Un lecteur m'écrivait récemment qu'il envisageait d'investir dans l'immobilier en Thaïlande après avoir racheté son contrat d'assurance-vie placé en France. La question est intéressante, parce qu'elle illustre une fois de plus l'angoisse des épargnants français qui voient le mur fiscal se rapprocher dangereusement au fur et à mesure des plans à milliards que le gouvernement dégaine pour acheter la paix sociale. Ce genre d'expatriation soulève évidemment bien des questions que nous adressons aujourd'hui.
Investir en Thaïlande n’est évidemment pas une décision simple, mais on comprend forcément ce que les épargnants français ont en tête : l’enfer fiscal français devrait, dans les années à venir, se transformer en torche incandescente. L’Asie pourrait donc être un bon compromis.
Il faut toutefois avoir en tête quelques idées simples pour ne pas se faire duper dans cette opération.
La Thaïlande protège-t-elle le droit des étrangers ?
Première question à se poser : la Thaïlande est-elle un Etat de droit qui protège les investisseurs en cas de différend local ? Cette question paraît superflue tant que tout va bien. C’est quand les problèmes surviennent que les choses se compliquent.
Le tableau ci-dessous, emprunté à notre bien-aimé Free Human Index, permet de faire le point sur la situation :
Comme on le voit, les scores de la Thaïlande en matière de liberté de l’entreprise ne sont pas particulièrement brillants. On retiendra en particulier la toute-puissance de l’armée, qui interfère dans le cours des affaires judiciaires, la faible indépendance de la justice et les restrictions apportées à la libre circulation des capitaux.
Ajoutons que la corruption existe aussi dans la police. Il faut bien se souvenir de ces données mal évaluées en France, car elles suffisent à refroidir l’appétit des investisseurs, d’ordinaire.
La Thaïlande, 67è pays pour le droit de propriété
On jettera aussi un oeil sur les classements de la Banque Mondiale en matière de liberté d’entreprise pour mesurer les difficultés auxquels un investisseur peut s’exposer en Thaïlande. Si la Thaïlande est plutôt bien classée pour tout ce qui touche à la création d’entreprise, en revanche, sa “compétitivité patrimoniale est plutôt faible”.
Elle n’est que le 67è pays pour le droit de propriété. Autrement dit, être propriétaire étranger ou non-résident en Thaïlande est susceptible de vous exposer à des contestations complexes dès lors qu’un contentieux apparaît. Et le droit national n’apparaît comme particulièrement protecteur pour les victimes d’abus.
En revanche, la Banque Mondiale souligne que le droit des actionnaires minoritaires y est protecteur.
La fin du tourisme de masse condamne l’investissement hôtelier
Ces précautions étant prises, on ajoutera que le tourisme représente 12% du PIB thaïlandais. En période de pandémies et de troubles internationaux en tous genres, c’est quand même un sacré problème.
On peut en déduire que si l’investissement immobilier proposé en Thaïlande a un rapport avec le secteur touristique, il n’y aurait pas beaucoup de sens à racheter son contrat français d’assurance-vie pour faire un placement aussi spéculatif et risqué à l’autre bout du monde. Surtout si vous ne maîtrisez pas la langue du pays et que ses institutions vous sont inconnues.
Des perspectives de croissance qui ne sont pas à négliger
Malgré toutes ces mises en garde, l’économie thaïlandaise n’est pas dépourvue d’intérêt. Son PIB a reculé de près de 8% en 2020, mais devrait retrouver une croissance modérée de 4% en 2021. Ces prévisions de la Banque Asiatique de Développement indiquent que la Thaïlande a encore du potentiel devant elle, même si elle n’est pas le pays le plus dynamique en Asie.
Fait rare : la dette publique thaïlandaise représente moins de 60% du PIB, et, avant la pandémie, le déficit budgétaire était inférieur aux 3% de Maastricht. Autrement dit, la Thaïlande mériterait plus sa place dans la zone euro que la France…
Tous ces éléments laissent donc penser que l’intérêt de la Thaïlande n’est pas nul. En revanche, s’il s’agit d’un investissement immobilier offshore, l’investisseur doit prendre le temps de bien choisir le bien qu’il finance. On évitera les biens touristiques et on sera attentif à la crédibilité du promoteur local.
Sur ce point, il faut redoubler de précautions dans la prise de garanties sur son sérieux.