Personne ne peut dire qui sera le successeur d’Angela Merkel ni combien de semaines il faudra pour qu’il soit désigné après des élections législatives allemandes, le 26 septembre qui sont encore pleines d’incertitudes. Trois favoris ont été successivement donnés par les sondages depuis mai dernier. Mais au moment où la campagne électorale s’engage vraiment, nul ne peut dire si le favori actuel, le social-démocrate Olaf Scholz, tiendra la distance dans les trois semaines qui viennent.
Qui pour succéder à Angela Merkel après les élections du 26 avril prochain. Dimanche soir avait lieu le premier débat entre les trois candidats en tête dans les sondages. Sur la photo ci-dessus, de droite à gauche, Armin Laschet, tête de liste des chrétiens-démocrates, Annalena Baerbock, chef de file des Verts et Olaf Scholz, actuellement légèrement en tête, avec le SPD, dans les sondages. Scholz est le plus inattendu des trois dans la position de favori.
Au printemps, les médias et l’establishment allemand (et européen) n’avaient d’yeux que pour Annalena Baerbock. Et puis cette dernière a accumulé les gaffes et été accusée de plagiat dans son dernier livre. On a vu alors monter les chances d’Armin Laschet, Rhénan jovial. Tellement jovial qu’une caméra l’a filmé au mauvais moment, en juillet, en train de rire pendant un discours du président de la République qui rendait hommage aux victimes des inondations qui ont eu lieu en juillet dans le propre Land de Laschet….en Rhénanie du Nord/Westphalie. Soudain la CDU, largement en tête, à 27%, a perdu cinq points. Du coup, on a vu monter le SPD, jusque-là à la traîne dans les sondages. Les sociaux-démocrates sont passés devant les Verts puis l’opinion a commencé à se demander si, finalement, la tête de liste du parti, Olaf Scholz, n’était pas le candidat le plus solide pour la Chancellerie. Du coup, dans les sondages, le SPD fait jeu égal avec ou possède une courte avance sur la CDU. Et, lors du débat télévisé de dimanche soir, Olaf Scholz est arrivé en tête des préférences des téléspectateurs, devant Annalena Baerbock et Armin Laschet.
Pour autant on aurait tort de croire que les jeux sont faits.
Les cinq facteurs qui vont décider de l’élection
Cinq facteurs vont décider de l’élection. Et ils rendent les paris très ouverts.
- La personnalité de la tête de liste, en effet. Pour l’instant, Olaf Scholz tient la corde. Mais cette campagne dézingue les favoris les uns après les autres. Tiendra-t-il les trois prochaines semaines? Bismarck avait l’habitude de dire: “Une semaine en politique, c’est comme un an”.
- Le poids respectif des partis. Certes l’envie d’alternance joue en faveur du SPD (même s’il était au gouvernement avec Madame Merkel); mais le SPD revient de loin. Il y a six mois, il était à 15% dans les sondages. La CDU semble avoir un socle solide à 25%….
- A moins qu’entre un jeu un troisième facteur que, curieusement, les sondeurs prennent peu en compte: la saturation face à la politique enfermiste imposée face au COVID. Et à ce jeu-là, la CDU pourrait faire les frais du mécontentement. En Bade-Wurtemberg, le chef du parti Thomas Strobl voudrait barrer l’accès aux cinémas et aux restaurants pour les non-vaccinés, même s’ils ont un test. Il le dit dans le journal allemand a plus grand tirage à un mois de l’élection, peut-on imaginer plus suicidaire?
- Les trois autres partis vont largement décider du sort de l’élection. La Gauche (Die Linke) franchira-t-elle la barre des 5%? Il suffirait qu’elle fasse 6% et la somme SPD + Verts 45% pour que la majorité soit atteinte et qu’une majorité de gauche s’installe au pouvoir. Les libéraux de Christian Lindner feront-ils 11 ou 14%? Plus le FDP sera haut, plus il sera faiseur de roi. A l’heure actuelle, on peut envisager aussi bien une coalition CDU + Verts + FDP qu’une coalition SPD + Verts + FDP. Enfin, dernière inconnue, quel score fera le parti national-conservateur, l’AfD? Actuellement à 11% dans les sondages, pourraient-ils créer la surprise comme en 2017, et dépasser 13%?
- Cela dépendra du dernier facteur, peut-être la plus grande inconnue de ce scrutin, l’abstention. Elle a été forte depuis qu’Angela Merkel est au pouvoir. Il y a quatre ans, pour les élections fédérales de 2017, l’AfD avait convaincu 5% d’électeurs abstentionnistes d’aller voter. Aura-t-on les trois partis de tête au-dessus ou en-dessous de 20%? C’est l’abstention qui en décidera.
C’est une élection clé pour la suite, bien plus que la présidentielle française qui suivra. Le jeu semble plus ouvert là bas qu’ici. De mémoire il me semble que les chanceliers allemands de gauche ne sont jamais bien intentionnés vis à vis de leurs alter ego français. Or beaucoup en France dépendra de l’humeur allemande, notamment sur le plan de la solidarité financière. Ce serait intéressant de savoir les positions des partis allemands sur les questions européennes et internationales.
Merci pour ces synthèses de grande valeur, Monsieur Husson