Hier, Emmanuel Macron a conclu son premier “round” de consultations en vue de former un gouvernement par une annonce dont on se régale par avance : il n’y aura pas de gouvernement NFP, pour éviter une censure immédiate, et donc pour préserver la “stabilité institutionnelle”. De la part d’un homme qui vient de dissoudre hasardeusement l’Assemblée Nationale, le prétexte fait sourire (“plus c’est gros, mieux ça passe !” disait Jacques Chirac). En réalité, et en parfait accord avec Jean-Luc Mélenchon, Macron cherche à “décrocher” les fruits socialistes de l’arbre NFP, comme nous l’affirmons depuis le début de l’été.
C’est une partie de poker menteur que nous évoquons depuis le début de l’été et que nous confirmions hier encore (voir notre vidéo de Chaos Global ci-dessous) : entre Emmanuel Macron et Jean-Luc Mélenchon, il existe au moins un accord tacite pour faire imploser le Front Populaire et laisser aux Insoumis le monopole de l’opposition au gouvernement jusqu’en 2027.
Face à cet objectif de long terme, se dresse un seul obstacle : Olivier Faure, qui bataille pied à pied pour déjouer la manoeuvre et conserver la cohésion du Nouveau Front Populaire. Faure a très bien compris que, livré seul à lui-même face à un gouvernement de coalition comportant des socialistes, Jean-Luc Mélenchon n’aurait aucune retenue pour minorer ces socialistes, pour les laminer, et pour imposer son hégémonie sans partage sur la gauche, après le regrettable épisode de la remontada par Glucksmann. Et à lui la victoire face à Marine Le Pen en 2027.
Pour Emmanuel Macron, cette configuration présente l’avantage de lui donner une majorité modérée jusqu’en 2027, et de briser l’élan de tous ceux qui s’imaginent lui succéder en 2027, d’Edouard Philippe à Gabriel Attal.
Les deux hommes jouent donc depuis plusieurs semaines maintenant à la barbichette pour décider les socialistes à “décrocher de la paroi”. Tantôt, c’est Mélenchon qui impose des conditions drastiques à toute participation de LFI au gouvernement, tantôt, c’est Macron qui hausse le ton. Ces atermoiements permettent de gagner du temps et d’éroder progressivement la détermination des socialistes à rester unis.
D’ailleurs, dès aujourd’hui, se tient un bureau national du parti, à la demande des opposants à Olivier Faure, pour “clarifier” la ligne, c’est-à-dire pour demander la rupture avec LFI. Dans le groupe des opposants, on retrouve bon nombre de candidats à des postes ministériels que la macronie n’a pas manqué d’approcher. Pour ceux-là, une victoire de Mélenchon en 2027 n’est pas très engageante, puisqu’ils sont à peu près sûrs d’être tenus à l’écart de la victoire par Mélenchon.
Macron le sait. Et il sait aussi que ceux-là, qui jouent leur va-tout, vont rapidement faire monter la pression sur le parti socialiste pour rejoindre un gouvernement de coalition avec la macronie. Il ne reste plus qu’à savoir qui craquera en premier.
Nous redisons notre pronostic d’un gouvernement de coalition intégrant, peu ou prou, Lucie Castets, avec un schéma de coalition biscornu.
Le Courrier des Stratèges
Pensez par vous-même
Se présenter comme l’opposition quand on a pratiqué trois fois le “faites ce que vous voulez mais votez Macron”, ça fonctionnera une fois de plus sur les castors.