Pourquoi les Russes sont-ils partis de Kherson ? Pour François Martin, on en a fait une énigme, alors que les explications sont très simples.
Il existe plusieurs raisons qui expliquent facilement le retrait des troupes russes de Kherson. Elles tiennent soit à la géographie locale, soit au moment de la guerre, soit à la nature même de celle-ci.
La géographie
J’avais dit dans un article précédent (1) que le retrait des russes de Kherson était un piège, parce que l’idée qui devait les titiller, dans ce « jeu d’échecs de la guerre », que nous voyons se déployer depuis huit mois, était de faire aux ukrainiens une « variante Moscou » (ce qu’ils ont fait à Napoléon), ou une « variante Stalingrad » (ce qu’ils ont fait à Hitler). Je m’étais trompé, ou plutôt, il convient d’adapter et de mieux préciser les choses.
En effet, Kherson n’est pas Moscou. Si, à Moscou, les russes avaient bien quitté la ville avant de la laisser à Napoléon, puis de la brûler, il convient de noter que cette tactique était alors beaucoup plus dommageable pour les français, d’abord parce que l’on était déjà en plein hiver, et surtout parce que les lignes logistiques de l’armée françaises étaient considérablement plus étirées que ne le sont actuellement les lignes ukrainiennes à Kherson. Napoléon s’en était aperçu, qui rentrera en France après une course folle de 13 jours, et qui abandonnera son armée (2), laquelle sera totalement décimée par le froid, la faim et le thyphus pendant son retour. Il y laissera près de 530.000 hommes (3). Autant dire que, pratiquement sans combattre, et sans même l’avoir battu militairement (4), mais seulement par le jeu de ce qui ne s’appelait pas encore une « guerilla », les russes supprimeront la menace du français, qui ne s’en relèvera plus.
A Stalingrad, la situation était aussi différente. En effet, au niveau de cette ville, la largeur de la Volga est faible, et en plus divisée en deux bras qui enserrent une île. Si le nord et le sud du fleuve étaient aux mains des allemands, la partie orientale face à la ville ne l’était pas, ce qui permit aux russes, avec des ponts ou des barges, de réapprovisionner le quartier dit des usines, dernière partie résistante de la ville, pendant toute la durée de la bataille (5). A Kherson, la largeur du Dniepr fait semble-t-il un km. A supposer que les russes aient voulu laisser dans la ville tout ou partie de leurs 25.000 soldats, il n’aurait pas été possible de les ravitailler en armes ou en troupes pour organiser une telle résistance, ni de les évacuer ensuite correctement. A coup sûr, les ukro-américains auraient concentré leurs efforts sur ce point, créant ainsi une sorte de Marioupol à l’envers, ce qui aurait constitué, pour le coup , une grave défaite pour les russes.
Il faut rappeler qu’une défaite stratégique se produit soit lorsque l’on conquiert un espace stratégique, qui permet une nouvelle attaque vers d’autres objectifs, soit lorsque l’on tue ou emprisonne un grand nombre d’adversaires. A Marioupol, les ukrainiens ont subi une défaite stratégique majeure, avec la perte d’un territoire contrôlant un immense complexe industriel et la mer d’Azov, et celle d’une quantité importante de combattants très aguerris. A Kherson, le contrôle de la rive droite du Dniepr se sert à rien aux ukrainiens, puisque le fleuve est trop large pour organiser à partir de là une traversée sans se faire repousser. Par ailleurs, ils n’ont « piégé » aucun groupe de combattants russes. En fait, bien qu’ils la célèbrent comme il se doit devant les caméras du monde entier et qu’ils soient embrassés par les populations pro-russes qui sont restées (6), leur entrée à Kherson n’est même pas une « victoire à la Phyrrus ». Ce n’est pas une victoire du tout, mais seulement une occupation de terrain qui ne leur servira à rien et va les rendre plus vulnérables.
En effet, la future réponse des russes est dejà limpide, comme Zelensky l’a annoncé lui-même, en disant : « Ils attendent que nous nous regroupions dans la ville pour nous écraser sous les bombes ». Il reconnaît lui-même que la ville n’est pas tenable, et donc qu’elle ne lui sert à rien. Par ailleurs, s’ils ne les ont pas déjà minées (7), il suffira que les russes, comme ils l’ont fait ailleurs, détruisent les centrales d’eau et d’électricité pour rendre la ville invivable. Dès que le froid sera venu, les habitants frigorifiés devront fuir vers l’exil, comme il vont le faire à Kiev et ailleurs. Les russes n’ont donc, pour le moment, depuis l’autre côté du fleuve, rien à faire d’autre que de préparer le futur désastre, et d’attendre qu’ensuite, le « Général Hiver » fasse le reste. Nonobstant les clameurs du camp occidental, ce sont bien les russes qui tiennent, pour le moment, la bonne position.
