L’indépendance des banques centrales est une pierre angulaire du capitalisme contemporain. Cette particularité n’est pas sans poser problème, puisque les banquiers centraux, s’ils sont soumis à un mandat par les pouvoirs publics, peuvent s’affranchir de toute commande venue de ceux-ci. En Europe, cette indépendance est d’autant plus lourde à porter que le mandat de la BCE prévoit seulement la fonction de lutte contre l’inflation, sans se préoccuper de la croissance (ce qui n’est pas le cas de la FED). L’arrivée possible du faucon allemand Jens Weidmann à Francfort dans les prochains mois laisse d’ailleurs craindre le pire. Mais partout ailleurs dans le monde, la réduction de la croissance aiguise les rancoeurs contre ces banquiers centraux qui n’en font qu’à leur tête.
On lira avec intérêt un précieux éditorial des Échos consacré à l’indépendance des banques centrales, qui devient un sujet majeur dans le capitalisme mondial. Partout les ratés de la croissance poussent les gouvernements à espérer un mouvement rotatif intense de la planche à billets pour relancer l’activité. Le bon temps de l’inflation!
Il est utile de noter que de nombreux pays contestent aujourd’hui l’indépendance de leur banque centrale.
Recep Tayyip Erdoğan s’est arrogé le droit de nommer lui-même le président de la Banque nationale turque. Et en Inde, Narendra Modi a usé plusieurs gouverneurs avant d’en trouver un qui accepte de mener une politique monétaire satisfaisante à ses yeux.
En Europe, la situation est en apparence plus tranquille. Mark Carney, gouverneur de la Banque d’Angleterre est critiqué par les partisans du Brexit, qui l’accusent de présenter les conséquences de la sortie du Royaume-Uni sous un jour bien trop sombre. La BCE jouit d’un statut particulier, puisqu’elle n’est rattachée à aucun Etat. Mais les populistes s’attaquent désormais à certaines banques centrales nationales, comme en Italie .
En outre, certains observateurs s’inquiètent d’une montée en puissance des profils politiques au sein de l’Institution de Francfort. C’est le cas de l’Espagnol Luis de Guindos, ancien ministre devenu vice-président de la banque centrale. Tout comme le Slovaque Peter Kažimír, qui vient de passer du gouvernement à la tête de la Narodna banka, et qui siégera à ce titre au Conseil des gouverneurs de la BCE.
Quelque chose est en train de changer dans le capitalisme mondial. L’arrivée d’un Allemand à la tête de la BCE pourrait apparaître comme une réaction en contrepoint.