M. Macron a rappelé que l’Etat d’Israël était né d’un vote de l’ONU ; M. Netanyahou a répondu que c’était plutôt une guerre d’indépendance qui, en 1948, a permis l’émergence de l’Etat d’Israël et a accusé M. Macron de s’être livré à une « affligeante distorsion de l’histoire ». La maîtrise de cette science, en effet, n’étant pas le point fort du Président français, un doute est-il permis ? Il n’y a pas d’autre solution que de revenir sur ces événements pour y voir plus clair.
On sait qu’un Foyer national juif avait été créé sur les ruines de l’Empire ottomanau Traité de Sèvres en 1920,à l’initiative de la Grande-Bretagne. Cette dernière avait alors reçu mandat de la Société des Nations (ancêtre de l’ONU) pour administrer le territoire. Elle dut faire face à deux mouvements indépendantistes rivaux : l’Irgoun, dont l’un des dirigeants sera le célèbre Menahem Begin, et un nationalisme arabe, au début un peu chaotique puis mieux organisé vers 1931 par Izz al-Din al-Qassam (1882-1935) qui créa l’organisation des Fedayin (équivalant aux futurs Kamikazes japonais ou aux anciens Assassins du XIIIe siècle, qui n’hésitaient pas à se sacrifier – c’est ce que signifie le mot « fedayin » – pour porter leurs coups). Ceux qui connaissent la première version de Tintin au pays de l’or noir, qui se passe en 1939, voient comment les Anglais sont pris entre l’enclume de la résistance arabe et le marteau de la résistance juive.
La résolution 181 de l’ONU et ses conséquences géopolitiques
En 1947, un an avant l’indépendance à proprement parler, l’ONU vota la résolution n° 181, adoptée à la majorité (33 voix pour, dont, fait exceptionnel, les Etats-Unis et l’URSS ensemble, 13 contre et 11 abstentions) prévoyant une séparation de la Palestine mandataire en trois parties. En schématisant et en tenant à part d’autres lieux, nous dirons que Jérusalem – incluant sa banlieue Bethléem – aurait un statut de ville internationale administrée par l’ONU elle-même ; la Galilée serait coupée en deux, la Judée et la Samarie laissée aux Palestiniens, la côte à partir d’Acre donnée à Israël,moins le port de Jaffa et jusqu’à une bande de Gaza plus haute qu’aujourd’hui. Un kaléidoscope qui ne contentait personne : dans une position de principe, les Arabes refusaient l’existence même d’un Etat d’Israël qu’ils regardaient comme une colonisation du pays par une population venue d’Europe et d’Amérique européenne ; quant aux Israéliens,ils ne voyaient pas comment défendre leur territoire en cas d’attaque.
C’est ainsi qu’ils s’agrandirent à la faveur de la guerre de 1948, chassant les Palestiniens de Galilée, d’où un nombre considérable de réfugiés entrèrent au Liban en le déséquilibrant gravement ; et réduisant la longueur de la bande de Gaza ; tandis que la Jordanie profita des circonstances pour annexer la Judée-Samarie qu’on appelle aujourd’hui « Cisjordanie » (les Anglophones disent : « West Bank ») en échange d’un partage de Jérusalem entre un ouest aux mains des Juifs et un est aux mains des Jordaniens. Le roi de Jordanie se proclama alors « roi de Palestine ».
La guerre de 1948 : exodes, expulsions et reconfiguration du Proche-Orient
Jusqu’en 1948, les Juifs n’avaient confisqué aucune terre, ils avaient acheté les leurs, comme l’a rappelé récemment l’historien Georges Bensoussan, qui a tenu à répondre, certesavec érudition, mais à côté du problème des spoliations postérieures. Car naturellement la guerre de 1948-49 provoqua des exodes, des expulsions, ce que les Palestiniens appellent la « Nakba », la Catastrophe.
Voilà donc ce qui s’est passé en 1948 : la Grande-Bretagne se retirant sans chercher à gérer la partition du territoire comme elle avait dû le faire l’année précédente aux Indes, Ben Gourion proclama l’Etat d’Israëlle 14 mai, attirant contre lui une Ligue arabe réunissant l’Egypte, la Jordanie – qui a su tirer son épingle du jeu, du moins jusqu’en 1967 – la Syrie, le Liban, mais également l’Arabie et le Yémen du nord. Sa victoire en 1949 consolida sa position. L’ONU ne put rien faire contre, et son représentant, le prince suédois Foulque Bernadotte, auteur d’un nouveau plan de partage, à vrai dire tout aussi irréaliste, comme tous les plans qui ont suivi et jusqu’à la thèse aujourd’hui « des deux Etats », fut assassiné par des extrémistes juifs. Le 11 décembre, l’ONU, impuissante, adopta tout de même la résolution 194, réclamant un droit au retour des réfugiés chez eux, environ 800.000 personnes ; mais en vain.
Les guerres suivantes sont sans doute mieux connues : 1967, 1973… Celle commencée le 7 octobre 2023 est en cours.
Le Courrier des Stratèges
Pensez par vous-même
Vous pensez sincèrement que notre Mozart de la finance connait quelque-chose à l’histoire ?
« Pour y voir plus clair » dans cette déclaration de Macron sur la naissance de ‘État d’Israël, le première question à se poser est : qui est l’inventeur de Macron ? Réponse :
https://www.lesechos.fr/2017/01/macron-la-premiere-marche-1234148
La seconde question serait : quelle est l’opinion de Jacques Attali sur la création de l’État d’Israël ?
Pour cela se reporter à son ouvrage : « Dictionnaire amoureux du Judaïsme » où dès l’introduction, du milieu de la page 51, jusqu’au milieu de la page 57, il traite ce sujet dans le détail. Il note que le 29 novembre 1947 « l’Assemblée générale des Nations Unies approuve le partage de la Palestine » en deux États, et que « Le 14 mai 1948, David Ben Gourion proclame la renaissance de l’État hébreu après 1878 ans d’absence. »