Jean-Jacques Bolzan est adjoint au maire de Toulouse, chargé du “bien-manger”, et président de la Fédération des Marchés de gros. Il nous a reçu pour évoquer avec nous la grogne des agriculteurs et les solutions que l’on peut y apporter. Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il n’a pas froid aux yeux et qu’il ne manque pas de courage pour parler de la réalité. Revenir à une agriculture comme celle de nos grands-parents, comme tant de gens le souhaitent ? Bien sûr ! Mais qui accepterait les semaines interminables, les travaux pénibles et épuisants, l’absence de temps libre pour produire à l’ancienne ? Et quel consommateur acceptera de payer sa nourriture beaucoup plus cher pour la même quantité ?
Jean-Jacques Bolzan pourrait nous réconcilier avec la politique ! et encore mieux, avec les politiques ! sa parole franche et réaliste a en effet un grand mérite : elle réexplique factuellement, anecdotiquement, que le monde est moins simple qu’il n’y paraît. Hurler avec la meute derrière son écran d’ordinateur pour faire l’éloge d’un monde idéal est d’une simplicité biblique. Prendre des responsabilités et changer réellement le cours du monde est autrement plus compliqué, et suppose bien plus d’énergie et d’ardeur que le moralisme paresseux auquel succombe tant de nos contemporains (mais nous les aimons bien, mais il est bon de leur rappeler de temps à autres les lois élémentaires de l’existence).
Donc, Jean-Jacques Bolzan, adjoint au maire de Toulouse, nous a ramené aux dures réalités de l’agriculture contemporaine, que j’avais résumées dans le principe du trilemme agricole : comment nourrir la population de façon saine et abordable, en garantissant une qualité de vie satisfaisante aux agriculteurs ?
D’abord, répétons-le inlassablement, le métier d’agriculteur n’a rien à voir avec le mythe bobo de l’homme proche de la terre. C’est un métier pénible, usant, chronophage, qui ne laisse pas place à beaucoup d’autre chose que l’échine courbée vers le sol pour arracher aux entrailles de notre petite planète de quoi nous nourrir. Certaines années bonnes et d’autres non. Beaucoup d’urbains imaginent que le travail des champs est poétique, humanisant. Mais comment faire, lorsque ceux qui s’y essayent rendent leur tablier au bout de six mois parce qu’il se révèle trop dur pour une France rompue aux 35 heures, aux loisirs, à la “qualité de vie” ?
Ensuite, beaucoup de Français (nous le lisons chaque jour dans les commentaires parfois haineux sur la Toile) adorent donner des leçons de morale. Il faut une société plus humaine. Il faut produire local. Nous sommes prêts à être solidaires pour aider les agriculteurs qui font du bio et de l’agriculture durable. Mais, le samedi, le jour des emplettes, beaucoup préfèrent aller à l’hypermarché pour se ravitailler. Officiellement, “parce qu’on n’a plus les moyens d’aller au marché”. Mais le portable dernier cri payé à chacun des enfants ? Mais l’abonnement Netflix ? Pas question d’avouer que l’hypermarché, ça va plus vite, c’est moins contraignant, que d’acheter local.
Enfin, peu de Français connaissent vraiment tous les rouages de leur pays. Il faut être indépendant, entrepreneur, petit patron, pour savoir le poids réel de la bureaucratie en France. Les salariés mesurent mal le poids qui pèse sur les épaules de ceux qui risquent tout pour gagner leur vie sans filet de sécurité. Là encore, la conviction habilement diffusée, nourrie, attisée, notamment par des infiltrés de la macronie qui jouent aux indépendants, selon laquelle les salariés sont des quasi-esclaves asservis à des patrons féroces et sans scrupules dissimule une réalité bien plus rude : tout est fait pour dissuader les Français d’entreprendre et de s’émanciper de l’Etat.
Excellent! Bravo!
Excellente interview. Merci beaucoup.
J’aime bien sa prudence quant au futur sur les pratiques agricoles.
Il est évident, même pour moi qui n’y connaît rien, qu’on ne peut changer des pratiques d’un coup d’un seul.
Il faudra y aller pas à pas, et ça prendra du temps.
J’ajoute que depuis bien des années
J’achète local et bio.
Aucun produit frais en grande surface.
Faut être cohérent.
D’ailleurs c’est bien meilleur.
On voit vraiment la différence au goût et la cuisson d’un légume bio est beaucoup plus longue que celle d’un légume issu de l’agriculture Intensive.
