L'urgence sanitaire a-t-elle bon dos et donne-t-elle l'occasion ou le prétexte au gouvernement pour imposer de façon autoritaire des mesures et des décisions impopulaires ? Les sénateurs républicains ont eu la gentillesse de m'alerter sur la question de la carte scolaire, dont la réforme au pas de charge risque de créer de mauvaises surprises à la rentrée de septembre.
L’urgence sanitaire n’arrête visiblement pas la réforme de la carte scolaire. Celle-ci évolue chaque année selon une procédure consultative documentée par le ministère de l’Éducation nationale. Le calendrier habituel prévoit que les projets d’ajustements soient soumis avant le 31 mars à des comités départementaux où siègent des élus.
L’urgence sanitaire inquiète les élus locaux
Mais cette année ? L’arrivée du coronavirus et l’interruption des élections municipales bouleversent fortement la donne habituelle. Les maires en place, qui sont consultés sur la fermeture éventuelle de classes, ne sont pas forcément très légitimes pour intervenir sur le sujet, dès lors qu’ils ne sont pas dument élus. Et l’on peut penser que les conditions habituelles de consultation sont fortement perturbées par le confinement.
Pour les élus locaux, la poursuite des travaux habituels de réforme de la carte scolaire est donc une source d’inquiétude. Comme me l’a expliqué le sénateur Max Brisson, les habituels ajustements prévus par la procédure, qui ont lieu en avril et en mai, ne pourront se dérouler comme prévu.
Dès lors, le maintien du calendrier habituel revient à confier au comité technique paritaire de l’Éducation Nationale, qui ne réunit que des personnels de l’Éducation, le soin de décider seul des ouvertures ou des fermetures de classe. Comme le souligne Max Brisson, les seules remontées de terrain dont le ministre dispose aujourd’hui sont celles des personnels de l’Éducation, et singulièrement des DASEN qui siègent dans la ville préfecture.
Le comportement de l’Éducation Nationale sera un bon test sur les intentions du gouvernement. Soit l’urgence sanitaire pousse à suspendre les calendriers habituels d’opérations administratives pour tenir compte des particularités de cette année. Soit les procédures continuent en laissant l’administration seule aux manettes.
Si cette dernière solution devait prévaloir, le ton général serait donné : l’urgence sanitaire sert aussi à gouverner seul et à suspendre de fait les mécanismes de concertation avec la société civile.