L’assureur Generali vie vient d’être condamné par la Cour de cassation pour ne pas avoir respecté ses obligations contractuelles d’information en assurance vie. L’affaire devrait intéresser tous les assureurs vie car elle valide la renonciation d’une assurée près de 11 ans après la souscription du contrat. La conséquence est directe pour Generali vie qui doit rembourser à l’assurée toutes les sommes versées avec intérêts au taux légal majoré.
L’affaire jugée le 11 mars 2021 concerne une assurée qui a souscrit son contrat d’assurance vie en septembre 2001 auprès de La Fédération continentale, devenue Generali vie. Les années passent et en juin 2012, l’assurée décide de renoncer à son contrat car elle n’a pas reçu toutes les informations contractuelles pourtant obligatoires d’après le code des assurances. L’assureur refuse de lui rendre les sommes déjà versées. L’assurée porte donc l’affaire en justice.
Après sa condamnation par la cour d’appel, Generali vie se pourvoit en cassation. Au nombre de ses arguments, l’assureur indique qu’il a régularisé la situation par l’envoi d’une note d’information spécifique en décembre 2007, soit plus de 6 ans après la souscription du contrat. Mais la Cour de cassation se rattache à la loi applicable à l’affaire et rappelle que le respect de l’obligation contractuelle d’information n’est pas négociable. Nous allons le voir, cette décision est extrêmement sévère pour tous les assureurs vie qui doivent respecter le modèle de notice fourni par le code des assurances, même si certaines catégories ne sont pas concernées par le contrat souscrit par l’assuré.
Léo Guittet
En assurance vie, l’absence d’une “non-information” contractuelle est répréhensible
Pour bien comprendre le jugement, il est nécessaire de revenir sur les deux textes de loi mis en avant dans la décision de justice. Le premier est l’article L. 132-5-1 du code des assurances (dans sa rédaction alors applicable). Ce texte précise alors 2 choses primordiales. D’abord, il indique que la proposition d’assurance ou le contrat doit contenir des informations obligatoires à destination de l’assuré : notamment un modèle de lettre de renonciation, mais surtout une note d’information qui doit contenir toutes les informations prévues par un modèle spécialement écrit dans le code des assurances (à l’annexe de l’article A. 132-4). Ensuite, le texte de loi prévoit si une de ces informations n’est pas remise au futur assuré ou à l’assuré, cela prolonge le délai de renonciation : si jamais l’assureur vie délivre finalement ces informations à l’assuré, le délai de renonciation court alors pendant 30 jours supplémentaires avant de prendre fin.
Dans les faits, Generali vie n’a pas tout de suite donné à l’assurée son modèle de lettre de renonciation, mais l’assureur l’a fait en décembre 2007 dans une note de régularisation. Sur ce point, la Cour de cassation admet que l’assureur a bien rempli son obligation en rectifiant son oubli.
Cependant, il est reproché à Generali vie de ne pas avoir donné à l’assurée toutes les informations prévues par le modèle de note d’information inscrit dans le code des assurances. En effet, ce modèle comporte une rubrique dédiée au rendement minimum garanti et à la participation qui doit détailler les informations sur le “taux d’intérêt garanti et durée de cette garantie”, et donner une “indication des garanties de fidélité, des valeurs de réduction et des valeurs de rachat…”. Or, l’assureur n’a jamais délivré cette information à l’assurée, même en 2007 dans sa notice rectificative.
C’est justement sur ce point que les avis s’opposent. L’assureur Generali vie rappelle que son contrat d’assurance vie “support euros” ne contient pas de taux minimum garanti et ne prévoit pas non plus de garanties de fidélité ou valeur de réduction. Partant de là, l’assureur considère qu’il n’y a pas lieu de les faire figurer dans la notice. Malheureusement pour lui, le juge ne partage pas ce point de vue.
D’après la Cour de cassation, cette “non-information” est bien une information précontractuelle. Tout contrat d’assurance vie doit comporter une note d’information qui respecte les catégories prévues par le code des assurances… même si le contrat commercialisé ne comporte aucune mesure dédiée à cela ! En d’autres termes, la notice rectificative envoyée par Generali vie en décembre 2007 aurait dû mentionner noir sur blanc que le contrat souscrit par l’assurée ne propose aucun taux minimum garanti et qu’il ne donne aucune garantie de fidélité ou valeur de réduction. Cette “non-garantie” est bien une information contractuelle obligatoire selon le juge.
Quelle est la conséquence sur les contrats d’assurance vie concernés ?
Cette décision de justice rappelle que tous les contrats d’assurance vie doivent respecter le modèle de note d’information édicté par le code des assurances. Toutes les rubriques doivent être reproduites, même si celles-ci sont sans objet dans le cadre du contrat souscrit par l’assuré. Si aucune note d’information rectificative n’est envoyée par l’assureur pour palier un éventuel manquement à cette information, alors l’assuré a le droit de renoncer à son contrat et de réclamer la restitution des sommes versées.
Depuis une ordonnance de 2017, la loi a évolué et l’article L. 132-5-2 du code des assurances limite à 8 ans le délai de prolongement du droit à renonciation dont peut bénéficier l’assuré. Cela reste un délai important et tous les assureurs vie feraient bien de vérifier que leurs assurés ont bien reçu une note d’information complète s’ils ne veulent pas faire face à des demandes de renonciation sur le fondement du défaut d’information contractuelle.