Une trève qui ne dit pas son nom
Cette bataille de Kherson était aussi le moment d’une trève. En effet, on peut penser que les ukro-américains, après les multiples tentatives d’attaques repoussées, où ils ont laissé une quantité de forces, en matériel et en armes, avaient besoin d’une pause. Il en était de même pour les russes, qui sont en plein réaménagement de leur dispositif : nouveaux hommes, avec l’arrivée des 300.000 réservistes et, certainement, nouveaux objectifs. Pour eux aussi, une pause était salutaire. Ainsi, il est fort probable que celle-ci ait été négociée entre les deux belligérants, les uns trop heureux d’afficher leurs succès, même factices, et les autres contents de pouvoir « fignoler » plus tranquillement leur dispositif. C’est pour cette raison, parce qu’ils ne craignaient pas, dans ce cas précis, d’afficher leurs objectifs, que les russes ont annoncé leur départ officiellement et bien à l’avance. Pourquoi, en effet, en faire mystère alors que ce n’était, probablement, qu’un « secret de Polichinelle » dans les milieux bien informés ? De plus, cela permettait (et c’est fort important) de mieux « préparer » les opinions russes et les « leaders d’opinion », comme Kadyrov, afin d’éviter des couacs comme par le passé.
Par ailleurs, le fait de « fixer » ainsi une partie de l’armée ukrainienne à Kherson ou aux alentours permettra aux russes, comme dans beaucoup de cas précédents (8), de les empêcher de se déplacer vers ce qu’ils considèrent comme le théâtre d’opération principal de cette guerre : le Donbass.
Enfin, cette pause est aussi, pour les russes, une opportunité de réallocation de leurs ressources. Dès son arrivée à la tête de l’armée russe en Ukraine début Octobre, le nouveau commandant en chef Sergueï Sourovikine avait critiqué le dispositif actuel. Sans doute le changement était-il l’une des conditions de son acceptation du poste. En effet, pourquoi immobiliser 25.000 soldats, parmi lesquels des troupes très aguerries, pour défendre une ville sans aucun intérêt stratégique ? De l’autre côté du Diepr, bien protégé par la largeur du fleuve, et organisé pour détruire par l’artillerie toutes les forces adverses qui s’approcheront trop de la ville, il va pouvoir diminuer son contingent de 25.000 à 10 ou 15.000 hommes, et envoyer le reste vers le Donbass, là où ils seront infiniment plus utiles. A tous points de vue, ce changement, qui est bien plus un retrait qu’une retraite (les ukrainiens n’ont pas tué un seul soldat russe pendant cette manœuvre) est bénéfique pour les russes.
Les Russes ont intérêt à faire durer la guerre
Nous l’avons souvent dit, pour les russes, ce conflit n’est pas une guerre de « décapitation », mais de « dévitalisation » de leur adversaire. Bien plus que du gouvernement ukrainien, ils doivent se débarrasser, et pour longtemps, de la menace américaine et européenne. Pour cela, ils doivent « nous » saigner à blanc.
Dans un entretien réalisé par Laurent Schang et Slobodan Despot (9), l’historien suisse Bernard Wicht explique ainsi le « jeu du chat et de la souris » que, selon lui, les russes pratiquent avec le camp occidental. Il dit :
« Je pense que cette expression pourrait, à elle seule, livrer « la » clef requise pour décrypter ce qui se passe à l’heure actuelle :
- Pour mémoire, l’objectif de la Russie n’est pas prioritairement l’Ukraine, mais la sidération et le déséquilibrage de l’UE et de l’OTAN (crise énergétique ® crise économique ® inflation ® récession,…
- D’autre part, sous la pression de ses mentors occidentaux, le président Zelensky a retiré ses propositions de paix de février-mars. La guerre peut donc se poursuivre jusqu’à épuisement : c’est très vraisemblablement le jeu que pratique le chat russe avec la souris ukrainienne. Une solution négociée paraissant impossible aujourd’hui, seul l’épuisement (démographique) de l’Ukraine peut garantir à la Russie une relative « tranquillité » à long terme sur sa frontière sud-ouest.
