Les experts exhortent Canberra à faire preuve de sincérité et de sagesse en prenant des mesures. A l’occasion de la première rencontre, en face à face depuis trois ans, entre de hauts responsables chinois et australiens, le Premier ministre chinois Li Keqiang a déclaré au Premier ministre australien, Anthony Albanese, que la Chine était prête à discuter et à travailler pour promouvoir des liens durables et sains. Cette déclaration fait suite à une série de signaux positifs que Canberra a envoyés ces derniers jours dans le but de réchauffer une relation devenue glaciale avec Pékin au cours des dernières années.
Cet article initialement publié en anglais sur Global Times n’engageas la ligne éditoriale Courrier.
A l’occasion du 50e anniversaire de l’établissement des relations diplomatiques entre la Chine et l’Australie, les deux hommes politiques ont déclaré que les récents échanges interactifs et fréquents entre les deux pays signalaient un tournant majeur pour sortir d’une relation marquée par un climat glacial. Cependant, pour le représentant de la Chine, l’Australie doit montrer sa sincérité et sa sagesse en trouvant un bon équilibre dans ses relations avec les États-Unis et dans celles avec la Chine.
Une reprise des relations qui étaient en froid depuis 2019 !
Lors d’un dîner de gala au Cambodge, Li et Albanese ont ouvert le premier dialogue entre les dirigeants des deux pays depuis 2019. Albanese a déclaré à Li que son pays était disposé à renforcer les échanges de haut niveau avec la Chine et à promouvoir conjointement un développement sain des relations bilatérales. Selon une déclaration faite dimanche à l’AFP après leur entretien, Anthony Albanese a indiqué qu’il avait eu « une excellente conversation avec le Premier ministre Li », ajoutant : « C’était très positif et constructif ». Dans ce prolongement pour apaiser les tensions avec la Chine, la ministre australienne des Affaires étrangères, Penny Wong, dans son premier grand discours politique, a blâmé devant SBS News le gouvernement de coalition précédent pour la rupture des relations avec la Chine, affirmant que le Parti travailliste « chercherait à coopérer là où nous le pouvons ».
Depuis son entrée en fonction, Penny Wong a rencontré à deux reprises le conseiller d’Etat chinois et ministre des Affaires étrangères Wang Yi pour rétablir le mécanisme de dialogue. Selon SBS News, Penny Wong a déclaré que « lors de ces réunions, j’ai exprimé franchement le point de vue de l’Australie sur une série de questions commerciales bilatérales, consulaires et de droits de l’homme, ainsi que sur la sécurité régionale et internationale ». Le 8 novembre, lors d’un appel téléphonique avec Penny Wong, Wang Yi a souligné que les deux parties avaient bien plus d’intérêts communs que de différences, tout en réitérant la position importante de l’autre en tant que partenaires stratégiques globaux.
Les fréquents échanges à haut niveau entre les deux parties ont donc entrainé un changement significatif par rapport à l’impasse dans laquelle se trouvaient les relations depuis 2019. « Cela marque une sortie du froid entre Pékin et Canberra, car les deux parties ont exprimé leur volonté d’améliorer les relations dans le dialogue », a déclaré lundi Chen Hong, président de l’Association chinoise des études australiennes.
Un tournant majeur est en cours mais peut butter sur la position des Etats-Unis dans la région
Arrivé à Bali pour le sommet des dirigeants du G20, Anthony Albanese, a annoncé lundi devant l’agence Reuters qu’il tiendrait mardi une réunion bilatérale avec le président chinois Xi Jinping. Lorsqu’on lui a demandé de confirmer cette rencontre, le porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères, Mao Ning, n’a apporté aucune précision à ce sujet, mais il a déclaré que l’amélioration des relations sino-australiennes était conforme aux intérêts fondamentaux des deux parties, aux attentes communes des deux peuples ainsi qu’à celles de la communauté internationale.
Pour nombre d’observateurs, il est manifeste qu’il y a un changement en cours et que l’on peut donc considérer qu’il se produit un tournant majeur dans les rapports entre les deux pays. Cependant, ces mêmes observateurs ont noté que, si la tendance à la dégradation des relations a été effectivement stoppée, la marge d’amélioration reste encore limitée.
Zhou Fangyin, chercheur à l’Institut des stratégies internationales du Guangdong, a fait valoir lundi au Global Times que l’Australie est un allié important des États-Unis et un membre clé de la « stratégie indo-pacifique » américaine. Cela constitue une contrainte structurelle de nature à rendre difficile pour l’Australie une amélioration significative de ses relations avec la Chine. Dans le même temps, force est de constater qu’il n’y a pas eu non plus de changement majeur dans l’opinion publique australienne envers la Chine.
Selon Chen, l’Australie continuera donc de suivre les orientations politiques des États-Unis. Cependant, le pays a besoin de sagesse pour gérer correctement ses relations avec les États-Unis et la Chine. « Prendre imprudemment et aveuglément parti pour Washington saperait non seulement les relations sino-australiennes, mais nuirait également à ses propres intérêts régionaux et mondiaux ».
Bloomberg a rapporté que le ministre australien du Commerce, Don Farrell, avait déclaré être disposé à discuter des « bretelles de sortie » avec la Chine, au lieu de forcer une décision de l’OMC sur les différends commerciaux actuels entre les deux pays. Cependant, le ministre a noté que, nonobstant ce qui se passe à l’OMC, les entreprises australiennes cherchaient à « minimiser l’exposition aux risques » en se diversifiant en dehors du marché chinois. Pour Chen Hong, « les remarques de Farrell sont en fait un euphémisme pour le « découplage » avec la Chine. Et en soi, l’on retombe dans une mentalité de guerre froide. Or, il n’y a aucune opportunité de remplacer l’énorme marché chinois, et il serait sage que l’Australie montre sa sincérité en allant dans la même direction que la Chine ».
La Chine reste un marché essentiel pour l’Australie
Lors de la 5e Exposition internationale d’importation de Chine (CIIE) qui vient de s’achever à Shanghai, les entreprises australiennes ont largement participé à la plus grande foire d’importation au monde, en signant de nouveaux accords. Le Global Times a appris qu’elles étaient parmi les participants les plus actives à la CIIE de cette année, avec 64 sociétés participantes, dans des secteurs allant des produits agricoles à l’exploitation minière.
Rappelons que la Chine est le premier marché d’exportation du minerai de fer australien, avec plus de 60 % de celui-ci destiné au marché chinois, ce qui fait de ce secteur l’épine dorsale de l’économie australienne. La Chine est également le principal marché pour d’autres produits australiens, allant du vin au bœuf et aux homards.
On comprend qu’il soit difficile d’équiliber des accords commerciaux entre un pays habité par 147h/km2 et un autre par 3h/km2, même si les surfaces territoriales sont du même ordre de grandeur 10-8 Gm2.