L’article de Seymour Hersh affirmant que ce sont bien les services américains qui ont détruit les gazoducs Northstream en mer Baltique fait couler beaucoup d’encre et suscite les critiques, mettant en doute le sérieux de l’enquête. Mais au-delà de celle-ci, un fait s’imposait d’entrée : ce ne sont pas les Russes qui sont les auteurs de l’opération. Parce qu’ils n’y avaient aucun intérêt, mais aussi parce que cela leur était techniquement impossible.
Il n’est pas question de soutenir que les Russes ne savent pas le faire : La Russie a bel et bien les moyens techniques de réaliser une telle action d’éclat. Elle dispose pour cela de neuf submersibles destinés aux opérations spéciales. Tous appartiennent à la flotte du Nord. Ils opèrent depuis l’Arctique au sein d’un escadron de sous-marins, le 29e escadron spécial, basé dans la baie d’Olenya, sur la presqu’île de Kola, une des zones placées en permanence sous la surveillance des satellites militaires américains. Parmi ces sous-marins, trois, gigantesques, avec une taille variant de 166 à 184 mètres de long et un déplacement allant de 18 000 à près de 30 000 tonnes en immersion, sont des « bateaux-mères ». Ils mettent en œuvre des submersibles plus petits qui, une fois transportés sur zone, peuvent servir de base de départ à des plongeurs de combat, formés à faire sauter tous types d’installations, dans un port ou en pleine mer. Le problème est qu’au moment où les gazoducs ont sauté les trois sous-marins en question, qui ne peuvent guère appareiller sans que leur départ soit détecté compte tenu de leur taille et de la surveillance constante dont ils font l’objet, étaient en Arctique.
Les Russes ne sont pas des James Bond
L’un, le Biélogorod, le fameux porteur de torpilles nucléaires Poséidon était en manœuvres. Il n’a pas bougé de sa zone d’exercices. L’autre, l’Orenburg, était en cours de maintenance, à quai. Le dernier, le Podmoskovie, était opérationnel. Mais comment aurait-il pu remplir cette mission sans être détecté ? Lancé en 1982, cet ancien SNLE a un mode de propulsion bruyant. Il aurait fallu qu’il quitte sa base, sans être détecté, qu’il longe les côtes de la Norvège, où patrouillent en permanence des navires et des avions de lutte ASM de l’OTAN, sans être remarqué. Puis il aurait dû franchir le barrage GIRU, dispositif de détecteurs acoustiques occidentaux échelonnés entre la côte du Groënland, l’Islande, le Royaume-Uni et le sud de la Norvège, sans émettre de son audible. Arrivé vers Oslo, dans le Skagerrak, premier des détroits danois faisant la jonction avec la mer Baltique, il aurait dû passer le Kattegat.
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Excellent article. L’évidence de l’innocence russe pour cet attentat Nord stream est bien démontrée.
Mais comme d’habitude malheureusement, la vérité prend l’escalier lorsque la propagande (la plus indigeste) prend l’ascenseur…