Les partisans du “tout sĂ©curitĂ© sociale” sont dĂ©sormais majoritaires au gouvernement, et ce point devrait inquiĂ©ter sĂ©rieusement les assureurs complĂ©mentaires. Depuis vendredi en effet, les annonces de nominations se succèdent, et elles pourraient, au courant de l’automne notamment, changer substantiellement la donne pour l’assurance santĂ© concurrentielle. Le financement du dĂ©ficit de l’assurance-maladie promet en effet d’ĂŞtre très serrĂ©, et pourrait donner lieu Ă de belles dĂ©convenues.
L’heure du tout sĂ©curitĂ© sociale, ou d’une version approchante de celle-ci, est-elle arrivĂ©e ? Si l’on songe aux dĂ©ficits abyssaux qui se creusent du cĂ´tĂ© de la sĂ©curitĂ© sociale et aux erreurs de communication des assureurs dans la crise, il n’est pas interdit de penser que l’automne sera chaud pour les organismes complĂ©mentaires, et que le pire pourrait intervenir dans la prĂ©paration de la loi de finances pour 2021. Plusieurs nominations accrĂ©ditent l’idĂ©e d’un mouvement sismique qui pourrait se rĂ©vĂ©ler dĂ©vastateur.Â
Nicolas Revel, un directeur de cabinet très étatiste
La nomination la plus inquiĂ©tante est sans doute celle de Nicolas Revel, proche de Nicolas Sarkozy, qui devient directeur de cabinet de Jean Castex. Il sera l’homme fort de Matignon, choisi personnellement par Emmanuel Macron lui-mĂŞme, avec qui il a partagĂ© quelques annĂ©es de travail Ă l’ÉlysĂ©e, du temps de François Hollande. Revel connaĂ®t aussi très bien Jean Castex.Â
Nous rappelons ci-dessus une audition de Nicolas Revel donnĂ©e il y a quelques annĂ©es, au moment de la prĂ©paration du tiers payant, devant l’AssemblĂ©e Nationale. Il y dissèque le mode opĂ©ratoire pour “nationaliser” les organismes complĂ©mentaires. En l’Ă©coutant, on comprend que cet invitĂ© rĂ©gulier de Didier Tabuteau, le grand partisan du tout sĂ©curitĂ© sociale qui enseigne Ă Sciences-Po, ne verrait pas d’obstacle idĂ©ologique majeur Ă supprimer toute forme de concurrence dans les remboursements santĂ©. On suivra donc de près la prĂ©paration du projet de loi de financement de la sĂ©curitĂ© sociale pour 2021, qui pourrait rĂ©server quelques innovations de derrière les fagots sous la houlette d’un Matignon soucieux de donner Ă l’opinion des gages de son engagement en faveur d’une santĂ© qui deviendrait un “bien commun”.Â
Des décisions essentielles sont sur la table. L’emploi, évidemment, qui dans le contexte actuel requiert une mobilisation de tous dans le cadre de la nouvelle donne sociale lancée par le président de la République. Le soutien aux soignants et la transformation de notre système de santé dans le cadre du “Ségur” que je conclurai la semaine prochaine.
Jean Castex Tweet
Olivier Véran toujours en poste
Au ministère de la SantĂ©, Olivier VĂ©ran reste en poste, sans grande surprise. Le ministre de la SantĂ© qui a succĂ©dĂ© Ă Agnès Buzyn n’est pas non plus un grand partisan de la concurrence en santĂ©, et il ne manque pas une occasion de dĂ©noncer les frais des organismes complĂ©mentaires. Les assureurs ont donc intĂ©rĂŞt Ă se mĂ©fier fortement des rĂ©actions chimiques induites par le duo VĂ©ran – Revel, qui risquent de produire quelques catastrophes Ă©cologiques pour le secteur.Â
LĂ encore, la prĂ©paration du projet de loi de financement de la sĂ©curitĂ© sociale, dont VĂ©ran Ă©tait le rapporteur unique avant d’ĂŞtre ministre, risque de donner lieu Ă des fièvres automnales dans le monde de la santĂ© concurrentielle.Â
Alain Griset devrait plaider contre la concurrence
Ce duo est dĂ©sormais complĂ©tĂ© par Alain Griset, le prĂ©sident de l’U2P, dont les positions frileuses sur la question de la complĂ©mentaire santĂ© sont bien connues. LĂ encore, les organismes complĂ©mentaires (mais cette crainte peut ĂŞtre Ă©tendue Ă l’ensemble de l’assurance) ont du souci Ă se faire, car Griset prĂ©parera sans doute un projet de loi qui risque d’ĂŞtre destructeur pour la profession. Ici, le dĂ©dain affichĂ© de la FFA pour ses partenaires patronaux risque de se payer cash. Il devrait ĂŞtre tentant pour les artisans de prendre leur revanche sur les silences des assureurs concernant la perte d’exploitation, et probablement sur le passage au forceps sur la concurrence en matière de complĂ©mentaire santĂ© d’entreprise.Â
Rappelons que l’U2P a toujours Ă©tĂ© partisane des dĂ©signations, qui permettaient Ă certaines de ses fĂ©dĂ©rations adhĂ©rentes comme la boulangerie de se financer Ă bon compte sur le dos des salariĂ©s.Â