Je continue ici ma réflexion sur l’évolution des institutions. Aujourd’hui, je livre un extrait de chapitre de mon prochain livre sur le monde d’après. J’y évoque le remplacement nécessaire de la démocratie représentative par une démocratie liquide, qui n’est pas exactement la démocratie directe au sens où certains l’entendent.
Face aux insuffisances de la démocratie représentative, se pose la question du système à inventer pour la remplacer. Sur ce point, je crois qu’il faut commencer par se défaire complètement des vieux réflexes appris avec la démocratie représentative, il faut les désapprendre, les traquer jusque dans les moindres recoins pour bâtir un dispositif complètement nouveau. Deux réflexes devenus inconscients au fil du temps sont particulièrement importants à combattre : le premier consiste à croire que les institutions font la société, qu’elles sont toutes puissantes et qu’elles s’appuient sur un Etat qui peut agir sans limite. Ce réflexe consiste à croire qu’une civilisation ne peut prospérer en dehors des institutions qu’elle a choisies. Un deuxième réflexe consiste à croire que la démocratie s’exprime par le droit de vote majoritaire et, qu’au fond, plus on vote, plus on vit en démocratie.
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Le problème c’est que nous ne sommes plus en démocratie mais en ploutocratie.
À partir de là s’interroger sur les formes que devrait prendre une démocratie qui n’existe plus…
Il n’existe pas d’autre forme de démocratie réelle que la démocratie directe qui oblige les citoyens à réfléchir, à s’informer et à décider de façon responsable, devenant seuls responsables et acteurs de leurs propres destins.
Tout pouvoir contient en lui le germe du mal car il s’agit du pouvoir sur la liberté des autres alors que le propre de la liberté est de s’autodéterminer et d’assumer les conséquences de ses propres choix. C’est pourquoi les systèmes fondés sur le pouvoir d’un politicien qui n’en fait qu’à sa guise une fois élu n’est pas démocratique et ressemble à un bateau sans gouvernail voguant à la dérive au gré des ambitions du pouvoir élu. Le gouvernail est le système de correction de trajectoire que constituent les votations permanentes sur tous sujets, sociaux, économiques et militaires principalement.
Le pire obstacle à cela est l’inappétence des peuples à s’auto-guider, préférant se décharger de cette responsabilité sur un dirigeant qu’ils accuseront ensuite de les avoir déçus.
Comme le disait Hitler, “C’est une chance pour le gouvernement que le peuple ne pense pas”.
Que chacun commence par penser par lui-même.
Penser par soi-même, ok mais sur quel support quand les décideurs bien -pensants dressent un mur d’ignorances, d’idioties, d’occupations et de circonstances qui rendent l’exercice bien difficile, à moins d’avoir la science infuse ou le QI d’Einstein.
La jeunesse a un énorme obstacle avant d’atteindre la vérité. Là est le problème.
D’ailleurs ces décideurs pensent-ils par eux-mêmes ? That’s the question.
Le problème démocratique nous fait rentrer dans le métaphysique.
Quand on voit pour qui les masses VEAUtent, le mieux serait plus de démocratie du tout, ni directe ni indirecte.
Je partage bien sûr entièrement les propos de Freeman: la nécessité pour chacun d’apprendre à penser par lui-même est la condition sine qua non d’une réforme des institutions pour qu’elles aient une chance de réussir. La vie et le mouvement précèdent toujours la forme et la structure, ou pour le dire autrement, une structure est toujours le résultat et même le reflet de celui qui l’a mise en place. Il faut donc travailler au moins autant à nous changer nous-mêmes qu’à transformer nos institutions.
Plus le temps passe, plus il devient évident que nous vivons les soubresauts d’une fin d’époque. Une immense chance, unique peut-être, s’offre à nous, celle de “penser l’après” sur de nouvelles bases, des bases en adéquation avec les vrais besoins de l’être humain et de sa vie avec ses semblables (la société), et de prendre résolument distance des multiples déformations auxquelles nous nous sommes peu à peu habitués. Je travaille à la traduction d’un livre proposant de construire cette vie commune sur les trois grands principes de Liberté, Egalité et Fraternité, chacun bien compris. Pour résumer:
Liberté: tout ce qui relève de l’activité créative, de l’épanouissement du potentiel humain, de notre richesse individuelle, devrait être conçu selon le principe de liberté et non soumis aux désidératas de l’Etat, afin que chacun puisse donner le meilleur de lui-même. L’éducation aux enseignants, la médecine aux médecins, la recherche aux chercheurs… Qui sait quelle société naîtrait peu à peu d’une école non basée sur la concurrence, la réussite, le souci de faire de bons fonctionnaires…
Egalité: nous le savons, tous sont égaux devant la loi… Ou plutôt devraient l’être. Ce serait le vrai rôle de l’Etat de le garantir. Pourquoi ne le fait-il pas ou si peu? Il serait temps pour lui de ne plus s’occuper de beaucoup de choses sur lesquelles il a aujourd’hui plein pouvoir et pour commencer de rétablir un fonctionnement crédible de nos institutions démocratiques.
