Ce jeudi, le Conseil d'Orientation des Retraites doit évoquer l'avenir du régime général, et particulièrement ses perspectives financières. Pour Emmanuel Macron, la situation est compliquée, car il a suspendu cet été sa réforme passée au forceps à la fin de l'hiver, dont nous avions annoncé depuis un an et demi qu'elle n'entrerait jamais en vigueur. En outre, les élections en 2022 laissent peu de place à un grand chambardement qui inquiéterait ses électeurs. Néanmoins, les déficits colossaux qui s'accumulent à la faveur du confinement le contraindront à l'action. Selon toute vraisemblance, la seule marge de manoeuvre qui lui reste consiste à préparer la grande saignée des retraites pour les cadres. Voici pourquoi et comment.
Pas facile évidemment de concilier tous les contradictoires dans une période aussi sensible et mouvante.
D’un côté, les mauvaises nouvelles s’accumulent pour un système de retraite qui est déjà l’un des plus coûteux (sinon le plus coûteux d’Europe, avec 14% de PIB consacrés aux anciens), mais dont les pertes ne cessent de plonger. On parle désormais, en cas de récession à 11% en 2020, d’un déficit global de plus de 25 milliards pour la seule année 2020. Ce chiffre devrait paraître dans le rapport de ce jeudi. En termes de crédibilité sur la scène européenne, Emmanuel Macron pourra difficilement ne pas réagir à cette plongée aux enfers.
D’un autre côté, les élections approchent, et l’adoption de la réforme (dont le contenu final est pourtant très loin des ambitions égalitaires initiales affichées par Emmanuel Macron) en février a déjà mis les syndicats dans la rue pour la plus longue grève connue en France depuis longtemps. Revenir sur la suspension annoncée de la réforme alors que l’ambiance dans le pays est déjà exécrable paraît donc suicidaire pour un Président qui court après sa réélection.
C’est ce qu’on appelle couramment un dilemme.
La technostructure s’active pour réformer en douce
Dans cette situation délicate, Emmanuel Macron joue le rôle du cheminot qui tente d’arrêter la locomotive avant le mur. Sa position n’est pas facile, mais il l’a choisie en se lançant de longue date dans une réforme pour laquelle il ne disposait pas d’une légitimité suffisante dans l’opinion. Le problème est que sa réforme supposait une absorption des régimes complémentaires de l’AGIRC et de l’ARRCO, eux-mêmes en position financière tendue du fait du confinement. Une fusion de ce genre est complexe à réaliser techniquement, et suppose des années de préparation, notamment informatique, sauf à créer une catastrophe industrielle du même ordre que le RSI en son temps, pour les indépendants.
Depuis plusieurs mois, la technostructure est sur les charbons ardents pour récupérer les 60 milliards € de réserves de l’AGIRC-ARRCO, qui font bien des envieux. Par les temps qui courent, il parait inconcevable de laisser s’échapper une telle pépite, dont la confiscation est minutieusement préparée depuis plusieurs années. Et l’effondrement prévisible des régimes de fonctionnaires rend urgente cette oeuvre de « solidarité » qui s’apparente à un superbe hold-up sur les cotisations des salariés.
Les hauts fonctionnaires s’agitent donc. Emmanuel Macron a d’ailleurs recruté une conseillère sociale pour remplacer Pierre-André Imbert nommé secrétaire général adjoint de l’Elysée. Cette conseillère a fait un passage à la CNAMTS, l’assurance-maladie, où elle s’est fait la main sur la gestion des organismes de sécurité sociale. Elle doit nourrir le Président en hypothèses de travail pour régler la situation.
La Cour des Comptes propose une roue de secours
Assez logiquement, tout le monde cherche une issue la plus juteuse possible à cette situation de blocage où l’action est aussi urgente qu’elle est inenvisageable.
La Cour des Comptes est opportunément venue mettre son grain de sel dans la situation en réchauffant son idée déjà ancienne de loi de financement de la protection sociale qui remplacerait la loi de financement de la sécurité sociale. On trouvera ses propositions très récentes ci-dessous.
7. Créer une instance pérenne de concertation, constituée de représentants de l’État, des administrations de sécurité sociale et des collectivités territoriales, associant toutes les administrations publiques à la maîtrise des finances publiques (modification de la LOPGFP, recommandation nouvelle).
8. Fixer en loi de programmation des finances publiques les règles de partage des impôts entre administrations publiques et les règles de compensation et de garantie de ressources entre l’État, la sécurité sociale et les collectivités territoriales (modification de la LOPGFP et de la LOLFSS, recommandation nouvelle).
9. Transformer la loi de financement de la sécurité sociale en une loi de la protection sociale obligatoire élargie aux régimes de retraite complémentaire obligatoires et à l’assurance chômage (modification de la LOLFSS, recommandation réitérée).
10. Instaurer une « loi de résultat » de la sécurité sociale, présentée au printemps comme la loi de règlement du budget de l’État, et une loi de financement à l’automne, portant sur l’exercice en cours et à venir (modification de la LOLFSS, recommandation réitérée).