- Dès lors, cette dialectique chat/souris pourrait expliquer l’attitude russe visant à « ne pas vouloir en finir».
Une telle posture stratégique n’est pas inédite dans l’histoire militaire. Le cas de la Guerre civile espagnole (1936-1939) est particulièrement emblématique à cet égard.
Le général Franco, commandant en chef des forces nationalistes, a été considéré pendant longtemps, certes comme un homme politique très habile, mais comme un piètre stratège sur le terrain. Malgré la supériorité militaire dont il dispose, il aurait fait de mauvais choix opérationnels laissant aux Républicains l’opportunité de mener des contre-attaques désespérées prolongeant, de la sorte, la guerre d’au moins un an. Puis récemment, les recherches historiques ont révélé que ces « mauvais choix » avaient été faits sciemment afin d’épuiser le potentiel humain des Républicains dans des batailles d’anéantissement où la puissance de feu de l’armée nationaliste pouvait donner sa pleine mesure. A titre d’exemple, en septembre 1936 déjà, plutôt que s’emparer de Madrid alors très peu défendue, et obtenir ainsi la capitulation du gouvernement républicain et terminer la guerre en deux mois, il opte pour la prise de Tolède, ville certes très symbolique mais dont l’importance stratégique est relative. Il veut une guerre longue pour détruire le potentiel démographique des Républicains et « nettoyer » de la sorte les régions conquises des populations favorables au régime en place. Il considérait qu’il ne pourrait pas disposer de la stabilité nécessaire à la reconstruction du pays si une jeune génération pro-Républicaine suffisamment nombreuse survivait à la guerre. Il le dit explicitement dans un entretien : « Dans une guerre civile, mieux vaut une occupation systématique du territoire, accompagnée du nettoyage nécessaire, qu’une déroute rapide des armées ennemies qui laisserait le pays infesté d’adversaires. »[1]
Outre la ressemblance frappante entre Poutine et Franco (10), il semble bien que la guerre ukrainienne soit menée par les russes dans le même esprit que la guerre civile espagnole : il faut à Poutine une guerre longue. Ainsi, en réponse à la stratégie initiale des américains, qui visait à « vietnamiser » les russes, il semble bien que ce soit ces derniers qui aient, finalement, rendu la monnaie de leur pièce à leurs adversaires (11).
Dans cette perspective, on comprend le peu d’intérêt à obliger une partie des 25.000 soldats qui occupaient Kherson à faire un « Fort Chabrol » pour rien. Bien au contraire, dans une guerre longue et à l’économie, il est bien plus utile de les préserver. La « valeur » des soldats disponibles va devenir de plus en plus « chère » au fur et à mesure de l’avancement du conflit.
De plus, ne l’oublions jamais, cette guerre est faramineusement chère pour les occidentaux. En effet, si, pour les russes, le financement par l’Etat est facilement remboursé par les énormes surprofits causés par nos propres sanction (12), du côté occidental, il n’en est pas de même. Des près de 80 Milliards de USD qu’ont coûté a) les travaux de la CIA visant à destituer le gouvernement de Ianoukovitch en 2014 (10 Milliards de USD), b) les frais militaires pour former l’armée ukrainienne et la « ligne Maginot » après 2015 (3,5 Milliards de USD), c) le coût de la présente guerre, armes et formations militaires, et prêts civils (le reste, versé par les USA et l’UE depuis Février 2022), il ne faut pas oublier que tout est financé par des « prêts-bail » qui ne seront jamais remboursés. L’Etat ukrainien en faillite, à lui seul, coûte entre 5 et 8 milliards de USD par mois (13). Deux mois de guerre supplémentaires coûteront donc mécaniquement à l’occident près de 15 milliards de USD, et 6 mois plus de 40 Milliards (14), alors que, rappelons-le encore, depuis 8 mois, aucune victoire stratégique n’a été remportée par son camp, mais seulement des « victoires médiatiques ». Combien de temps nos dirigeants vont-ils continuer à payer pour que, vraiment, cela change ?
