Le trou noir fiscal est une découverte typiquement française. Il s’agit d’une dépense fiscale (entendez : une niche) dont le nombre de bénéficiaires n’est pas connu, dont le coût n’est pas chiffré, et dont le terme temporel n’est pas déterminé. Les trous noirs fiscaux représenteraient 10% des dépenses fiscales totales. Le Parlement entend les remettre à plat et les évaluer.
Le trou noir fiscal occupe une place à part dans le maquis des mesures fiscales “incitatives” françaises. Il passe en effet sous les radars et ne fait l’objet d’aucun suivi. Dans une démarche scientifique louable, les députés ont donc adopté un amendement qui se propose de mettre un terme à cette situation en remettant à plat l’ensemble du dispositif.
Dans ce cadre, on découvre que certains trous noirs fiscaux ciblent des populations très particulières, et peuvent en réalité se révéler très utiles.
C’est par exemple le cas du régime d’amortissement exceptionnel sur cinq ans des investissements réalisés dans les petites et moyennes entreprises innovantes prévu à l’article 217 octies du CGI, ou encore celui des régimes d’imposition qui permettent notamment aux artistes et sportifs de calculer et de déclarer une moyenne de leurs bénéfices issus des droits d’auteur.
De façon assez curieuse, figure parmi ces trous noirs l’exonération d’impôt sur le revenu de la prime d’activité. Celle-ci profite pourtant aux travailleurs les plus pauvres, et vise à inciter au retour à l’emploi.
On évitera donc de commettre un impair en assimilant les trous noirs fiscaux à des trappes à évasion fiscale. En réalité, leur remise en cause pourrait nuire à des catégories plutôt modestes de la population et renforcer le sentiment d’injustice sociale.
Les amateurs du genre pourront consulter ici l’amendement de Joël Giraud, décidément très actif pour ce PLF. Dans son exposé des motifs, le rapporteur général du budget écrit:
Le présent amendement concrétise une annonce qui avait recueilli un vif soutien au sein de la commission des finances en juillet 2019, lors de la présentation du rapport sur l’application des mesures fiscales : il prévoit la suppression des « trous noirs fiscaux », ces dépenses fiscales dont le coût n’est pas chiffré, dont le nombre de bénéficiaires est inconnu et qui ne sont pas bornées dans le temps.
Ces « trous noirs fiscaux », qui représentent près d’une dépense fiscale sur dix, constituent un réel problème pour la bonne information du Parlement sur les dispositifs dérogatoires et font obstacle à un travail d’évaluation complet des dépenses fiscales.
L’imagination est au pouvoir.