11. Préalablement à l’examen des projets de loi de finances et des projets de loi de financement de la sécurité sociale, organiser, une discussion générale sur les recettes publiques, leur partage et les conditions de
l’équilibre du budget de l’État et de la sécurité sociale (modification de la LOPGFP, de la LOLF et de la LOLFSS, recommandation nouvelle).
On comprend bien l’opération : il s’agit d’établir, dans tous les cas, réforme ou pas, l’autorité du Parlement et de l’exécutif sur les fédérations AGIRC-ARRCO, et bien entendu sur leurs mirifiques réserves. C’est ici le scénario minimaliste au cas où Emmanuel Macron se « dégonflerait » : l’autonomie des partenaires sociaux, conquise en 1947 contre la sécurité sociale, serait abolie.
Faire payer les cadres : le calcul caché de la technostructure
Mais au-delà de cette opération de « sauvegarde », la technostructure sait quel intérêt profond il y a à mettre la main sur les régimes complémentaires. Ce sont en effet les seuls, aujourd’hui, qui couvrent, en dehors des intouchables régimes publics où les cadres de catégorie A sont de plus en plus nombreux, les cadres, dont les populations où l’on peut imposer des sacrifices pour « financer la solidarité ».
En récupérant l’AGIRC, le gouvernement pourrait assez rapidement, sans mettre ses fonctionnaires dans la rue (qui sont parvenus à faire croire qu’ils étaient mal traités par les régimes de retraite, alors que la retraite moyenne du public est le double de celle du privé), retrouver un peu de marge de manoeuvre dans les dépenses en dégradant par des mesures techniques en apparence indolore, le taux de remplacement des retraites des cadres.
Autrement dit, pour faire illusion devant ses partenaires européens, la récupération de l’AGIRC permettrait à Emmanuel Macron de baisser les dépenses en changeant les règles du jeu sans toucher aux « petits » susceptibles de faire grève.
Politiquement, le reformatage de la réforme des retraites autour d’une simple absorption des régimes complémentaires peut donc s’avérer un bon calcul : il est techniquement prêt, il rapporte immédiatement 60 milliards de réserves, et il permet de limiter la casse sociale aux seuls cadres du secteur privé.
Pourquoi se priver d’une opération aussi juteuse ?
Le vrai problème c’est l’Etat progressiste qui se mêle de tout, et qui à besoin des sous des « privés » pour payer ses fonctionnaires retraités bien plus qu’ils ne valent.
Donc au nom du mantra de l’égalité faisons de l’égalitarisme forcément politiquement correct. Et l’Etat fera « tapis » et la France sera la première nation à inaugurer le statut de Nation de pauvres obligatoires.
Le salopard qui a vidé toutes les caisses va bien devoir les remplir à nouveau …
Ne serait-ce pas toujours les mêmes qui vont payer ?????
La réponse est « il faut prendre l’argent là où il est » , « quoi qu’il en coûte «
Nous avons des irresponsables aux manettes depuis des décennies qui n’ont jamais regardé une pyramide des âges pour intégrer que le déséquilibre actifs retraités était le problème, nous y sommes jusqu’à l’extinction de la génération des baby-boomers soit dans environ 25/30 ans, mais ça non plus ils ne l’on pas intégré
Courage
En voyant les cours de la bourse , on peut aussi se dire que la richesse créée ne passe pas par les bons tuyaux…Je vous lis en train de rager , montrer du doigt les fonctionnaires en oubliant les actionnaires : c’est étonnant . D’autres financements des retraites que ceux connus actuellement , c’est envisageable ?
Trouver des solutions en sortant du cadre ( jeu de mot ) , c’est possible?
Cadre aujourd’hui … je voudrai pas faire peur aux petits nouveaux.Chez Danone par exemple , c’est vivre le jeu des chaises musicales que connaissent de plus en plus de grandes entreprises , au nom de la « rationalité « .On commence par le bas de l’échelle , on continue par les cadres , puis on robotise à fond .Là encore , de la richesse créée qui ne revient pas dans le circuit .Comment une économie peut marcher si de plus en plus de gens n’ont pas les moyens de consommer ?Est ce que la fortune de Bezos (le bien nommé) va sauver l’économie ? Ne sommes nous pas arrivé aux limites d’un sytème concurrentiel , où le prix le plus bas est devenu l’alpha et l’omega ?
Cadre aujourd’hui , c’est comprendre que la richesse ne ruisselle pas … comme promis.Beaucoup commence à comprendre que le chef de cordée n’a pas toute sa tête , même s’il promet que demain ira mieux , qu’il va se « réinventer « .
Aux petits jeunes plein de belles ambitions ( j’en ai fait partie) , je ne saurai que conseiller la lecture de deux magnifiques livres: « pourquoi l’intelligence rend idiot » de David Robson , et « où est le sens « de Sébastien Bolher , pour s’éviter ( si c’est encore possible) de devoir se documenter sur les techniques de mobbing ainsi que , sur les meilleures façon de se sortir du burn-out.
Force et courage !
Pas d’accord avec les thèses de l’ultra libéralisme défendues sur ce blog ( avec leur lot de boucs émissaires ) , mais je sais ce que certains parmi vont endurer, même si leur vaillance leur laisse croire qu’eux s’en sortiront .