Ce revenu universel recommandé par Davos et réclamé par toute la gauche occidentale, beaucoup se l’imaginent comme une prolongation ad aeternam des belles heures de la pizza subventionnée devant Netflix, pendant qu’une peste noire imaginaire hantait les rues de 2020.
C’est parce qu’ils n’ont pas, comme moi, vécu sur le territoire de l’utopie précédente (nommée URSS), ou de ses états successeurs. Dans cette ancienne normalité encore rouge (pas encore verte), l’État vous garantissait non seulement un revenu, mais même un emploi, d’ailleurs obligatoire. Et comme le revenu en question, au marché noir (le seul qui fût à peu près approvisionné), permettait à peine de survivre, les citoyens soviétiques un tant soit peu ambitieux étaient fortement incités à assumer de front plusieurs emplois. C’est ainsi que la patrie du socialisme parvenait à plomber les caries creusées dans son marché du travail par la répression (immense population carcérale), l’alcoolisme, l’incompétence et l’émigration. D’où cette sociologie si typique de l’Europe de l’est, faite de musicologues-ramoneurs-chauffeurs de taxi et de cantatrices-coiffeuses-secrétaires trilingues.
« Les objectifs du plan seront atteints et dépassés ! »
Un siècle après la grande révolution d’Octobre, les planificateurs utopiques, après avoir officiellement cherché à éradiquer la grippe, le mauvais temps et la transphobie russe, retrouvent spontanément ces vieilles recettes du libéralisme de secours, c’est-à-dire du système B appelé à ralentir le naufrage de leur merveilleuse usine à gaz dirigiste. Ainsi, à défaut d’être revalorisés (c’est, leur dit F. Braun, « la mauvaise période » pour le demander), les professionnels de santé suffisamment « immunisés » pour avoir conservé leur emploi sont désormais invités à s’initier en outre, dans leurs heures « perdues », à la conduite de bus scolaires. Moyennant quoi, à terme, ils pourront sûrement espérer un rab de tickets (naturellement numériques) de chauffage – si utiles en période de réchauffement climatique !
C’est vrai que j’ai été ni plus ni moins “scotchée” par cette annonce d’une autorisation officielle pour les fonctionnaires (qui , bien sûr, sont tous des feignants) de conduire des bus scolaires sur leur temps libre. J’oscille entre m’étonner dun tel mépris pour les conducteurs de bus, mepris ouvertement affiché par des fonctionnaires qui se pensent eux supérieurement intelligents (ils sont “hauts fonctionnaires” sur le papier) et m’étonner de leur superbe incompétence et de leur insigne bêtise qui les conduits a avouer qu’ils ne sont même pas capables de trouver comment recruter de pauvres conducteurs de bus, tellement inférieurs à eux sur l’échelle du vivant? Ce doit être une idée de B. Lemaire, O. Dussopt ou A. Pannier-Runacher.
Bon, quand j’étais encore active, j’avais déjà bien dû participer au “recrutement de n’importe qui, n’importe comment pour pouvoir mettre des gens devant des élèves…” sur le mode “Eh, toi! Tu es sans emploi? Tu veux du boulot? Tu sais un peu d’anglais? Tu as un vague diplôme d’un pays étranger? Viens, l’Educnat a besoin de toi!” J’en aurais pleuré de voir ce qu’était devenu le métier que j’avais choisi et exercé longtemps avec enthousiasme, jusqu’à ne plus vouloir…Le plus cocasse si on veut, c’est que ces recrutés à la sauvette, allaient voir l’établissement et les élèves et…désertaient illico. La désertion est une possibilité non offerte aux recrutés par concours – ils doivent démissionner et ce n’est pas facile car on tente de les en dissuader, ou comprendre avant le concours que ce n’est pas la peine de persévérer et se tourner vers une occupation moins contraignante et payée pareil. Après on s’étonnera de la baisse du niveau des professeurs. Ce sera pareil pour les conducteurs de bus et le probable “faible respect” des horaires de passage…
Beau témoignage. La face sombre du revigorant papier de Modeste. Tout est question d’approche.
question d’angle plus exactement, qui dépend de son point d’observation.
Ce qui est bien, c’est qu’ils cachent de moins en moins leur volonté de rendre les gens mobiles et interchangeables dans un société liquide et désaffiliée.
Contrairement à l’Utopia de Thomas More (XVIe s) qui décrit un monde unifié sans propriété privée et sans monnaie tandis que les habitants sont obligés de déménager tous les dix ans afin de ne pas s’enraciner, les psychopathes au pouvoir ont les moyens de leur politique…
Quand en entend les éminences grises de Davos parler de mangeurs inutiles, il y a de quoi s’inquiéter.
Y aurait-il un lien avec la volonté macronienne de gommer les spécificités des hauts fonctionnaires? Avouez qu’un préfet qui ferait la promotion de la la politique française à Moscou, ça aiderait à gérer notre horde d’énarques. Il faut aller plus loin: si ledit préfet était capable de tenir un guichet de “France services” dans le 93, ça aurait de l’allure!