Chantal Jouanno, président de la Commission Nationale du Débat Public, s’est-elle mise en retrait à cause de la polémique sur son salaire? Ou bien a-t-elle, dès le mois de décembre, refusé les pressions de l’Élysée qui cherchait à l’instrumentaliser pour cautionner un Grand Débat truqué?
Selon Mediapart, qui soutient avoir eu accès à des documents authentiques le prouvant, le pouvoir exécutif a exercé de fortes pressions sur Chantal Jouanno au mois de décembre pour qu’elle accepte de cautionner à titre personnel le Grand Débat, mais sans appliquer les règles déontologiques de la Commission Nationale. En particulier, l’exécutif ne voulait pas s’engager sur une liberté des débats et sur une remontée intégrale de ses propositions.
Dès le 20 décembre, l’ancienne ministre aurait fait part à l’exécutif de sa volonté de ne pas se prêter à cette opération. Rappelons que Chantal Jouanno a fait l’objet, par la suite, d’attaques personnelles, notamment de la part de Benjamin Griveaux.
L’émergence des gilets jaunes, quasi spontanée, sans chef représentatif, sans ligne commune, sans feuille de route. Les revendications se brouillent, se mélangent, se recombinent. En face l’organisation d’un grand débat dans l’urgence à l’arrache sans préparation sérieuse. Les ingrédients sont dans la marmite pour un échec. Déception assurée d’un côté et réponse logiquement inappropriée de l’autre.
Le nombre des contributeurs multiplié artificiellement par deux ? Pourquoi ? Par démago de communication sans doute. Statistiquement sur des choix simples, on obtient une précision de référence avec 1000 réponses exprimées. Dans le cas présent, du fait des variables il en faudrait peut-être 10 000. Aller, en comptant large, 50 000 pour un résultat précis et extraire les idées dominantes. Il n’existe aucune nécessité scientifique de multiplier cet échantillon par dix.
De ce fait, que le cabinet Roland Berger n’ait examiné que les 2/3 des contributions n’est pas un obstacle. Par contre l’analyse a-t-elle été réalisée selon des protocoles objectifs et techniques ? C’est-à-dire avec des recoupements, croisements de données, éliminations des variables non significatives ? Personne ne sait. Puis, au-delà des chiffres, il reste l’aspect émotionnel à quantifier et interpréter puis les suggestions les plus appropriées, car derrière ce sont des humains, avec leurs souffrances, leurs doutes, leurs espoirs.
Que le débat soit biaisé et les conclusions insincères ne font guère de doutes. Le gouvernement va orienter et proposer des solutions compatibles à sa vision et aux moyens financiers disponibles. Sa liberté d’action est contrainte par le fric, non pas disponible, mais envisageable.
Frédéric Bastiat avait prévu cette situation il y a deux siècles. Il avait émis une idée simple que je résume : « Si l’État veut s’occuper de tout, le peuple le rendra responsable de tout ».