Fraternité: l’activité économique apporte par essence une réponse à nos multiples besoins physiques (nourriture, toit, infrastructures de toutes sortes…) et devrait donc se souvenir de l’importance du principe fraternel afin que tous sans exception puissent vivre, et vivre dignement. Qui oserait penser qu’elle ne serait pas capable de s’organiser sans l’Etat? La réalité de la vie, quand on lui en donne la possibilité, ne montre-t-elle pas à profusion la capacité des producteurs à se gérer eux-mêmes?
Liberté individuelle – Egalité sociale – Fraternité économique, trois principes à la fois bien français et universellement humains. Rudolf Steiner, penseur et philosophe, proposa cette voie à des politiques du plus haut niveau suite aux conséquences humaines et économiques catastrophiques de la première guerre mondiale, à un moment où tout devait être reconstruit et offrait la possibilité d’être repensé. Exactement comme aujourd’hui. Sa démarche suscita un grand intérêt politique et public mais ne fut pas suivie. Pourrait-elle nous inspirer, un siècle plus tard? Le livre à paraître vous en dira plus…
Cher Monsieur Verhaeghe vous avez dit l’essentiel lorsque vous écrivez ceci:
« Le problème de la démocratie ne se limite en effet pas à « qui décide de la loi », mais il est surtout celui de « ce que la loi peut décider ». Si une puissante Constitution ne limite pas clairement le champ de la loi et ne pose par des principes fondamentaux et des droits naturels auxquels la loi ne peut déroger, qu’elle ne peut transgresser, le régime délibérant se transforme inévitablement en tyrannie. »
Quatrième de couverture direct, je dis. ???? Le reste en découle. Protéger chacun des bonnes idées est la base de tout: que les citoyens ordinaires aient un recours gravé dans le marbre ???? contre les Rémy bricole tout de Lfi maqueron &cie, notamment: merci mais non merci.
La déflation législative et réglementaire devrait suivre.
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Merci à EV, Freeman, enroute777, pour leurs textes constructifs & importants.L’élément fondamental évoqué est “l’Intérêt Général”des citoyens, non basée sur la concurrence & l’argent. Puis, le second est: “Pour le plus grand Bonheur du Peuple”, voire l’indice du Bonheur du Bhoutan qui est de “Concilier “croissance et développement économique”, “conservation et promotion de la culture”, “sauvegarde de l’environnement et utilisation durable des ressources” et “bonne gouvernance responsable”. Rajoutons: “Sans pauvreté ni endettement”… Ceci posé, la ou les formes des prises de décision est ou sont à définir… Mais ce n’est pas tout, la question suivante est qui & comment, & selon quels principes…Nous devons tirer le fil de la pelote pour le dérouler & en envisager tous les aspects…exemple: Quels sont nos droits naturels ? Puis comment les lois sont élaborés sans s’enfermer dans des normes qui dénaturent tous ce qu’elles touchent ? etc…Retenons qu’il va aussi falloir définir un nouveau rôle de l’Etat, après un régime amaigrissant colossal de ses pouvoirs, ainsi que ceux des administrations obèses totalement dévoyées & inefficaces…le service des citoyens redevenant la base essentielle.
Puis, comment construire le Monde d’après: d’abord le simplifier dans tous les domaines, en enseignant aux enfants des écoles, le respect de la Nature, de l’Autre, de la Faune & la Flore, de l’Eau, de l’Air, par la connaissance de notre interdépendance, car tout se tient sur notre Terre. Ce sont des hommes & des femmes nouvelles qui vont devoir enseigner aux enfants, aux adolescents, aux adultes, ce qu’implique la survie sur notre Terre ! Merci d’avoir commencé à ébaucher le sujet de la Civilisation de Demain, que nous devons prendre à bras le corps dès aujourd’hui !
