Davet et Lhomme sont bien connus pour leurs investigations explosives et le sérieux avec lequel ils travaillent. Ils ont mené une intéressante enquête sur les coulisses de la nomination d’Emmanuel Macron au secrétariat général de l’Élysée, en 2012, par François Hollande. Leur récit ne manque pas d’intérêt parce qu’il montre de façon éclatante comment action publique et intérêts du CAC 40 sont étroitement liés en France. Ce qu’on appelle couramment le capitalisme de connivence, qui explique pourquoi le mot “libéralisme” n’a pas cours dans ce pays.
On notera, dans le Monde, cette belle enquête sur l’effondrement du Parti Socialiste, et sur l’arrivée d’Emmanuel Macron dans les coulisses du pouvoir en 2012. Nous reproduisons ici le récit des deux journalistes, qui étayent les informations déjà connues sur les réseaux macroniens:
Janvier 2012. François Rebsamen, proche ami et futur ministre de François Hollande, est convié à un dîner secret chez Bernard Attali. Ex-patron du GAN et d’Air France, le frère de Jacques raffole de ce genre d’agapes où l’on fait et défait les carrières, entre chefs d’entreprise d’élite. A défaut d’être présent physiquement ce soir-là, Macron est au menu de la discussion. Ont été conviés Gérard Mestrallet (Suez), Jean-Pierre Clamadieu (Rhodia), Jean-Pierre Rodier (Pechiney), Serge Weinberg (Sanofi) et quelques autres… « Un pont discret entre patrons et responsables-amis politiques », nous confirme Bernard Attali. En clair, des puissances industrielles de gauche, aux réseaux XXL, au service d’un prometteur politicien en herbe. Et un bel investissement sur l’avenir.
Au retour, Rebsamen transmet une consigne claire à Hollande. Il raconte : « Le message qu’ils me font passer, c’est : “Si Hollande est élu, dis-lui qu’on n’a qu’une demande à formuler : que Macron soit secrétaire général à l’économie.” Je vois François Hollande, il me dit : “C’est le seul message qu’ils t’ont fait passer ?” Je lui réponds : “Oui, le seul”… » La doléance est sans ambiguïté : le jeune Macron doit obtenir un poste d’influence. Lui-même est d’ailleurs du genre exigeant. Etre simple conseiller à l’économie à l’Elysée ? Il vaut mieux que ça. Il se verrait bien secrétaire général adjoint. « Si Hollande ne veut pas, je n’y vais pas », annonce-t-il à Minc.