Les dealers viennent d’inaugurer une nouvelle époque, en remplaçant de facto l’État discrédité dans une tour de Nanterre : la tour zéro d’une France post-républicaine ? Les représentants des « forces de l’ordre » cités dans le matériel de RMC – payés pour ne pas comprendre ce qui leur arrive – n’y voient bien sûr qu’une étrange évolution tactique : « Avant, les trafiquants intimidaient les populations. Désormais, ils essaient de les amadouer ».
Pourtant, l’expression « amadouer » est un peu faible : proposer aux riverains, par voie d’affichage, un véritable contrat social de collaboration mutuelle, plus qu’une simple « offensive de charme », c’est tout simplement se substituer aux autorités publiques. Plus ou moins comme la branche énergie de la CGT marseillaise.
Car qui prendra encore au sérieux les représentants d’un État théoriquement laïc et rationaliste, après les avoir vu accepter de sanctionner par des amendes ceux qui refusent de boire leur café debout ou de circuler à l’air libre avec un kleenex sur le nez pour garantir l’immortalité de mémé en période de grippe ?
Dealers de Nanterre : les nouveaux rois barbares
L’article ici commenté, écrit à charge, sélectionne bien sûr des témoignages de voisins inquiets ou mécontents – certains disant même prévoir de déménager.
Pourtant, comme la scène n’a pas lieu dans un arrondissement central de Paris ou Lyon, ni à San Francisco, gageons qu’il s’en trouvera aussi beaucoup pour accepter les offres de services de ces jeunes gens dont on sait au moins ce qu’ils veulent (vendre leur résine de cannabis), plutôt que de recommencer à faire confiance aux agents d’un post-État qui – à défaut de pouvoir et vouloir organiser la circulation et le ramassage des ordures – se fixe tantôt la mission d’éradiquer la grippe, tantôt celle de sauver la planète, et tantôt recommence (comme un retour en enfance) à parler « d’intégrité territoriale » – mais uniquement s’il s’agit de celle de l’Ukraine.
Si quelqu’un doit déménager, ce sera la République…
Qu’est ce qu’on gagne à changer de suzerain, une part du commerce? C’est pas clair. Et puis ne va t on pas payer des 2 côtés?
1. Je n’ai pas dit qu'”on” y gagnait (il faudrait d’ailleurs d’abord définir ce “on”), je décris juste une évolution de fait…
2. Eh si, le problème des moments de transition historique, pour ceux qui ont la chance douteuse de les vivre, c’est effectivement qu’ils provoquent beaucoup de dommages collatéraux (notamment à ceux qui pensent pouvoir rester neutres et pacifiques au milieu du champ de bataille).