En géopolitique, comme en économie,  le déclin de l’universalisme occidental est acté, par Florent Machabert

En géopolitique, comme en économie, le déclin de l’universalisme occidental est acté, par Florent Machabert


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L'Inde prévoit des échanges bilatéraux d'une valeur de 8 à 9 Mds $ avec la Russie et le Sri Lanka au cours des deux prochains mois, après avoir obtenu de la Reserve Bank of India d’intensifier son commerce international en roupie. Les banquiers centraux indiens viennent en effet d’autoriser le mois dernier importateurs et exportateurs de produits indiens à payer en roupie partiellement convertible. Cette mesure est considérée comme facilitant largement le commerce avec la Russie et les voisins d'Asie du Sud au détriment du dollar. Comme évoqué dans le dossier 7 dédié à l’achat de devises, la roupie pourrait voir son cours être prochainement dopé.

Les importations indiennes en provenance de Russie, principalement du pétrole brut, ont été multipliées par cinq par rapport à l’année précédente pour atteindre plus de 15 Mds $ entre juillet 2021 et février 2022, date de l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Les exportations ont, quant à elles, chuté à 852,22 M$, contre 1,34 Md $ au cours de la même période, en raison notamment de l’absence de mécanisme de règlement des paiements avec la Russie frappée par des sanctions. Un effet de rattrapage reste donc probable. Par ailleurs, l’Inde s’est abstenue de condamner la Russie, avec laquelle elle entretient de longue date des liens politiques et sécuritaires, tout en appelant à la fin des violences en Ukraine. Elle défend ses achats de produits russes dans le cadre d’un effort de diversification de ses chaînes d’approvisionnement et affirme qu’un blocus ferait grimper les prix mondiaux et nuirait à ses consommateurs. Pour mémoire, une partie du pétrole russe qu’elle achète est raffinée sous forme de diesel qu’elle exporte ensuite vers l’UE, laquelle fait figure de royaume des hypocrites et de cocus volontaires.

Le chiffre de la semaine

1 Md $

La plateforme américaine FTX, seconde plateforme d’acquisition et d’échange de cryptomonnaies (derrière Binance), vient de faire faillite. Son gérant aurait volé (il n’y a pas d’autre mot) 1 Md $ à ses clients et a fait don de 100 M$ aux démocrates. Il avait, de plus, récemment proposé à chaque Ukrainien l’équivalent en cryptos de 25$, sans oublier que l’entreprise avait prêté près de 10 Mds $ de dépôts de ses clients à une de ses filiales de trading , en violation totale avec les réglementations en vigueur. De même, le World Economic Forum de Schwab, dont nos lecteurs sont désormais familiers, aurait des liens avec FTX, qu’il promouvait sur son site web, jusqu’à ce que ce partenariat disparaisse des écrans radar à l’annonce de sa faillite frauduleuse et de la fuite de son fondateur, Sam Bankman-Fried (SBF), patronyme qu’on pourrait traduire par Sam le Banquier Frit : ça ne s’invente pas. Après Trudeau, Macron et Sunak, aussi beaux au G20 dans leur chemise colorée que Tom Selleck dans Magnum, quel flair ce papy Schwab !

N’oublions pas que chaque crise – et celles qui secouent les unes après les autres l’écosystème des cryptos ne font pas exception – est créatrice d’opportunités autant que de menaces. Doit désormais être surveillée l’intrusion que pourraient tenter les acteurs financiers traditionnels et régulés dans l’univers des cryptoactifs pour offrir aux clients privés et institutionnels une solution de dépôt de leurs cryptomonnaies avec les mêmes garanties (très discutables comme vous le savez…) de sécurité et de transparence que sur les autres classes d’actifs. Enfin, Binance a proposé la mise en place d’un système de Proof-of-Reserve, c’est-à-dire un audit utilisant la technologie blockchain pour offrir une transparence totale des liquidités détenues par les plateformes. La réglementation des cryptomonnaies est donc à suivre comme le lait sur le feu et il faudra trier le bon grain de l’ivraie.

La déclaration de la semaine

« Nous étudions la possibilité de mettre en orbite des data centers solaires. » Ursula von der Leyen

La Commission européenne a mandaté Thales Alenia Space pour étudier la possibilité de mettre en orbite des data centers, alimentés par des centrales solaires. Nous avons donc désormais la certitude qu’il n’y a pas que la racine des cheveux qui décolle chez Ursula. Thales, qui développe déjà pour le Gouvernement français son Digital Wallet (identité numérique assise sur un « pass citoyen multiservices »), estime que ce projet pourrait contribuer au Green Deal de neutralité carbone d’ici 2050 et constituerait un développement sans précédent de l’écosystème du spatial et du digital européen… Le premier objectif de l’étude sera de montrer que les émissions carbones produites lors des phases de production et de lancement des infrastructures spatiales seront nettement inférieures aux émissions que produiraient les data centers en restant au sol. Son second objectif sera de prouver qu’il est possible de développer la solution de lancement requise, et d’assurer le déploiement et l’(inter)opérabilité de ces data centers spatiaux, en utilisant des technologies d’opérations robotisées d’assistance en orbite actuellement développées en Europe. Pas sûr que le commissaire Thierry Breton ne regrette pas rapidement de s’être mis à dos le nouveau patron de Twitter en menaçant l’oiseau bleu de censure, un certain E Musk pour qui tout cela serait, à en croire les succès de SpaceX, un jeu d’enfant. Mais au sein de la caste mal frustrée enfant, c’est une marque de fabrique : les rodomontades priment toujours sur la réflexion.

L’actif de la semaine

Dossier 10 : Acheter des obligations souveraines… extra-européennes.

Dans notre 10ème dossier à paraître demain 20/11, nous explorons pour vous le quatrième compartiment de tout portefeuille « brownien », revisité ici pour faire face à la stagflation : nous traiterons des obligations souveraines, c’est-à dire des titres de dette émis par des pays… extra-européens bien sûr. Un 15-pages indispensable pour ajouter à vos métaux précieux, devises étrangères et actions françaises une sélection de bons du Trésor, de 2-ans et de 10-ans étrangers testés pour vous dans l’esprit de sécession, de diversification et de protection du patrimoine qui caractérise tant le Courrier des Stratèges que Samarie & Cie.

Retrouvez nos dossiers bimensuels de sécession patrimoniale dans la boutique :

  • le N°1 consacré aux différentes classes d’actifs pour traverser la stagflation ;
  • le N°2 sur l’or-investissement ;
  • le N°3 sur les métaux blancs ;
  • le N°4 sur les matières premières ;
  • le N°5 sur l’art-investissement ;
  • le N°6 sur le non coté ;
  • le N°7 sur les devises étrangères ;
  • le N°8 sur les actions françaises ;
  • le N°9 sur les cryptoactifs.

Le N°10, à paraître le 20/11, portera sur l’investissement dans une sélection d’obligations souveraines étrangères.  


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