La privatisation d’Aéroports de Paris est prévue par la loi PACTE, en cours de discussion parlementaire. Mais… dès le mois de décembre 2017, l’Agence des Participations de l’État avait mandaté la Bank of America pour l’épauler dans ce dossier. Bernard Mourad, proche d’Emmanuel Macron, a depuis lors pris la tête de la banque d’affaires de la succursale parisienne… Le mélange des genres fait grincer les dents.
Lorsque l’Agence des Participations de l’État a mandaté Bank of America pour l’épauler dans la privatisation des Aéroports de Paris, Bernard Mourad n’en était pas encore salarié. L’affaire fut décidée en décembre 2017, et Bernard Mourad n’est arrivé que quelques mois plus tard à la tête de la banque d’affaires à Paris.
Bank of America et son mandatement par l’État avant même la loi Pacte
Il n’est pas innocent de noter que le mandat donné à Bank of America date de décembre 2017. À l’époque, il était précisé dans le mandat:
“Il s’agit principalement de déterminer si ADP doit rester un opérateur aéroportuaire propriétaire de ses terrains et détenteur d’une concession à durée indéfinie pour les exploiter, ou s’il faut transformer son modèle pour le calquer sur celui des concessions à durée déterminée (comme pour les autoroutes, par exemple), en séparant le foncier de l’exploitation.”
Dans tous les cas, la privatisation était actée et organisée avant même le vote de la loi. Le choix d’une banque américaine pour piloter cette opération ne manque pas de piquant, surtout que, dans le même temps, la banque annonçait le transfert de ses activités londoniennes à Paris.
Bernard Mourad et la privatisation d’ADP
Y a-t-il eu à ce moment un échange de bons procédés entre la décision de venir à Paris et l’attribution d’un marché juteux? Rien ne permet de le dire aujourd’hui. Mais on notera cette étrange confidence faite par Bernard Mourad à Vanity Fair:
Le géant Bank of America-Merrill Lynch vient de le nommer à la direction de son siège parisien, bientôt renforcé par deux cents traders et commerciaux, rapatriés de la City en raison du Brexit. Ses nouveaux bureaux, 10 000 m2 somptueux rue de La Boétie, à deux pas des Champs-Élysées, ont été négociés entre le dirigeant de la banque américaine et le ministre de l’économie, Bruno Le Maire. De gros dossiers l’attendent, à commencer par la privatisation d’ADP, anciennement Aéroports de Paris, opération pour laquelle Bank of America conseille l’État français ; les défis sont nombreux. « Oui, c’est challenging », lâche-t-il, dans son langage managérial, en sirotant, après la caféine, un jus de citron. Il n’a pas l’air inquiet, ni spécialement excité de retrouver ses chaussons de banquier d’affaires.
Toutes ces coïncidences et ces rapprochements sont troublants! En tout cas, Bank of America peut se féliciter de compter parmi ses dirigeants parisiens un proche du Président de la République qui a directement négocié ses locaux (possédés par BNP) avec le ministre de l’Économie. Ce genre de petit coup de pouce, ça aide….
Mourad et son soutien à Macron, en passant par Drahi
Particularité de ce parcours brillant, Bernard Mourad est un ami d’Emmanuel Macron. Il avait quitté Altice et Patrick Drahi à l’automne 2016 pour aider le jeune candidat à remporter l’Élysée.
L’amitié entre les deux hommes date de 2008. Mourad travaillait alors à la banque Morgan Stanley. Voici comment Vanity Fair la raconte:
Ce printemps 2008, il fait passer un entretien d’embauche à un jeune énarque nommé Macron, qui se présente avec son sourire du bonheur et son blazer mal coupé. « On sympathise tout de suite, se souvient Mourad. Je lui dis qu’il va perdre son temps dans une banque américaine où il démarrerait en junior. Je lui conseille d’aller plutôt quelques mètres plus loin, chez Rothschild, où s’épanouissent nombre d’anciens de l’inspection des finances. » Quelques semaines plus tard, Mourad reçoit un SMS de remerciement : Macron est entré chez Rothschild.
Ces circonstances intéressantes jettent un nouvel éclairage sur les relations postérieures entre Emmanuel Macron et Patrick Drahi…
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