Car par ailleurs, il faut impérativement payer l’Etat ukrainien tous les mois, sinon tout s’arrête : armée, police, fonctionnaires, postes, trains, hopitaux, écoles, etc… C’est inenvisageable pour l’occident. Le camp américano-européen a donc, au-dessus de sa tête, une énorme « épée de Damoclès » qui s’alourdit tous les jours…
On comprend bien qu’à l’approche de l’hiver, et alors même que Poutine vient de « remettre au pot » 300.000 hommes, avec la possibilité de rajouter ensuite jusqu’à 2 millions de réservistes et 25 Millions de conscrits s’il le faut, une « certaine nervosité » commence à s’emparer du camp occidental, pour demander à Zelensky de montrer un peu plus de souplesse…
Les prochains objectifs des russes
Une autre des raisons qui laissent à penser que, probablement, la guerre sera longue, est le fait que tous les objectifs de Poutine ne sont pas atteints. Il en reste un de taille : Odessa. Il est en effet impossible de penser que Poutine s’arrêtera avant de conquérir ce port. D’abord, parce qu’il est sur la route de la Transnistrie, avec laquelle la Russie veut faire la jonction. Ensuite, parce que l’objectif premier de cette guerre est d’obtenir, d’une façon ou d’une autre, la démilitarisation de l’Ukraine (15), afin qu’elle ne soit plus jamais un danger, un « pistolet sur la tempe de Moscou », comme Poutine l’a expliqué à son opinion dès les premiers jours de la guerre. Depuis la prise de Liman, après 6 mois de guerre où Poutine a soigneusement ménagé la partie occidentale de l’Ukraine, et la liberté d’action de Zelensky et des occidentaux, période pendant laquelle il a méthodiquement liquidé l’armée ukrainienne, avec un espoir de négociation qui n’est jamais arrivé, Poutine a « franchi le Rubicon ». Il s’est persuadé que malgré ses « ouvertures », l’affaire irait jusqu’au bout, parce que les américains ne renonceraient pas à leur projet de liquider son pays. Il s’est donc décidé à obtenir de facto ce qu’il n’obtenait pas de jure (16).
Pour cette raison, il a russifié les quatre oblasts. Et pour cette même raison, il lui faut le contrôle total de la mer Noire et aussi Odessa. En effet, il ne lui servirait à rien de « dévitaliser » toute l’Ukraine, ainsi que le potentiel militaire et financier de l’occident, s’il leur laissait Odessa. Dans ce cas, la premiere chose que ferait le camp adverse, pour ressusciter l’opposition à la Russie, serait de monter une base militaire de l’OTAN à Odessa, juste en face de Sébastopol. C’est absolument impossible. Il est donc certain que la Russie ne s’arrêtera pas avant d’avoir conquis ce port.
Comment Poutine va-t-il s’y prendre ?
On peut penser qu’il va d’abord attendre le froid, pour voir comment se comportent les populations du pays, les politiciens et les militaires, et aussi les opinions européennes. Il va continuer à détruire méthodiquement les infrastructures ukrainiennes, afin que le pays non contrôlé par la Russie devienne totalement invivable. Il va continuer à « mettre la pression » dans le Donbass, pour se rapprocher de Kramatorsk, son objectif ultime. Il va vérifier que les occidentaux n’ont « plus de billes » pour payer l’Etat ukrainien en faillite et livrer des armes. Il va continuer à former ses troupes, et à renforcer son dispositif sur l’ensemble du front, sous une forme essentiellement défensive, et en économisant ses forces pour une guerre longue.
Il est fort possible qu’il fera durer les choses ainsi tout l’hiver, espérant ainsi démoraliser profondément ses adversaires. Il est probable qu’il ne fera rien dans le sud, maintenant qu’il y est bien protégé par le Dniepr, et qu’il concentrera tous ses efforts pour briser la « tenaille » du Donbass, et parvenir à conquérir Slaviansk, puis Kramatorsk. Ce n’est qu’après, sans doute, lorsqu’il n’aura plus d’armées en face, ni d’ennemis extérieurs prêts encore à payer, car confrontés à leurs opinions ruinées et furieuses, qu’il lancera une contre-offensive par le nord de Kherson, dans une partie du Dniepr où le fleuve est moins large, et qu’il redescendra celui-ci par la rive droite vers le sud, pour reprendre ainsi Kherson (ou ce qu’il en restera), puis continuer jusqu’à Mykolayiv, afin de s’ouvrir la route vers Odessa. Cela pourrait se produire cet hiver, mais plus probablement au printemps ou même à l’été prochain, après que ses adversaires aient été totalement « dévitalisés ».
Dans toutes ces hypothèses, nous pouvons être certains d’une chose : quoi qu’ils décident, les russes prendront tout leur temps. Ils sont, à ce titre, comme les peuples africains qui aiment à nous dire : « Vous, vous avez la montre. Nous, nous avons le temps ». Dans certains cas, c’est un défaut. Dans le cas de l’Ukraine, il semble bien que ce soit la clef de la guerre.
