Orléans, là où le mouvement anti-passe sanitaire est devenu politique

Orléans, là où le mouvement anti-passe sanitaire est devenu politique


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Les manifestations contre le pass sanitaire et l’obligation vaccinale ont marqué une pause. Pas à Orléans, où le mouvement a muté en véritable opposition antigouvernementale. Ses leaders ont fait récemment l’objet de violences policières qui ont choqué. Retour sur l’histoire d’un mouvement qui refuse de s’éteindre.

Dès le début de la contestation contre l’instauration du pass sanitaire, le samedi 17 juillet 2021, Orléans est sur le pied de guerre. Avec entre deux et trois mille manifestants battant le pavé chaque samedi au début du mouvement, ce n’est certes pas la ville qui aura rassemblé le plus de monde, mais peut-être celle qui aura manifesté jusqu’au dernier jour des mesures dites sanitaires. La contestation s’est structurée autour du collectif « Le citoyen et la citoyenne » et de l’association Ysambre. On leur doit plusieurs actions de soutien aux soignants et pour la liberté d’accès aux soins.

Orléans s’est ensuite illustrée lors du « convoi de la liberté », comme ville-étape le 12 février. Au-delà des espérances des organisateurs, plus de 2 000 véhicules, accueillis comme des libérateurs dans la ville de Jeanne d’Arc, ont stationné sur la base de loisirs de l’île Charlemagne, pour se restaurer et même passer la nuit pour certains. Solidarité et convivialité étaient de mise malgré la fatigue de gens venus de loin.

Exclus par les syndicats

Le mouvement anti-pass, qui se veut apartisan, a été exclu de la manifestation syndicale du 27 janvier. Sous les invectives, les manifestants ont été expulsés du cortège et se sont retrouvés à manifester seuls, cent mètres à l’arrière, séparés par un cordon de policiers. L’union avait pourtant bien commencé puisque, de juillet à septembre, la CGT était intégrée au cortège citoyen sans encombre. Au moment où, outre-Atlantique, une synergie de tous les courants permettait les convois de la liberté, cette dissension soudaine a fait tache.

Les promesses de suspension du pass vaccinal, puis la guerre en Ukraine sont venues mettre un terme à cet élan, réduisant les manifestations du samedi après-midi à la portion congrue. Dans la tête de beaucoup, les mesures sanitaires, c’est fini. Il est pourtant toujours en place à l’hôpital et les soignants non-vaccinés suspendus n’ont pas été réintégrés. Ne méritent-ils pas le soutien du plus grand nombre ?

En conflit avec le maire d’Orléans

Depuis plusieurs samedi, le parcours habituel est refusé par la préfecture et la mairie, qui préfèrent envoyer les manifestants sur des boulevards éloignés du centre-ville, ce qui leur enlève toute visibilité. Serge Grouard, maire d’Orléans, ira jusqu’à déclarer dans le journal local que « tous les samedis, ils nous emmerdent ». Une expression très présidentielle que certains élus n’hésitent plus à utiliser contre leurs administrés. Changement de stratégie des manifestants qui opteront pour plusieurs sit-in et pousseront le pied-de-nez au autorités en allant jusqu’à jouer au badminton sur les voies du tram, ce qui perturbera au final davantage la circulation.

Entre temps, une partie de la ville a été entièrement redécorée aux couleurs de l’Ukraine, avec des drapeaux de 4×3 mètres, dans des proportions non observées ailleurs en France. Sur la place de la Mairie, les couleurs françaises ont laissé place à celles d’un autre pays, dans le cadre d’un conflit international dont nous sommes loin de connaître tous les tenants et aboutissants. Un choix non soumis à l’approbation des habitants et que certains jugent illégal.

Le samedi 12 mars, alors qu’il n’y a jamais eu d’incidents, tout bascule. Les manifestants, exaspérés par un nouveau refus de parcours, semblent bien remontés. Les slogans sont piquants, le pas est pressé et l’électricité est dans l’air. Les policiers, plus nombreux que d’habitude, semblent nerveux eux aussi. Des palettes sont posées sur une voie du tram pour faire un sit-in. Mais quelques manifestants décident d’essayer d’y mettre le feu. Les palettes sont humides et le feu ne prends pas. Un symbole plus qu’autre chose. Pourtant, quelques minutes plus tard et alors que le cortège reprend, plusieurs manifestants sont exfiltrés par des policiers en civil. L’organisatrice tente de les défendre puis est interpellée à son tour. Elle parle d’un guet-apens. Des policiers en tenue anti-émeute sortent en nombre des rues adjacentes et commencent à gazer. Sous les yeux médusés de plusieurs dizaines d’usagers qui attendaient le tram, dont des enfants et des personnes âgées, et qui ont dû respirer du gaz lacrymogène.

« Tout était prêt. Ils attendaient le moindre petit motif pour nous arrêter. Nous dérangeons et on veut clairement nous mettre hors-circuit. »

Quatre personnes sont arrêtées et placées en garde-à-vue. Un cinquième manifestant, convoqué au commissariat le lendemain, sera lui aussi placé en garde-à-vue. La réponse policière et judiciaire semble démesurée. Le principal chef d’accusation est d’avoir tenté d’incendier des palettes sur les voies du tram, à l’aide de gel hydroalcoolique qui, comme chaque le sait, ne brûle pas. La seule chose qui a brûlé ce jour-là, c’est un tract électoral d’Emmanuel Macron. Les feux de palettes, des grands, des vrais, sont pourtant monnaie courante sur les piquets de grève des syndicats et personne n’est arrêté pour cela. Mais il fallait impérativement briser ce mouvement qui durait plus qu’ailleurs. Il est vrai que Sarah, organisatrice de la manifestation depuis l’été dernier, est devenue la bête noire des autorités locales.

48 heures de garde à vue : purement politique ?

Dès le lendemain, une vingtaine de personnes se sont rassemblées devant le commissariat de police d’Orléans, puis devant le palais de Justice d’où les 5 manifestants sont ressortis lundi 14 en soirée. Selon nos sources, le maire d’Orléans Serge Grouard et la préfète du Loiret Régine Engström seraient intervenus personnellement auprès du procureur pour demander à ce que les leaders de la contestation soient placés en détention provisoire en attendant leur jugement, c’est-à-dire plusieurs semaines. Ce qui en aurait fait – appelons un chat un chat – des prisonniers politiques. Mais un bon avocat et la crainte de provoquer un scandale médiatique en pleine campagne électorale en auront décidé autrement.

Tout cela n’a pas empêché environ 150 irréductibles, dont l’organisatrice habituelle, d’être à nouveau dans la rue le samedi suivant, déguisés en licornes ! Une manifestation pour le droit de manifester, dans une ambiance caricaturalement pacifiste et délibérément dénuée de sérieux, sous le regard désarçonné des policiers qui s’étaient équipés pour un 2e round. Dieu merci, aucune licorne n’a été tuée ni maltraitée.

Le mouvement ne compte pas en rester là et prévoit des actions plus ciblées, notamment de réinformation au contact de la population. Et surtout, reste à l’affût d’une reprise de l’épidémie de mesures liberticides. Rappelons que le pass vaccinal est seulement suspendu et que personne n’est dupe sur ce qu’il adviendra si le courant politique actuel parvient à se maintenir au pouvoir après les élections. Les manifestants comparaîtront le 10 mai prochain pour être jugés. Nul doute que les soutiens seront nombreux ce jour-là devant le Tribunal d’Orléans.

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