Les élus de terrain et de territoires sont les vrais politiques les 2 pieds sur terre. Il faut supprimer toutes les lois et règlements inutiles de toutes urgences.
Là je vous rejoins : on entend beaucoup “ils ont raison, il faut les soutenir”… Mais on ne voit pas foule dans les circuits courts et les magasins coopératifs ruraux. Et pourtant contrairement à ce qu’on pense souvent, ce n’est pas forcément plus cher, simplement il y a moins d’intermédiaires qui se gavent sur le prix de vente. Mais évidement cela nécessite de prendre un peu plus de temps pour faire ses courses au lieu de remplir son chariot en une fois au supermarché.
Pour les pressés, il existe aujourd’hui de plus en plus de formules “drive” organisées par regroupement de petits producteurs et d’artisans. C’est très pratique. On trouve aussi du bio pas cher du tout chez ceux qui ont renoncé à la certification par mesure d’économie pour les deux parties.
cela sent bon la résignation, les fermes de 1000 vaches ne produisent pas de viande saine. C’est l’industrialisation de l’agriculture.
Il est tout de même étonnant que ce que l’agriculture faisait vant les fermes industrielles marchait, la population était nourrie et les prix étaient raisonnables.
pourquoi ce n’est plus possible?
Car l4europe et la mondialisation américaine sont passées par là.
En fait, cette question est traitée dans la vidéo que, manifestement, vous n’avez pas regardée. Avant, comme vous dites, les gens acceptaient la dure vie de paysan, 24:24; 7/7. Aujourd’hui, ce type d’effort n’est plus supporté. Avant de critiquer, je recommande toujours d’écouter et de lire. Cela évite de parler dans le vide.
Ouh la Éric se la joue ayatollah !
Monsieur Bolzan est tout de même dans la réalité de la société d’aujourd’hui.
Conso’ locale au café le matin avec les copains et le soir vite vite au supermarché pour être à l’heure devant la tv en mangeant !
Quant à dire qu’on ne trouve pas de jeunes qui veulent s’installer c’est peut être vrai sur son territoire mais chez nous en pays basque il n’y a pas de pénurie de repreneurs d’exploitations familiales et même création.
II y a près de vingt ans, en désaccord avec la FNSEA du département une partie des agri’ s’étaient regroupés sous la bannière d’EHLG et prônaient le ” on peut être nombreux et heureux ”!
Je vous invite à aller sur leur site : ehlgbai.org
Le lait comme le sucre (le premier lobby moderne apparu au 19e siècle, merci Napoléon et le blocus du continent alors) comme le gluten de blé étant des toxiques, on ne “nourrit” pas “le peuple” en en massifiant la production et les utilisations. La consommation de viande est déjà trop élevée en Occident (oups) et la population y baisse. Les fermes de 1000 vaches ne sont donc pas utiles, des maraîchers plus nombreux et actifs autour des villes sont beaucoup plus nécessaires…
Les illusionnistes si rentables se cachent derrière des propos “raisonnables” plus encore que derrière les bobos irréalistes…
Très bonne vidéo, à mon corps défendant car une ferme de 1000 vaches reste pour moi une aberration, mais le discours est très réaliste.
Ceci dit : on mange en France beaucoup trop de viande, de boeuf en particulier, et trop de lait de vache aussi. Ce n’est pas moi qui le dit, c’est un discours commun aux climatologues (la preuve qu’ils ont tort sur le rôle de l’homme est loin d’être faite …) et aux diététiciens (au sens large). Donc il y a très probablement un comportement alimentaire à changer. Les poules polluent moins que les vaches, et les oeufs sont une des meilleures protéines. Personne n’a besoin de se goinfrer de céréales, mais tout le monde doit pourvoir manger des légumes et du gras de qualité.
Par ailleurs, les exploitants en monoculture, ou insuffisamment diversifiés, sont une aberration : il suffit d’une année foireuse pour qu’ils réclament des indemnisations.
Je verrais d’un meilleur oeil de taxer durement les importations alimentaires non soumis aux mêmes contraintes phyto et sanitaires, que d’abandonner celles-ci. Les pesticides sont une calamité sanitaire que nous payons avec la sécu.
Enfin la FNSEA représente les industriels, pas les agriculteurs, et en particulier pas le bio.
Comme dit Mr Bolzan : vaste sujet !
quoi qu’il en soit la ferme des mille vaches n’est pas acceptable, sinon il faut aussi accepter le glyphosate!