(2)Napoléon est coutumier du fait. Déjà, après l’immense défaite navale d’Aboukir, qui avait privé son armée de possibilité de retour d’Egypte, il avait abandonné celle-ci sur place et était rentré en France tout seul en criant victoire.
(4) La seule « vraie » bataille de cette campagne sera la bataille de Borodino (ou bataille de la Moskova) remportée par Napoléon, et qui lui ouvrira la porte de Moscou. Elle n’aura pas de conséquences stratégiques, dans la mesure où elle ne liquidera pas le potentiel de l’armée russe.
(5) Bataille de Stalingrad — Wikipédia (wikipedia.org)
(6) Ce qui prouve bien que, contrairement à ce qu’on a dit, la Russie n’agit pas par la contrainte en Ukraine, pour ce qui concerne les populations. Ceux qui n’ont pas voulu quitter Kherson se sont évidemment identifiés comme pro-ukrainiens. Dans d’autres guerres, ils auraient été soit liquidés, soit emmenés de force sur l’autre rive et parqués dans les camps. Ici, les russes ne l’ont pas fait.
(7) Il semble que ce soit déjà le cas : Guerre en Ukraine, en direct : la Russie a détruit « toutes les infrastructures cruciales » à Kherson, selon Volodymyr Zelensky (lemonde.fr) . C’est aussi pour cette raison que les russes ne se sont pas encombrés des pro-ukrainiens à Kherson. Pourquoi s’occuper d’eux, alors qu’ils partiront d’eux-mêmes d’ici quelques semaines ? Ils iront pérégriner sur les routes enneigées, puis grossir les rangs des réfugiés en Pologne et ailleurs, contribuant à désorganiser l’adversaire occidental.
(8) A Kiev, à Kharkyv, à Liman…
(9)Ce que nous dit l’Ukraine de la guerre qui vient – Éd. JC Godefroy (editionsjcgodefroy.fr)
(10) Même appétence pour un pouvoir fort, même certitude de défendre la civilisation européenne chrétienne contre un ennemi totalitaire, même conservatisme inébranlable, même sens du temps long, même équilibre entre les forces internes nationalistes et libérales, même désir de modernisation du pays, mais pas à pas, même conception de la guerre. De nombreux points rapprochent ces deux hommes. Libre journal de la crise du 11 novembre 2022 : “L’armée russe dominera-t-elle finalement l’armée ukrainienne ? Avec quelles conséquences ?” – Radio Courtoisie
(12) Pétrole, gaz et matières premières, mais aussi engrais, céréales, produits agricoles, etc…
(14)Ursula Van der Leyen a récemment annoncé une « rallonge » de financement pour l’Ukraine de 18 Milliards d’Euros pour un an de la part de l’UE. A priori, cela paraît beaucoup, mais cela ne fait « que » 1,5 Milliards d’Euros par mois. S’il manque 5 Milliards d’Euros ou de USD par mois pour boucler le budget ukrainien, cela fait 60 Milliards pour la prochaine année ! Si la guerre dure, où va-t-on les trouver ? Les Républicains américains, vainqueurs de la Chambre des représentants, vont-il continuer à alimenter ainsi le « tonneau des Danaïdes » ? On peut en douter.
(15) Que la Russie demande depuis 20 ans, dans le cadre d’une architecture de sécurité où ses intérêts, comme les nôtres, soient préservés. Or depuis 20 ans, l’occident refuse.
M. Husson, en vous lisant tout devient clair.
Mais si tout le monde comprend la stratégie russe, quel gros grain de sable pourrait l’empêcher de se réaliser ? Puisque l’Ukraine va perdre, est-ce qu’elle ne serait pas tentée par une bombe “sale” fournie par les ukro-américains ? En espérant que les Russes réagiraient si violemment par une véritable bombe atomique tactique qu’ils se mettraient beaucoup de pays à dos ! L’Ukraine, voire l’occident, comme un animal blessé, sera/seront alors des plus dangereux.
Cher Monsieur,
Vous avez raison. Ce que je décris, c’est la « mathématique des choses ». Mais on ne peut prévoir le « grain de sable », càd l’action d’éclat qui sortirait la guerre de son cadre prévisible. C’est Cec que les ukrainiens pourraient être tentés de faire, pour une raison simple : si, comme on le pense, près de 50% des prêts et des armes sont détournés, la « motivation » de Zelensky et des oligarques pour une poursuite ad vitam aeternam de la guerre est gigantesque. On peut penser que les américains le savent, et qu’ils ont à cœur de le canaliser. Mais on n’en est pas sûrs.
