En France surtout, le débat entourant aujourd’hui le catholicisme est avant tout le fait d’intellectuels sans culture théologique en compétition pour les faveurs d’un lectorat sans pratique religieuse. La nouveauté des 50 dernières années étant, en la matière, la suivante : désormais, ce constat s’applique aussi bien aux « défenseurs de la tradition » (à la droite) qu’aux « anticléricaux » historiques (à la gauche). Il se trouve en effet que les anticléricaux d’aujourd’hui sont des gens de droite, sourds au prêche universaliste et millénariste de la nouvelle église cathodique : église des médias et de l’université post-mai 68, que le catholicisme institutionnel ne songe même plus à combattre, trop occupé à courir derrière elle.
Dans ce contexte, les français d’ascendance catholique qui se bercent encore de l’illusion que le christianisme occidental serait « de droite » ont naturellement tendance à répudier « l’église visible » (celle du jésuite tiers-mondiste Bergoglio), qui aurait trahi « l’église légitime ».
De « mon royaume n’est pas de ce monde » (Jésus de Nazareth) à « la vaccination est un acte d’amour » (Bergoglio)
Or le pape qui (situation historique unique en son genre) vient de mourir en tant que pape retraité, du fait, justement, du passé « de droite » que lui reproche la gauche, semblait (mais surtout aux ignorants) se prêter à l’incarnation de cette église légitime dont il faudrait pleurer le naufrage. De ce point de vue, les précisions sur Ratzinger que nous livre le philosophe et bon théologien Jean-Luc Marion me semblent des plus utiles. Aussi bien pour le rarissime catholique encore religieux qui cherche vraiment Dieu, plutôt que telle ou telle légitimation néothomiste de ses préjugés mondains, que pour la pensée rationnelle et historique qui soupçonnera plutôt Bergoglio d’être le représentant légitime de ce christianisme occidental qui (Marcel Gauchet est là pour nous le rappeler) a engendré la modernité nihiliste. On peut en effet se demander dans quelle mesure ce « christianisme de la révélation » dont nous parle, au contraire, Marion à propos de Ratzinger est encore occidental – et, donc, catholique.