Confronté à la « bataille des gauches » suscitée, au parlement espagnol, par le débat sur la « loi sur le genre », l’observateur qui aura préalablement décrété avoir déjà tout compris à son époque n’aura que l’embarras du choix des perspectives interprétatives.
On pourra, par exemple, choisir de n’y voir qu’un nième exemple de la « tendance sénestrogyre » qui, conformément à un marronnier de la politologie, caractérise depuis longtemps la politique occidentale : devant la perspective du libre choix « de son genre » par un mineur de 16 ans, les vieux marxistes du PSOE seraient comme les radicaux- socialistes de la IIIe République en France, qui, une fois installés au pouvoir, ont fourni à la bourgeoisie patronale ses meilleurs briseurs de grèves, etc..
A parti unique, société non-binaire
Mais on peut aussi choisir d’explorer le non-dit de cet article de Marianne qui commente avec gourmandise la nouvelle bataille des anciens et des modernes. Revenue à de meilleurs sentiments après plus d’un an de covidisme féroce, la vieille gauche européenne (représentée par le PSOE en Espagne), au bout du bout des reniements, n’est plus que le parti de l’ordre établi. Auquel, en outre, plus aucune droite ne semble s’opposer sérieusement. Dans un monde où, rien n’étant plus interdit, tout est devenu impossible, c’est donc à l’extrême-gauche que revient la mission d’assurer la pérennité du spectacle démocratique, en s’agrippant frénétiquement à son fantasme woke. Comme, dans la réalité, on ne peut plus voyager, ni bientôt se chauffer ou se nourrir à force de réinitialisations vertes et inclusives, la dernière frontière de la liberté abstraite (pour ne pas dire : imaginaire) sera donc la promotion d’« un tourisme diversifié et inclusif où les personnes LGBTQI sont rendues visibles en tant qu’agents ou sujets du tourisme, avec un accent particulier sur les zones rurales ». Et que pourraient bien, en effet, faire les États -croupions non-souverains de l’Union dite européenne, si ce n’est légiférer sur l’Utopie – pour ne pas dire : sur le sexe des anges ?