Les relations entre Européens ont tourné au vinaigre lors du conseil par vidéoconférence du 26 mars. Pays radins et pays dépensiers se sont opposés sur le lancement de coronabonds destinés à financer le plan de relance du continent face à la pandémie. Pour Emmanuel Macron, démonstration est une nouvelle fois faite de la perte profonde d'influence de la France face à l'Allemagne.

Les EuropĂ©ens se sont abondamment affrontĂ©s sur la question des coronabonds, jeudi dernier, lors de leur Conseil virtuel. Pour mĂ©moire, ce conseil (rĂ©unissant, par dĂ©finition, les chefs d’État) devait rĂ©gler les problèmes que l’eurogroupe (qui rassemble les ministres des Finances) avait renoncĂ© Ă aborder faute de consensus.Â
Les EuropĂ©ens au bord de l’implosion
Dans la pratique, les discussions ont tournĂ© autour des habituels dilemmes. D’un cĂ´tĂ©, les “radins” ou “frugaux” rĂ©unissant les Pays-Bas, l’Allemagne, l’Autriche et la Finlande, ont Ă©cartĂ© l’hypothèse d’un plan de relance europĂ©en. Comme d’habitude, les partisans d’une Europe rĂ©duite Ă Â une simple zone de libre-Ă©change ont affrontĂ© ceux qui rĂŞvent d’approfondir son fonctionnement. C’est le cas d’Emmanuel Macron, qui plaide de longue date (et s’est beaucoup et imprudemment avancĂ© sur le sujet) pour une plus grande intĂ©gration financière de l’Union.
Compte tenu des urgences dues Ă l’Ă©pidĂ©mie, la discussion a fini par prendre un tour dĂ©sagrĂ©able, bien dĂ©crit par Jean Quatremer dans les colonnes de LibĂ©ration. On notera en particulier que le Premier ministre portugais n’a pas hĂ©sitĂ© Ă qualifier l’attitude du ministre hollandais des Finances de “rĂ©pugnant”.Â
Ă€ la sortie de cette rĂ©union, le PrĂ©sident du Conseil, le jeune Charles Michel, ancien Premier Ministre belge qui a pu compter sur le soutien d’Emmanuel Macron pour ĂŞtre lĂ oĂą il est arrivĂ©, a fait un constat dĂ©pitĂ© :
Lors d’une conférence de presse vidéo, Charles Michel a confirmé que les dirigeants avaient discuté de la lettre signée par neuf ministres et présidents de l’Union européenne demandant la mise en circulation d’« obligations corona », émises par les institutions européennes au profit de tous les États membres.
« En effet, la discussion est ouverte, d’autres possibilités [peuvent être proposées], la tâche de l’Eurogroupe était donc très précise », a ajouté Ursula von der Leyen, la présidente de la Commission européenne.
La discussion est ouverte… Le Premier Ministre batave a rĂ©sumĂ© clairement la situation :
Mark Rutte, le Premier ministre néerlandais, a cependant déclaré que l’émission d’une dette commune reviendrait à « franchir le Rubicon », car elle transformerait la zone euro en une « union de transfert », ce qui n’était pas prévu par le traité de Maastricht.
« Je ne peux prévoir aucune circonstance dans laquelle nous changerions notre position », a-t-il indiqué.
Autrement dit, il n’existe aucune perspective d’accord sur une rĂ©ponse concertĂ©e des EuropĂ©ens Ă la crise du coronavirus. Et le projet macronien d’une intĂ©gration europĂ©enne renforcĂ©e paraĂ®t dĂ©finitivement enterrĂ©. En tout cas pour ce quinquennat…