Alors qu’Axa vient d’annoncer un geste pour 10% de ses assurĂ©s en pertes d’exploitation, les rumeurs enflent sur une taxe qui sera adoptĂ©e Ă l’AssemblĂ©e Nationale pour faire payer les assureurs… Une fois de plus, la rigiditĂ© dans la communication dont les assureurs font preuve les empĂŞche de valoriser les 900 millions annoncĂ©s lors du comitĂ© interministĂ©riel consacrĂ© au tourisme.
Les assureurs vont-ils Ă©coper, en loi de finances, d’une nouvelle taxe, destinĂ©e cette fois Ă aider les restaurateurs et hĂ´teliers percutĂ©s de plein fouet par le confinement ? Tout l’indique, et le pire est manifestement Ă craindre dans les mois qui viennent.Â
Les hĂ´teliers ne lachent pas l’affaire de la perte d’exploitation
Alors qu’Axa annonce un geste (nous y reviendrons) en faveur de certains de ses assurĂ©s, la fĂ©dĂ©ration des hĂ´teliers ne lache pas l’affaire. L’UMIH tempĂŞte et reproche aux assureurs de la dĂ©nigrer. Au vu de ce contexte, l’union syndicale demande à Édouard Philippe de lĂ©gifĂ©rer, et prĂ©voit une action de groupe devant le tribunal d’instance de Paris pour obtenir rĂ©paration…Â
Nous sollicitons nos 50 000 adhĂ©rents pour qu’ils nous fassent remonter leurs contrats afin que soit calculĂ© le montant des pertes d’exploitation” indique le prĂ©sident de l’UMIH, Hubert Jan (on sait dĂ©sormais le nombre d’adhĂ©rents du syndicat). Selon lui, les restaurateurs ont subi pour 10 milliards de pertes indemnisables par les assureurs.
Â
“Ces contrats-là représentent moins de 10% et je suis très confiant que nous allons trouver une solution. (...) Dans un cas d’ambiguïté, il faut trouver une solution, pour trouver une solution, il faut un dialogue rapide (...) il faut trouver une indemnisation d’une partie substantielle, rapide pour aider nos assurés”
Thomas Buberl, AXA Tweet
L’appel Ă la taxe…
Parallèlement Ă cette action en justice (dont on imagine mal qu’elle puisse prospĂ©rer compte tenu des règles applicables Ă l’indemnisation), l’UMIH brandit la menace plus sĂ©rieure de fomenter une taxe destinĂ©e Ă forcer les assureurs Ă “payer” leur dĂ». Le prĂ©sident de l’UMIH rappelle que Bruno Le Maire s’Ă©tait engagĂ© Ă lĂ©gifĂ©rer en cas d’inertie prolongĂ©e des assureurs, et l’intĂ©ressĂ© considère que les assureurs n’ont pas bougĂ©. Â
Si l’affaire n’est pas encore conclue, on sait dĂ©jĂ que des parlementaires auront la tentation d’amender la loi de finances, si Bercy ne bouge pas. Et en matière de lobbying, l’UMIH en connaĂ®t un rayon. L’automne risque d’ĂŞtre agitĂ© pour les compagnies…Â
Axa fait amende honorable
Le mĂŞme jour, Axa annonçait pourtant un geste significatif pour son portefeuille de clients couverts par une garantie perte d’exploitation similaire Ă celle qui a donnĂ© lieu Ă une injonction de payer en urgence dĂ©livrĂ©e vendredi dernier par le tribunal de commerce de Paris. Selon Thomas Buberl, Axa assure 20.000 restaurateurs, et seulement 10% d’entre eux avaient souscrit un contrat proche de celui de la maison Rostang qui a remportĂ© le morceau. Â
Pour ceux-lĂ , Buberl prĂ´ne une dĂ©marche de dialogue rapide. Chacun aura compris qu’Axa privilĂ©giera la “transaction” rapide et bien nĂ©gociĂ©e aux indemnisations rigides qui finiront devant les tribunaux. Les gestionnaires de sinistres connaissent ces affaires par coeur. Â
“Axa va annoncer aujourd’hui qu’on va investir 500 millions supplémentaires pour les PME et les ETI en France parce que c’est là où le coeur de l’économie française se retrouve”, a-t-il poursuivi. “L’idée est clairement de renforcer ces entreprises qui sont fragilisées par la crise pour les accompagner (...) C’est un investissement dans les fonds propres des PME et ETI parce qu’il faut maintenant reconstituer le capital productif pour renforcer le coeur de l’économie française.”
Thomas Buberl Tweet
Generali a Ă©galement indemnisĂ© 600 commerçants…
Dans la foulĂ©e, Reuters rĂ©vĂ©lait que Generali avait suivi une dĂ©marche analogue, mais sans passer par la case contentieuse qu’Axa a dĂ» subir. “Generali France, par exemple, a indiquĂ© qu’il effectuerait des paiements Ă 600 entreprises du secteur de l’hĂ´tellerie et de la restauration”, selon l’agence.
On s’aperçoit progressivement que le front de l’assurance s’est rĂ©vĂ©lĂ© beaucoup moins rigide que les positions officielles de la FĂ©dĂ©ration ne l’ont laissĂ©e penser. Dans la pratique, chacun a cherchĂ© Ă trouver des arrangements pour Ă©viter l’orage. La dĂ©marche est extrĂŞmement inverse Ă celle de la banque, oĂą la fĂ©dĂ©ration a fait profession d’empathie et de bonne volontĂ©, laissant Ă ses adhĂ©rents le soin de dire non lĂ oĂą la dĂ©lĂ©gation gĂ©nĂ©rale avait dit oui. Â
Si l’on en juge par les menaces fiscales, on peut penser que la stratĂ©gie bancaire de communication est un peu plus habile…Â
Mais oĂą s’arrĂŞtera la curĂ©e ?
Pour les assureurs, la question qui se pose dĂ©sormais est de savoir oĂą s’arrĂŞtera le vent mauvais qui s’est levĂ©. Les rĂ©sultats de la collecte de l’assurance-vie en avril sont tombĂ©s. Si les professionnels dĂ©plorent peu de rachats, en revanche leurs produits ont perdu de leur attrait. La collecte a fortement baissĂ©, laissant Ă penser que ce produit d’Ă©pargne est entrĂ© dans un cycle nĂ©gatif qui pourrait fragiliser les fonds propres des compagnies. Â
2020 pourrait rĂ©server de bien mauvaises surprises Ă l’Ă©co-système assurantiel. Â