Nucléaire iranien : Paris menace Téhéran avec le « snapback »

Nucléaire iranien : Paris menace Téhéran avec le « snapback »


Partager cet article

Face à l’impasse des négociations sur le nucléaire iranien, et dans un contexte de guerre ouverte entre Israël et l’Iran, la France menace de réactiver le « snapback », un outil juridique issu de l’accord de Vienne de 2015. Ce mécanisme permet de rétablir toutes les sanctions internationales contre l’Iran sans que ni la Chine, ni la Russie ne puissent opposer leur veto.

L’Iran refuse de reprendre les négociations nucléaires. Paris a menacé de recourir à un levier diplomatique rare,le  » snapback », une arme qui pourrait pousser Téhéran à revenir sur sa décision.

Le « snapback », c’est quoi ?

Alors que l’Iran continue à refuser les appels aux négociations sur son programme nucléaire, le ministre français des Affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a déclaré samedi sur LCI que la France et ses partenaires européens disposent d’un outil de pression efficace pour obliger Téhéran de changer de position. Il a menacé de recourir au « snapback ».

Il s’agit d’un mécanisme établi dans l’accord de Vienne sur le nucléaire iranien. Le traité a été signé par l’Iran et les cinq membres permanents du Conseils de sécurité de l’ONU, dont les Etats-Unis, la Chine, la Russie, la France et le Royaume-Uni, ainsi que l’Allemagne en 2015.

Cet accord annonce la levée des sanctions contre l’Iran si le pays s’engage à ne pas fabriquer des armes nucléaires. Mais en cas de « violation significative de l’accord », un des signataires de l’acte peut réimposer automatiquement toutes les sanctions levées sans qu’aucun membre du Conseil ne puisse intervenir.

« Si l’Iran refuse de négocier un encadrement strict et durable de son programme nucléaire, la France, avec ses partenaires, peut très simplement rétablir l’embargo sur les armes, les équipements nucléaires, les banques et les assurances. Une simple lettre suffit »

, a déclaré Jean-Noël Barrot.

« Nous jouerons un rôle central dans ces négociations »,

a-t-il ajouté.

Cet accord de Vienne, déjà fragilisé par le retrait des Etats-Unis de Donald Trump, risque d’être secoué davantage face à la divergence d’opinions des signataires concernant le conflit entre Israël et l’Iran.

Une menace juridique politiquement risquée

Sur le plan juridique, l’activation du « snapback » ne fait aucun doute : le mécanisme reste valide tant que la résolution 2231 est en vigueur et que la France est signataire. Mais sur le plan politique, la donne est plus complexe :

  • La Chine et la Russie dénonceraient immédiatement cette décision, qu’ils percevraient comme un alignement sur les positions israélo-occidentales.
  • L’Iran, de son côté, pourrait réagir en se retirant définitivement du TNP (Traité de non-prolifération nucléaire) et accélérer ouvertement la fabrication d’une bombe.
  • Les pays non-alignés, sensibles aux tensions Nord-Sud, pourraient voir cette action comme un abus de pouvoir des puissances occidentales.

Si la France et ses alliés enclenchent ce levier, cela marquerait probablement la fin de toute tentative diplomatique avec Téhéran dans le cadre actuel.

En agitant la menace du snapback, la France cherche à réaffirmer son rôle central dans le dossier nucléaire iranien, notamment en l’absence de leadership américain. Mais cet outil, s’il est activé, risque d’avoir des conséquences bien plus larges que le simple retour des sanctions : il pourrait définitivement faire basculer l’Iran dans une logique de militarisation nucléaire.


Partager cet article
Commentaires

S'abonner au Courrier des Stratèges

Abonnez-vous gratuitement à la newsletter pour ne rien manquer de l'actualité.

Abonnement en cours...
You've been subscribed!
Quelque chose s'est mal passé
9/11 : quand un prof de Berkeley contestait le rôle de Cheney, par Thibault de Varenne

9/11 : quand un prof de Berkeley contestait le rôle de Cheney, par Thibault de Varenne

Elise Rochefort a évoqué pour nous les controverses officielles sur l'emploi du temps de Dick Cheney le 11 septembre 2001. Peter Dale Scott, diplomate canadien devenu professeur à l'Université Berkeley, en Californie, a prétendu documenter le contexte de cette affaire explosive. Et voici les thèses qu'il a défendues, accompagnées de leurs critiques, bien entendu... Peter Dale Scott (né en 1929) représente une figure intellectuelle singulière et complexe dans le paysage académique nord-améri


Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Que faisait feu Dick Cheney le 11 septembre 2001 ? par Elise Rochefort

Que faisait feu Dick Cheney le 11 septembre 2001 ? par Elise Rochefort

Le 11 septembre 2001, le vice-Président de George W. Bush, Dick Cheney, décédé cette semaine, fait face seul ou presque au traumatisme du polyterrorisme qui frappe les USA. Mais qu'a-t-il fait au juste ? Près de vingt-cinq plus tard, voici le point des zones d'ombre et de controverse. L'analyse du rôle joué par le vice-président Richard "Dick" Cheney le 11 septembre 2001 est essentielle pour comprendre la réponse du gouvernement américain à la crise et l'évolution ultérieure de l'autorité e


Rédaction

Rédaction

Amis de la liberté : cessez d'être les idiots utiles du système, faites sécession !

Amis de la liberté : cessez d'être les idiots utiles du système, faites sécession !

La démocratie parlementaire se meurt dans le jeu des partis. Mais sommes-nous impuissants face à ce naufrage ? Et sommes-nous vraiment condamnés à attendre les prochaines élections ? Soyons lucides. La France n’est pas une démocratie libérale ; c’est un Moloch administratif, une machine à broyer l’individu sous le poids de la norme, de la taxe et de la morale collective. Depuis des décennies, les libertariens français s’épuisent dans un combat politique qui ressemble à une farce tragique. I


Éric Verhaeghe

Éric Verhaeghe

Doctolib: le “macronisme sanitaire”condamné pour abus de position dominante

Doctolib: le “macronisme sanitaire”condamné pour abus de position dominante

Sanctionné pour abus de position dominante, Doctolib voit enfin sa toute-puissance mise à nu. Derrière la success story encensée par Macron pendant la crise sanitaire, se cachait une machine à enfermer les praticiens, les patients et la concurrence. L'Autorité de la concurrence vient d'infliger une amende salée à Doctolib, le géant de la prise de rendez-vous médical. Cette sanction pour abus de position dominante révèle des pratiques d'exclusivité et d'acquisitions prédatrices choquantes. Plus


Rédaction

Rédaction