Après un retour qui restera dans l’histoire américaine, M. Trump va devoir relever au moins quatre défis impressionnants.
Le premier est la lutte contre l’Etat profond, une réalité que Trump a négligée durant son précédent mandat, ce qui lui a coûté sa victoire en 2020.
L’Etat profond
Cet « Etat profond » a plusieurs facettes : non seulement les Américains les plus riches (Kamala Harris a bénéficié pour sa campagne de deux fois plus d’argent que lui), mais en outre le lobby militaro-industriel, qui a tout intérêt à une situation de « guerre perpétuelle » (pour reprendre une lumineuse expression d’Edouard Husson), et aussi tout le secteur métapolitique (cinéma, « artistes », universités etc.) et encore les organisations corrompues comme le FBI, qui hier encore affirmait qu’une alerte à la bombe dans un bureau de vote était l’œuvre de… M. Poutine (ne rions pas, une foule française serait au moins aussi crédule qu’une foule américaine…) et dont le rôle joué lors du premier attentat contre Trump demeure suspect ; de surcroît les médias, en quasi-totalité aux mains des démocrates, qui ce matin, à la seule exception du tout petit (et très ancien) New York Post, rechignent tellement à admettre la victoire de Trump qu’ils parlent plutôt d’une « avance », quand tout au même moment la presse mondiale annonce sa victoire…
Un déni de réalité que l’on a constaté cette nuit. A 1h40, Edouard Husson, envoyé spécial du Courrier des stratèges, publiait cette carte donnant déjà 280 grands électeurs à Trump, quand la majorité est à 270 : l’élection était pliée.
Mais à 9h37, donc huit heures plus tard, l’Associated press n’en concédait encore que 267 :
Et encore à 10h10 (toujours heure française), le New York Times reprochait à Trump de célébrer sa victoire avant les résultats :
Voilà un élément parmi d’autres de ce qu’on appelle l’Etat profond. A son arrivée au pouvoir, M. Poutine, qui connaissait la capacité de nuisance des oligarques, avait fait des médias une cible prioritaire. M. Trump, naturellement, n’aura jamais autant de pouvoir, mais il devra cette fois-ci gratter derrière le paravent des institutions pour en décoller une sorte de « gouvernement de l’ombre » piloté depuis quatre ans par Obama et des caciques de l’époque Clinton. Ce ne sera pas une mince affaire, mais c’est encore possible.
La Crise sociale
Plus difficile sera de guérir les plaies sociales de l’Amérique, dans nous parlions dans notre article précédent. Un Américain sur deux n’a pas de quoi s’offrir une assurance-santé ; il dispose de moins de 500 dollars d’épargne ; 60% ont moins de 1.000 dollars d’épargne. 45% sont obèses, et la drogue provoque chaque année 100.000 morts, quand le Viêt-Nam, en dix ans de guerre, en a provoqué 58.000. Chaque année… Sans doute la politique économique de Trump pourrait-elle se révéler aussi performante que sous son premier mandat entre 2016 et 2020, mais il est évident que des millions d’Américains ne sont même plus capables d’en profiter, tant ils sont tombés dans une fosse de misère dont on ne ressort plus.
La guerre en Ukraine
Avec Trump, le monde peut espérer que l’empire américain renonce à sa volonté d’expansion infinie, qui a provoqué en 2022 l’intervention de la Russie dans l’interminable guerre du Donbass qui durait depuis 2014, apparemment à cause de fourberies dont la France et l’Allemagne se sont vantées par la suite, mais toujours dans une logique impériale américaine. Maintenant, que faire de cet Etat en partie artificiel dont les frontières sont en plusieurs endroits abusives ? Il est évident que la Russie ne renoncera pas au Donbass libéré par ses armes. Que doit-on faire de Kharkov ? Trump pourrait-il au moins négocier le maintien d’Odessa dans l’orbite ukrainienne ? Il est probable que M. Poutine acceptera de négocier, à condition que les discussions reposent sur des bases solides, incluant un renoncement de l’Ukraine à entrer dans l’Otan.
La guerre israélo-palestinienne
Beaucoup plus difficile sera le dossier palestinien : les Etats-Unis sont engagés depuis toujours dans le projet sioniste ayant abouti à la création en Palestine d’un Etat confessionnel juif, dont la survie dépend exclusivement du soutien américain. Il n’est pas certain que l’Amérique comprenne de sitôt que ce conflit est sans issue, tant que l’on s’accrochera à une solution que l’on croit mesurée mais qui n’est pas viable, celle de « deux Etats » dont les configurations géo-stratégiques seraient aberrantes. Tant que les illusions perdureront, cette guerre durera des décennies encore, sans trouver l’issue souhaitée par chaque camp. Autrement dit, une solution à la sud-africaine, un seul Etat pour deux peuples, serait la seule praticable, malgré tous ses inconvénients… M. Trump avait réussi un coup de maître en faisant signer aux Juifs et aux Arabes ses « Accords d’Abraham », mais à condition que la question palestinienne soit passée par profits et pertes. Or, elle a ré-émergé depuis un an, et à la surprise générale, la nouvelle guerre dure toujours, alors que les précédentes avaient été courtes (notamment la guerre des Six jours en 1967, mais aussi celle du Kippour – deux semaines – en 1973). Voilà un retour à la réalité qui affecte les accords d’Abraham : il va donc falloir à M. Trump beaucoup d’imagination pour en sortir.
Les menaces sur Taïwan
Pour le moment, la Chine n’envisage pas de récupérer Taïwan, qui évidemment lui appartient par droit historique ; ou alors il aurait fallu qu l’on ne reconnût point – mais contre l’évidence – la République de Chine avec son régime communiste (dont il ne reste à vrai dire plus grand’chose, sinon la dictature). Pékin attend que sonne son heure, mais dans l’intervalle, M. Trump pourra mener une guerre commerciale pour rétablir l’équilibre dans son propre pays.
Cependant, si l’Amérique abandonne ses prétentions sur l’Ukraine, la Chine pourrait interpréter ce recul comme un signe de faiblesse. Voilà le risque d’une politique extérieure hasardeuse, et encore un dossier chaud qui attend le nouveau président.
En tout état de cause, ma misère est trop grande en Amérique pour qu’elle continue de gaspiller des milliards de dollars à l’extérieur : cela, M. Trump l’a toujours dit. Attendons la suite.
Le Courrier des Stratèges
Pensez par vous-même
En 2020, on a dénombré 155 millions de votants.
Nous en sommes aujourd’hui à 139, alors que le dépouillement est presque terminé.
De quoi accréditer la fraude par bulletins surnuméraires en 2020 qui explique l’échec de Trump.
En 2016, il y avait eu moins de 137 millions de votants.