Peu de Français se préoccupent de l’engagement de nos forces au Mali, dans le cadre de l’opération Barkhane. Les medias mainstream relayent d’ailleurs une information lénifiante sur le sujet. Pourtant, la situation s’y dégrade rapidement et pourrait donner lieu à une débâcle française de premier ordre. Le terrorisme islamique est loin d’être vaincu dans cette région.
L’opération Barkhane se déroule au Mali depuis le 31 juillet 2014. Elle était supposée expurger le Mali de ses combattants islamistes. Mais les choses ne se passent pas complètement comme prévu: les militaires français s’enlisent, et les islamistes progressent…
L’ONU s’inquiète de la situation au Mali
Première alarme majeure: le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guttieres, a consacré un rapport à la situation du pays, publié le 26 mars. On y lit des phrases comme:
La situation en matière de sécurité dans le nord du Mali est restée complexe, tandis qu’elle n’a cessé de se détériorer dans le Centre et dans la région de Koulikoro, à l’ouest. Les attaques de groupes terroristes ont continué de viser les Forces de défense et de sécurité maliennes, la MINUSMA et les forces internationales. Nombre de ces attaques, notamment celle du 20 janvier contre une base de la MINUSMA à Aguelhok, au cours de laquelle 11 soldats de la paix ont été tués et 26 blessés, ont été revendiquées par le Groupe de soutien à l’islam et aux musulmans.
D’une manière générale, la sécurité se dégrade dans le pays, y compris dans les zones comptant une présence française. Cette dégradation s’explique d’abord par la montée de violences entre communautés. Là encore, le rapport de l’ONU est clair:
Des groupes locaux d’autodéfense portent la responsabilité de la majorité des cas (35) de violation des droits de la personne, dont 17 violations du droit à la vie et 7 cas de déplacement forcé, 6 cas d’enlèvement et 3 violations du droit à l’intégrité physique, 1 du droit à l’alimentation et 1 du droit de propriété. Le Groupe de soutien à l’Islam et aux musulmans et d’autres groupes terroristes sont responsables de 31 cas, dont 12 violations du droit à la vie, 11 cas d’enlèvement, 5 violations du droit à l’éducation et 2 du droit à l’intégrité physique et 1 cas de déplacement forcé. Les groupes armés signataires sont responsables de six violations, dont deux violations du droit à la vie, deux violations du droit à l’intégrité physique, un enlèvement et une violation du droit de propriété.
57. Les Forces de défense et de sécurité maliennes sont responsables de sept violations des droits de l’homme, y compris de sept cas d’exécution extrajudiciaire, quatre cas de torture ou de mauvais traitements et un cas d’arrestation et de détention illégales.
Autrement dit, la violence se généralise, et pas seulement du fait des actions islamistes.
Qui a commis le massacre d’Ogossagou?
Le jour même où Guttieres publiait un rapport sur la situation au Mali, des chasseurs dogons auraient commis un massacre à Ogossagou dans le centre du Mali. 160 personnes auraient été tuées, y compris des femmes, des enfants et des bébés.
« C’est après qu’ils ont attaqué le village, ils ont versé du gasoil sur les cases, les greniers et les hangars, après ils ont mis le feu », tuant à coups de machette ceux qui tentaient d’échapper aux flammes, a raconté à l’AFP Bara Dicko, un villageois joint par l’AFP de Bamako.
Toutefois, l’identité exacte des auteurs de ce massacre est contestée. Face à la passivité des forces intérieures maliennes, des milliers de manifestants se sont rassemblés à Bamako, notamment pour réclamer la démission du gouvernement. À Bamako même, les islamistes sont soupçonnés d’agiter les foules pour déstabiliser le gouvernement, ce qui n’était pas exactement l’effet recherché par la mission internationale lancée par l’ONU
Les États-Unis vont-ils réagir?
Parallèlement, les États-Unis eux-mêmes s’inquiètent de l’échec français au Mali. Ils ont récemment demandé une évaluation de l’intervention Barkhane. Cette posture pourrait augurer d’une intervention américaine directe en Afrique Centrale et de l’Ouest. Signalons que, depuis quelques années, l’administration américaine s’intéresse de façon grandissante au bassin du lac Tchad.