Elon Musk au DOGE : les risques de conflits d’intérêts avec le gouvernement fédéral

Elon Musk au DOGE : les risques de conflits d’intérêts avec le gouvernement fédéral


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L’industriel libertarien deviendra le « grand tailleur des dépenses » avec le Department of Government Efficiency ou  DOGE, tout en étant un proche conseiller de Trump. Sa position inédite soulève la question de possible conflit d’intérêt. Ses recommandations en tant que dirigeant de la commission ne devraient être biaisées par aucun intérêt particulier selon la loi sur le comité consultatif. Mais, cela risque de se produire vu qu’Elon Musk est aussi à la tête de nombreuses entreprises qui font l’objet d’enquêtes. Il possède donc plusieurs conflits d’intérêts avec le gouvernement fédéral.

Tesla, l’étoile montante de l’automobile face aux régulateurs

Tesla, l’entreprise de véhicules électriques d’Elon Musk, vaut aujourd’hui 1,25 milliard de dollars, surpassant la valeur combinée des constructeurs automobiles américains traditionnels. Tesla pourrait mettre ses concurrents en faillite en s’emparant de leurs parts de marché et en échappant à différentes dépenses comme les coûts de main-d’œuvre et de retraite des anciens constructeurs automobiles.

Pour le moment, ce ne sont que des hypothèses. Mais le DOGE aurait prévu de modifier les règlementations concernant la subvention et l’imposition dans le secteur de la construction de véhicules électriques.

Par ailleurs, la National Highway Traffic Safety Administration (NHTSA) examine actuellement le système de pilotage automatique de Tesla. Un rapport de 2021 a attribué 13 accidents mortels à ce système, critiquant une conception qui ne prévoit pas d’abus prévisible par les utilisateurs. Parallèlement, Tesla fait face à des accusations d’entrave à la syndicalisation et de violations des droits des travailleurs, en vertu de la loi fédérale, les travailleurs en grève ne peuvent pas être licenciés. Musk a parlé de licencier des travailleurs en grève dans un billet sur X.  Ces conflits pourraient s’intensifier avec les enquêtes en cours du Conseil national des relations du travail (NLRB). Faisant l’objet de nombreuses poursuites judiciaires, selon certaines hypothèses, Tesla pourrait échapper à la justice.

SpaceX : entre conquête spatiale et réglementations environnementales

Avec une valeur boursière d’environ 350 milliards de dollars, SpaceX joue un rôle clé dans la défense et l’exploration spatiale américaine. Depuis sa création, l’entreprise a obtenu plus de 15 milliards de dollars en contrats gouvernementaux. Cependant, SpaceX est sous le feu des critiques pour des impacts environnementaux liés à ses sites de lancement. La Federal Aviation Administration (FAA) et l’Agence de protection de l’environnement (EPA) enquêtent sur des accusations de pollution.

Le NLRB (National Labor Relations Board) a aussi accusé Space X d’avoir licencié ses employés de manière illégale. En guise de riposte, Elon Musk a contesté la constitutionnalité de l’agence. Si le DOGE demande au président de réduire les effectifs du NLRB, cela va entrainer le licenciement de plusieurs juges, ce qui permettra à Space X d’accéder à des privilèges sur le plan commercial et juridique.

Musk pourrait influencer les décisions du Federal Aviation Administration (FAA) en menaçant de couper les budgets de l’agence et ceux de la Nasa. Pour rappel, la FAA a appliqué des mesures règlementaires à l’encontre de SpaceX pour des raisons environnementales.

SpaceX fait également face à des problèmes liés aux droits des travailleurs. L’entreprise est accusée d’avoir licencié des employés qui critiquaient publiquement Musk, incitant le NLRB à intervenir. La réponse de SpaceX a été de dire à la FAA de plutôt se concentrer sur les problèmes de Boeing.

X, l’ outil stratégique de Musk

Elon Musk est également dans le collimateur de la Securities and Exchange Commission (SEC) depuis le rachat de Twitter. L’organisme fédéral américain de réglementation et de contrôle des marchés financiers a sanctionné le patron de X (ex Twitter) pour avoir publié sur la plateforme X, son intention de privatiser Tesla en 2018. Cela en effet fait grimper la valeur de l’action du constructeur de véhicules électriques. La SEC a déclaré que cette manœuvre de Musk constitue une violation de la loi sur les valeurs mobilières.

Le milliardaire a déjà payé une amende de 20 millions de dollars. Mais il risque une accusation criminelle, car la SEC a continué de mener ses enquêtes. Si Musk, en tant que coprésident du DOGE, se met aussi à appliquer des coupes budgétaires au sein de la SEC, il pourrait éviter la prison, car cela risque d’influencer la décision de l’agence.

Notons que X prévoit aussi de vendre les données de ses utilisateurs à des tiers. Ce projet risque de ne pas aboutir grâce aux interventions du Bureau de protection financière des consommateurs (CFPB). Musk milite activement pour la suppression de cet organisme qu’il juge inutile.

xAI, concurrente directe de Google et Microsoft

En septembre 2022, le bureau de la politique scientifique et technologique de la Maison Blanche a publié un projet de « Déclaration des droits de l’iA » qui demande la mise en place d’une loi garantissant que l’IA n’affecte pas la vie privée et les droits civiques des utilisateurs d’Internet. Il reste à savoir si cette requête sera validée avec la présence de Musk dans l’administration Trump.

Le milliardaire pourrait aussi tirer profit de son nouveau rôle de codirigeant du DOGE dans le conflit entre xAI et l’Agence de protection de l’environnement (EPA). Il concerne le projet de xAI construction d’un supercalculateur à Memphis, dans le Tennessee. Si le DOGE recommande la réduction des effectifs de l’EPA ou à éliminer les normes de pollution, Elon Musk finira par concrétiser son projet. A noter que les données collectées sur X servent à former les modèles d’intelligence artificielle de xAI, concurrente directe de Microsoft et Google.

Neuralink, qui vise à développer des implants cérébraux pour contrôler des appareils électroniques, a récemment reçu l’autorisation de mener des expériences humaines. Mais la Food and Drug Administration (FDA) et le département de l’agriculture ont critiqué Neuralink sur la manière, elle a mené ses expériences sur les animaux. La FDA a même décidé de mener une enquête. La présence de Musk au sein du DOGE pourrait changer la donne

Enfin, le fait que Musk a baptisé le « Département de l’efficacité gouvernementale » DOGE pourrait faire grimper la valeur de sa cryptomonnaie préférée, Dogecoin. Sa présence à la tête de ce comité consultatif pourrait aussi contrecarrer les projets des différentes agences de règlementer les cryptomonnaies. La SEC et d’autres agences gouvernementales examinent les risques liés à la fraude, au blanchiment d’argent et à l’évasion fiscale dans l’industrie. La suppression de ces organismes pourrait favoriser les ambitions de Musk dans le domaine.


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