Cordialement,
François Martin
@Ivano-Petro
1. On ne peut pas dire que tout le monde comprend la stratégie russe. C’est même l’inverse, il n’y a pas grand monde ! Il n’est que de lire Michel Goya, d’écouter les experts de plateau TV et nos dirigeants occidentaux, tous croient que Poutine voulait une guerre éclair et qu’après les défaites de Krasni-Liman et de Kherson il est en train de perdre. Les seuls qui commencent à entrevoir la réalité sont les militaires du Pentagone et leur chef, le général Mark Milley, qui tentent de pousser vers une négociation. Négociation qui n’est pas prête d’arriver au vu des conditions préalables inacceptables qu’ils y mettent.
2. Il y a pas mal d’indices montrant que les Ukrainiens étaient en train de préparer une “bombe sale” avec l’aide des Britanniques. Pour une fois les Russes ont remarquablement réagi, en alertant personnellement tous les responsables occidentaux et en leur fournissant des preuves. A la suite de quoi l’AIEA a décidé de contrôler les déchets nucléaires ukrainiens, ce qui a contraint les Britanniques à démonter l’opération et à faire disparaître les traces. Je crois que la menace de “bombe sale” est définitivement écartée.
3. Même suite à un attentat à la “bombe sale”, les Russes n’utiliseront pas une arme nucléaire tactique. Ils ont répété haut et fort que leur doctrine nucléaire ne prévoit d’emploi que contre une attaque, nucléaire ou pas, mettant en danger l’existence même de la nation. On en est très loin. Ensuite la Russie dispose d’armes non nucléaires imparables (les fameux missiles hypersoniques) et elle a toute une palette d’actions de représailles conventionnelles dont les Occidentaux n’ont pas l’équivalent.
4. Je ne crois pas du tout au sursaut de bête blessée de l’Ukraine ou de l’Occident. En stratégie, on apprend que le facteur essentiel de la victoire est la volonté. Le peuple russe se bat pour sa survie et c’est une remarquable réussite pour Vladimir Poutine de l’avoir fait comprendre à son peuple. Les Ukrainiens se battent pour avoir le droit de persécuter leurs compatriotes du Donbass, les Européens pour faire plaisir aux USA, les Américains pour garder la domination du monde (les élites américaines, pas le peuple). . Aucune de ces motivations n’est essentielle !
Cher Monsieur,
Je suis bien d’accord avec votre analyse. Vous oubliez cependant une motivation : l’argent. En ce moment, avec les détournements d’aides et d’armes, Zelensky et ses amis oligarques font fortune. De même que ses contreparties occidentales qui touchent les « kick back », les retrocommissions pharamineuses qui doivent être payées pour que cela dure. + tout ce qui est vendu comme armes aux européens par les américains. Pour les néo-cons, c’est champagne tous les jours. Les banques du Delaware doivent bouillir…
François Martin
???????????? Excellent.
Les sommes que vous citez, engagées pour entretenir ce régime et cette guerre sont exorbitantes. La vraie question est celle posée sans relâche par Nicolas Bonnal ici et ailleurs:
Mais pourquoi ne réagissons NOUS pas? C’est spécialement vrai des froncés raisonneurs semble t il. L’absence de réaction de la masse n’échappe plus à personne, même aux plus optimistes.
(je serai à la manife demain au départ du Palais Royal) ???????? ???????? ????????
.
Cher Monsieur,
C’est un mystère en effet. Je crois que la modernité récente a très profondément professionnalisé la propagande, comme l’a expliqué Éric Verhaeghe dans plusieurs articles. Il reste qqs résistants, dont vous et moi faisons partie. Les classes populaires ont souvent gardé leur bon sens, mais n’ont pas la parole. Les classes supérieures sont très sensibles au discours ambiant, d’abord parce qu’elles détestent le changement, ensuite parce qu’elles préfèrent très largement le mondialisme américain et le progressisme qui va avec, plutôt que le conservatisme, surtout si c’est, en l’occurrence, Poutine qui l’incarne, enfin parce qu’elles ont une peur panique du qu’en dira-t-on. Pour le dire autrement, ils préfèreront toujours mentir avec tout le monde plutôt que de dire la vérité. Ils préfèrent être en paix avec leurs voisins plutôt qu’avec leur conscience. Lisez Timur Kuran et « Private truths, public lies ». Vous verrez, c’est limpide. Vous me donnez d’ailleurs une bonne idée pour un prochain article !
