Par Isabelle HOCK- La relation entre la France et l’Algérie connaît une crise sans précédent, alimentée par des décisions politiques qui ont rapproché la France du Maroc. En reconnaissant la souveraineté du Maroc sur le Sahara occidental, le président Emmanuel Macron a suscité une forte opposition de la part de l’Algérie, pour qui ce territoire doit faire l’objet d’un référendum d’autodétermination. Cet alignement a été perçu comme une trahison, poussant Alger à rappeler son ambassadeur et à suspendre toute visite officielle en France, y compris celle du président algérien, Abdelmadjid TEBOUNE. Les relations diplomatiques sont réduites au minimum, les canaux de communication quasi fermés, et même les tentatives de réconciliation mémorielle sont temporairement abandonnées. La reconnaissance par Macron de l’assassinat du héros algérien Larbi Ben M’hidi, bien qu’un geste symbolique, a été accueillie sans enthousiasme par Alger.
Pour remercier la France, l'Algérie décide de bloquer toutes les importations françaises et les exportations vers la France. Nous sommes décidément aveugles. pic.twitter.com/WgUbZzcwew
— Xavier Driencourt (@XMDriencourt) November 6, 2024
Note que l’ex-ambassadeur de France Xavier DRIENCOURT a relayé sur X. Face à la montée des tensions, une rumeur a circulé affirmant que l’Algérie suspendrait ses relations commerciales avec la France, interdisant aux banques de traiter les importations et exportations en provenance ou à destination de la France.
Menace de suspension des relations commerciales : rumeur ou réalité ?
Bien que cela ne soit pas officiellement confirmé par Alger, des refus de transactions bancaires avec des entreprises françaises ont été observés. Cette mesure semble être une réponse directe à la visite de Macron au Maroc et pourrait porter un coup dur aux échanges économiques entre les deux pays, estimés à environ 12 milliards d’euros annuels. Ce blocage potentiel inquiète les milieux d’affaires en France et en Algérie, car les deux économies sont étroitement imbriquées, notamment dans les secteurs de l’énergie, de l’automobile, et de l’agroalimentaire.
Toutefois, jeudi 7 novembre dans l’après-midi, l’agence de presse officielle APS publiait « un démenti catégorique » de la part du service communication du Premier ministre algérien, évoquant « des informations erronées et totalement infondées ». Le communiqué dénonce :
« les allégations mensongères colportées par l’ancien ambassadeur de France à Alger, dans son délire haineux et coutumier à l’égard de l’Algérie, au sujet de prétendues mesures restrictives au commerce ».
Réactions et conséquences potentielles
Le gouvernement français a réagi prudemment à ces rumeurs de blocage commercial, indiquant qu’aucune notification officielle n’a été reçue. Cependant, cette tension diplomatique s’accompagne de spéculations sur d’éventuelles représailles de la part de la France, notamment en révisant les accords bilatéraux de 1968 sur l’immigration ou en imposant des restrictions en matière de visas. Des personnalités politiques françaises, notamment du courant de droite et d’extrême-droite, ont encouragé un durcissement de la politique envers l’Algérie, plaidant pour une redéfinition de la relation entre les deux pays, en faveur d’un rapprochement avec le Maroc.
Les enjeux économiques et diplomatiques
L’enjeu pour l’Algérie réside dans sa dépendance partielle à l’égard des importations françaises de biens industriels, de pièces détachées et de services bancaires. Un gel des relations commerciales pourrait entraîner des pertes financières significatives pour les entreprises françaises opérant en Algérie, tout en perturbant l’approvisionnement de nombreuses entreprises algériennes. Les deux gouvernements pourraient donc être contraints de trouver des alternatives diplomatiques pour éviter une rupture totale, mais la montée en puissance de l’extrême droite en France rend cette issue incertaine.
Vers une rupture inévitable ?
La crise entre la France et l’Algérie illustre un changement de paradigme dans la politique étrangère française vis-à-vis du Maghreb, marqué par une préférence pour le Maroc, au détriment d’une relation historiquement complexe avec l’Algérie. Si la situation reste inchangée, les deux pays risquent de plonger dans une rupture quasi-totale de leurs liens économiques et diplomatiques, affectant non seulement leurs économies, mais aussi leurs communautés respectives.
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