, une personne peut franchir les frontières des autres pays sans subir de contrôle.

Parallèlement à la mise en place de l’espace Schengen, les contrôles aux frontières extérieures sont quant à elles renforcées (notamment par le biais de l’agence Frontex) et une politique commune de visas a été encouragée avec la création notamment du Visa Schengen.

L’espace Schengen compte actuellement 26 membres : 22 des 27 Etats membres de l’Union européenne et 4 Etats associés.

carte schengen

L’application des règles de Schengen se fait pour l’instant sur la base de la « confiance mutuelle » des états-membres.

Un état membre peut décider de rétablir le contrôle à ses frontières intérieures en cas de survenue de menaces à l’ordre public ou à la sécurité nationale. Ce rétablissement ne peut être que temporaire (pour une durée de 6 mois renouvelable) et doit être notifié à la Commission européenne ainsi qu’aux autres pays membres.

A l’occasion de la crise migratoire de 2015, de la vaque d’attentats sur le sol européen et de la pandémie de Covid-19, la Commission, qui a le pouvoir d’initiative en la matière, a remis en cause la réintroduction des contrôles internes des frontières de manière « non-coordonnée » et « unilatérale » par les Etats membres.

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Oui, Ursula a encore frappé.

Le Schengen de demain

Le conseil – sur proposition de la Commission – adopte une orientation générale sur un mécanisme d’évaluation renforcé. Un nouveau règlement visant « à rendre l’espace Schengen plus adaptable face aux défis actuels et à venir » sera bientôt présenté au vote du parlement européen.

Concrètement, cela signifie que la Commission établira sa propre grille d’évaluation de la bonne application de l’acquis Schengen aux frontières intérieures et se donne le pouvoir d’organiser « des contrôles inopinés ». Rien que ça !!

Qui dit contrôle dit sanctions.

« Une procédure accélérée sera mise en place afin de constater un manquement grave et d’y remédier […] Si les manquements constituent une menace grave pour l’ordre public ou la sécurité intérieure, le Parlement et le Conseil en seront également informés immédiatement.  Les délais prévus ensuite pour la présentation du rapport d’évaluation, l’adoption des recommandations et la mise en œuvre des mesures correctives sont considérablement raccourcis. »

Par ailleurs, la Commission souhaiterait que les Etats membres qui ne participent pas encore à l’espace Schengen et qui sont considérés prêts pour l’adhésion (la Roumanie, la Croatie et la Bulgarie) en fassent partie.

La Commission va donc établir ses propres critères d’évaluation de la gestion des frontières internes d’un Etat-membre et en contrôler elle-même la bonne application. Les sanctions appliquées au non-respect des règles ne sont pas clairement indiquées pour le moment, mais comme à son habitude on imagine aisément que la Commission pourrait faire un chantage aux aides.

Le fonctionnement de l’espace Schengen repose également sur un renforcement des frontières extérieures, un volet que la Commission européenne aimerait aussi « consolider ». Le Pacte européen sur la migration et l’asile ambitionne de réformer la politique migratoire de l’Union. La France souhaite le faire adopter lors de sa présidence du Conseil de l’Union européenne.

Le problème ici n’est pas de savoir si c’est bien ou mal d’ouvrir les frontières, ni quand, comment, ni pourquoi – mais il s’agit bien de contester la prise de pouvoir croissante d’une institution non élue, qui a une fâcheuse tendance à vouloir harmoniser à toute vitesse ce genre de questions sans l’avis du peuple.

Emmanuel et Ursula, une équipe qui gagne ! (nous espérons que le premier ne sera pas réélu et on a carrément pas voté pour la seconde)