Cordialement,
François Martin
Brillant !
Merci au Courrier des stratèges de nous offrir des analyses de ce calibre. Je mets sur la même ligne Alexandre N et Big Serge.
Bravo et merci !
Dès le début les responsables russes ont dit que leur lutte était contre l’Occident collectif, pour l’établissement d’un nouvel ordre mondial multipolaire fondé sur le droit. Dans cette perspective, les opérations militaires en Ukraine sont secondaires. Elles permettent essentiellement d’user le potentiel militaire et économique occidental. A la limite, la Russie pourrait très bien se satisfaire d’un gel de la situation à la chypriote, avec une force d’interposition de l’ONU ad vitam æternam pour peu qu’elle réalise son objectif majeur…
En outre le fait d’avoir lancé l’opération spéciale avec un rapport de force largement défavorable montre clairement que la Russie ne recherchait pas une victoire-éclair…
Mais cela personne ne veut le voir ! Cela fait des mois que je l’écris sur différents blogs, avec le sentiment d’être bien isolé…
Cher Monsieur,
Vous avez tout à fait raison. Sauf qu’avant cette situation « à la chypriote », Poutine doit atteindre ses objectifs stratégiques. Il en a 3 : Marioupol (c’est fait, il contrôle la mer d’Azov), Kramatorsk (c’est en cours, il contrôlera le Donbass), Odessa (c’est pour plus tard, il contrôlera la mer Noire). Après ça, en effet, il gèlera le conflit à la chypriote ou à la coréenne, et ça sera parti pour 100 ans.
Cordialement,
François Martin
Votre parallèle entre Poutine et Franco est surprenant, mais ô combien convaincant !
Le but de guerre qui consiste à éliminer physiquement le plus grand nombre possible de combattants ennemis et à repousser d’autant la conclusion de la paix est moralement indéfendable. C’est même inavouable !
Et pourtant, c’était un objectif même pas voilé de l’opération Barkhane au Mali, assumé par François Hollande et Emmanuel Macron…
Les chefs politiques peuvent prendre ce genre de décision inavouable, pour l’intérêt supérieur de leur pays.
Dans le cas présent, reconnaissons que c’est ce qui se passe sur le terrain. D’après Erwan Castel le rapport des pertes ukrainiennes sur les pertes russes serait de 7 contre 1, voire même de 10 contre 1…
Je pense que vous avez raison. L’énorme mensonge ukrainien sur les pertes russes (on voit bien à quel point ces derniers ménagent leurs soldats) et le mythe de la bravoure ukrainienne (ils en sont à la 8ème mobilisation, ce sont aujourd’hui des mercenaires étrangers qui se battent) sert à camoufler le drame absolu que vit cette armée. C’est tragique. Et chacun en remet une couche, même si les américains semblent avoir compris qu’ils n’y arriveront pas. Mais la principale motivation est là, et elle est pharamineuse : l’argent. Jugez donc : dépensé jusqu’ici par l’ouest, plus de 80 milliards de USD. Imaginez seulement 30% de détournement (c’est probablement plus), ça fait 25 Milliards de USD à se répartir déjà pour les oligarques ukrainiens et les chefs de l’armée (en 91, ils ont détourné pour 34 milliards de USD d’armes soviétiques. Pour ceux qui étaient déjà là à l’époque, c’est le 2ème jack pot de leur Histoire). Et imaginez là dessus 30% de rétro commissions, ça fait 8 ou 9 milliards à se partager déjà entre les intermédiaires, agents de la CIA et autres politiciens occidentaux, en seulement 8 mois. Il ne faut surtout pas que ça cesse…
Cordialement,
François Martin
Il n y a qu a voir le lien avec FTx rt les politiciens democratrs (deuxième contributeur apres Soros) et le financement de l aide a l Ukraine
https://m.epochtimes.fr/la-relation-entre-ftx-lukraine-et-les-democrates-souleve-les-interrogations-2160543.html
Pour Napoléon ce que vous dites dans l’article est historiquement faux !
Prenez quelques pour des recherches historiques vous verrez par vous même.
Après les conclusions sont curieuses, la fleuve étant la seule barrière nature qui bloque chacune des armées.
L’intérêt des russes à poursuivre la guerre ?
Leur armée est à l’agonie.
Leur stock de munition combien reste t-il ?
