En pleine débâcle, les banques et les marchés financiers se concoctent, avec l'aide de Bercy, des aménagements réglementaires aux petits oignons pour continuer les profits et mutualiser les pertes.
Les banques et les marchĂ©s financiers ne reculent devant rien pour continuer le plus longtemps possible Ă engranger les profits au moindre coĂ»t et au moindre risque, quoi qu’il en coĂ»te comme dirait Emmanuel Macron. Dussent-ils pour cela prĂ©cipiter une nouvelle crise systĂ©mique.Â
Les marchĂ©s financiers ne veulent pas fermer la bourse…
Alors que, le 20 dĂ©cembre, le CAC 40 dĂ©passait le 6.000 points (ce qui en s’Ă©tait pas vu depuis le mois de mai 2007, annonciateur de bien des dĂ©sillusions), il passait brutalement sous les 5.000 points le 9 mars. Il est passĂ© sous la barre des 4.000 points une semaine plus tard.Â
MalgrĂ© cette chute vertigineuse (33% en moins de trois mois), les financiers ont considĂ©rĂ© qu’il ne servait Ă rien de fermer temporairement les bourses. C’est la thĂ©orie bien connue selon laquelle “casser le thermomètre ne fait pas baisser la tempĂ©rature”.Â
En rĂ©alitĂ©, pour beaucoup, il s’agit de continuer Ă vendre… ou Ă acheter, spĂ©cialement comme durant ce vendredi 20 mars qualifiĂ© de “journĂ©e des 4 sorcières”, pour dĂ©crire la journĂ©e d’Ă©chĂ©ance des contrats Ă terme.Â
… et les banques n’ont bien entendu aucun problème de liquiditĂ© ni de solvabilitĂ©
Dans le mĂŞme temps, il est de bon ton d’expliquer que tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes capitalistes, grâce Ă nos admirables banques si bien tenues et managĂ©es.Â
Comme le disait le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, lui-mĂŞme ancien de la BNP, c’est l’extase dans les banques françaises :
“Toutes les banques françaises sont aujourd’hui dans une situation solide et aucune ne nĂ©cessiterait une nationalisation. Il n’y a aucun doute lĂ -dessus”
Bien Ă©videmment.Â
Comment les banques ont changé les règles du jeu à leur avantage
Ce que Villeroy oublie de prĂ©ciser, c’est que les banques françaises ont d’ores et dĂ©jĂ bĂ©nĂ©ficiĂ© d’amĂ©nagements rĂ©glementaires destinĂ©s Ă arrondir leurs angles et Ă mieux valoriser leur “soliditĂ©”.Â
Ainsi, dès le 12 mars, la BCE a allĂ©gĂ© les exigences rĂ©glementaires en matière de fonds propres des banques. Le 18 mars 2020, le Conseil de stabilitĂ© financière autorisait les banques françaises Ă consommer leur “coussin de fonds propres” de 8 milliards pour faire face Ă la crise. Ces mesures techniques consistent Ă diminuer les rĂ©serves prudentielles des banques, ce qui signifie que, dans les mois Ă venir, les banques n’auront plus rien en stock pour endiguer un nouveau coup de tabac….
D’autres changements de règles sont en cours de nĂ©gociation
Mais ces mesures d’urgence ne suffisent visiblement pas Ă apaiser les tensions sur les marchĂ©s, visiblement injustes avec nos banques pourtant très “solides”, comme le dit Villeroy.Â
D’autres mesures sont donc Ă l’Ă©tude. Maintenant, c’est le plan comptable des banques qui devrait ĂŞtre modifiĂ© afin de rendre les mariĂ©es plus belles.Â
On apprend ainsi que la norme comptable IFRS 9 devrait ĂŞtre assouplie.Â
Les autorités bancaires internationales discutent d’un assouplissement d’une norme comptable clé afin d’éviter à de nombreuses banques de passer de lourdes provisions sur des prêts à des entreprises en difficulté à cause de la pandémie de coronavirus, a-t-on appris de source directement impliquée dans ces pourparlers vendredi.
Autrement dit, les banques ne devront provisionner aucune somme pour faire face aux dĂ©fauts prĂ©visibles des emprunteurs. Sous-entendu : les banques centrales paieront Ă leur place.Â
Mais, comme dit Villeroy, nos banques sont solides !