Tout à fait d’accord qu’il soit nécessaire de faire quelque chose.
J’ai lu “100 et + … questions auxquelles doit répondre un candidat à la présidence de la république” de M Attali lors de la présidentielle qui a vu la venue de M Sarkosy.
Bien qu’ingénieur de formation, je ne pouvais répondre qu’à 4 ou 5 avec des arguments (fondés ou pas)
La démocratie directe implique un niveau de connaissance suffisante ce qui n’est pas simple. Notre problème est souvent l’ignorance tout en croyant savoir
Une proposition:
Il me semble qu’aux heures de grande écoute, télévision et radio, …. il serait opportun de réunir en “n” fois des personnes qui:
– définissent correctement le problème ou le sujet
– ceux qui connaissent le sujet à traiter (les Hommes de l’art)
– des politiques
– des représentants syndicaux
– des messieurs et mesdames tout le monde
– où chacun puisse s’exprimer
– la prise en compte de réactions des auditeurs et téléspectateurs
– où les défauts d’ignorance soient levés immédiatement (faux arguments, solutions impossibles, … en donnant la raison)
– qu’une proposition soient élaborée en accord de tous (1 ou n opposant(s) peut avoir raison)
Avez-vous assisté à des réunions de travail (que ce soit dans le Public ou le Privé, où les décisions déjà prises par la hiérarchie doivent être “entérinées”)
de parents d’élèves,(où il est interdit d’aborder le sujet de la pédagogie !)
de syndic (où le gérant multiplie les travaux pour favoriser ses “copains” et toucher une commission au passage),
de comités de quartier (où chacun tire la couverture à soi), etc ?
Depuis les années 80, la mode de la “réunionite” s’étend à tous les domaines et ne débouche sur rien si ce n’est une perte de temps en blabla qui partent dans tous les sens.
Tout le monde n’est pas capable d’avoir des lumières en tout !
Même les “experts” se contredisent (experts psys devant les tribunaux, experts d’assurance qui ne défendent que l’assureur…)
Il y aura toujours une grande gu..le qui s’amusera à faire capoter la discussion pour le plaisir !
“De tous ceux qui n’ont rien à dire, les plus agréables sont ceux qui se taisent.”
“C’est pas parce qu’on n’a rien a dire qu’il faut fermer sa gueule.”
Participer sérieusement demande une certaine maturité politique et une conscience développée.
L’intérêt général est une notion qui n’a plus cours dans une société individualiste qui ne contemple que son nombril.
Magnifique, superbe article. Enfin de quoi réflechir. Hâte de pouvoir mettre la main sur votre livre.
Les réunions, les assemblées et les votes de toutes sortes, incluant les modes de démocratie directe, ont en commun de relever de la volonté collective expresse. A l’opposé, la volonté collective tacite, la coutume, a longtemps joué un grand rôle dans l’ordonnancement des sociétés d’Europe occidentale. Cela était rendu possible par une certaine stabilité. Ces deux formes de volonté collective ont chacune leur part d’inconvénients et aucune ne doit donc être idéalisée. Il n’en reste pas moins que l’on a considéré pendant des siècles que le mode de volonté tacite était la forme commune et le mode de volonté expresse la forme d’exception. Rappelons-le, parmi les fondements les plus anciens de l’Etat moderne se trouve l’idée de valoriser systématiquement la loi au détriment de la coutume, tel que cela apparaît dès le XIIe siècle dans les textes d’Irnerius, juriste à la botte de l’empereur germanique et fondateur de la célèbre école de droit de Bologne, au très fort rayonnement. Plus tard, l’Angleterre a établi des méthodes qui ont accéléré le déclin des processus coutumiers. D’abord, en confiant aux juges royaux un rôle normatif considérable, le système de la Common Law a peu à peu dépossédé le peuple de son autonomie en matière de droit. Ensuite, au XVIIIe, le système représentatif parlementaire, qui s’est largement exporté comme on sait, a été mis en place par le Premier lord du Trésor (ministre des finances) Robert Walpole, homme servant les intérêts de la haute banque, et a parachevé cette dépossession. Vu l’impasse où se trouve aujourd’hui l’Occident, il est temps de changer de perspective. Il faut sortir enfin du XVIIIe siècle.