Économiquement c’est intenable.
Et internationalement même leurs plus proches ailés leur dit d’arrêter.
Alors bon on ne pas en débattre juste pour s’opposer, on verra la suite.
Je commentais sur un autre site pro USA et très anti-Russie dès fin avril début mai, que Poutine ne s’arrêterait pas avant d’avoir conquis l’ouest d’une ligne Karkiv à Odessa y compris un large couloir jusqu’à la Transnitie. Mais je pensais que cela irait bien plus rapidement, ne croyant pas à une aide aussi massive en armes et en argent et des USA et de l’UE. Mea culpa sur ce point. Quand à l’analogie avec Franco, la guerre d’Espagne et Madrid, ayant lu « La guerre d’Espagne » de Bartolomé Benassar et dernièrement « Les mythes de la guerre d’Espagne » de Pio Moa, je souscris à l’analyse de l’édito, d’une dévitalisation et de l’armée et de la résistance ukrainienne. Quand au temps que cela prendra, là est la question, car Zélinsky devra , à mon avis, faire face à une opposition du peuple est-ukrainien, peut-être de l’armée, car tous ne se gavent pas et il y a des gens lucides.
Cher Monsieur,
Je pense que c’est ce qu’attend Poutine en effet : la révolte des populations ukrainiennes contre Zelensky, et des nôtres contre nos dirigeants. C’est exactement ce qu’il a fait en Géorgie en Août 2008. Suite à l’attaque géorgienne contre les provinces sécessionnistes, il a contre-attaqué, et à défait l’armée géorgienne (et l’OTAN, médusée, n’a pas réagi), mais il s’est arrêté aux portes de Tbilissi, puis est rentré chez lui. La population géorgienne furieuse s’est retournée contre Saakachvili, et l’a chassé du pouvoir. C’est exactement ce que Poutine veut obtenir. Lorsqu’il aura ça, « la discorde chez l’ennemi », le reste pour lui ser du gâteau.
Cordialement,
François Martin
Très intéressant, complet, documenté.
Merci.
Une simple remarque de forme : quand on écrit un “Français”, un “Russe”, un “Ukrainien”, un ” Américain”, etc. , il faut impérativement mettre une majuscule. On doit écrire, par exemple : “Le président français est un Français soumis aux intérêts américains”.
Pour le fond, je ne partage pas du tout la similitude entre Poutine et Franco. Que je sache, Poutine n’est pas arrivé au pouvoir en Russie à la faveur d’une guerre civile.
Encore un très bon article.
Bien entendu la Russie n’affronte pas l’Ukraine qu’elle a déjà vaincu depuis longtemps, mais tout l’occident collectif, soit environ une quarantaine de pays qui fournit financement, armes, et combattants à l’Ukraine. Elle mène cette guerre ou opération spéciale avec une petite fraction de son armée, et en se gardant bien de dévoiler ses meilleures armes à l’OTAN, notamment en brouillage électronique, où elle a, là aussi, une énorme avance. L’occident perdra sur tous les plans : financier, économique et militaire : c’est la fin de son empire qui s’effondre dans une grande mesure par lui-même, même au niveau culturel.
Cher Monsieur,
C’est ce que je pense aussi. Vous avez parfaitement résumé la situation.
Cordialement,
François Martin
Bonjur
Merci pour cet excellent article, qui permet d’avoir un éclairage intéréssant au-delà des déceptions pro-russes (on a perdu Kherson, c ‘est la fin, une honte , ..) et des joies pro-Ukro-Us (ça y est on gagné).
Seul bémol, je tique sur la comparaison Franco-Poutine 🙁 En tant que fils d’espagnols (catalans) et ayant longtemps vécu dans le sud-ouest de la F, je connais bien la haine anti-franquiste et l’histoire des Républicains. Sans doute on peut y voir des ressemblances entre les 2 hommes, notamment en tant que stratèges de guerre, mais pour le reste, je vois plus de ressemblances entre Franco et Zelinski qu’entre Franco et Poutine. Notamment, leurs liens avec le fascisme. Autre exemple de similitude : sous Franco il était interdit de parler les langues régionales (catalan et basque notamment). C’était la négation des identités culturelles régionales au profit d’un pouvoir dictatorial, centralisé et ouvertement fasciste (Espana, una, grandé y libré). C’est bien à ce que l’on assiste – certes, en bien plus fort – en Ukraine avec la tentative d’épuration ethnique des populations russophones du Donbass.
Merci pour votre travail.
Cordialement