Le Courrier des Stratèges publie à midi et à minuit un bilan de l’évolution de la Guerre d’Ukraine. Avec une double perspective, croisée: la guerre sur le terrain; et le conflit stratégique global que les Etats-Unis essaient d’organiser contre la Russie – en prenant le risque très clair d’une escalade entre puissances nucléaires. Nous sommes dans une "crise des missiles de Cuba" au ralenti. L'instinct de survie et l'intelligence l'emporteront-ils sur le potentiel d'auto-destruction de l'humanité?
08h00: Charles Gave est un financier qui a réussi en Asie doublé d’un économiste libéral classique. La différence avec un « néo-libéral », c’est qu’il regarde le réel. je conseille d’écouter son entretien avec André Bercoff.
Son diagnostic est sans appel.
- Les Etats-Unis sont en train de casser définitivement l’étalon-dollar puisque l’exterritorialité du droit américain partout où le dollar est utilisé devient définitivement dissuasive. Et puisque la Russie règlera désormais ses transactions énergétiques avec la Chine en yuans
- la Russie voit 50% de ses réserves gelées (dollars et euros); mais elle a suffisamment de réserves de change disponibles en yuan, en yen et en or pour tenir deux ans, même si elle n’exportait rien. De plus il ne faut pas oublier que la Russie a des comptes courants excédentaires, un budget excédentaire. Elle n’a pas de dette intérieure ni extérieure.
- les banques françaises qui sont le premier assureur/réassureur dans le monde entier contre les risques de fluctuation de prix (marchés dit de « futures »), par exemple sur les prix des matières premières, pourraient être rapidement mises en difficulté. (On parle d’un marché des « futures » en général qui représente en montant trois fois le PIB mondial)
- l’Europe est en première ligne de la crise financière à venir. La poussée de l’inflation – qui est la plus forte en Allemagne – va rapidement créer des tensions fortes sur l’euro. En général, l’Europe est la grande perdante. L’Europe se fournit pour 40% en Russie pour son énergie. Le gaz de schiste américain comme ersatz du gaz russe est une illusion, il permet à l’Allemagne de tenir quelques jours, pas plus.
- On peut imaginer des scénarios en domino: le prix du blé monte à vitesse grand V. Cela pourrait déstabiliser les pays d’Afrique du Nord.
09h00: Visiblement, Bruno Le Maire n’a pas écouté Charles Gave….: le gouvernement français, avec un ton martial, « met en garde contre la hausse des prix de l’énergie« . Certes. Gribouille est bien installé à Bercy.
10h00: Après l’échec des pourparlers de paix, l’armée russe a repris systématiquement ses bombardements contre les infrastructures et des objectifs militaires russes (en particulier dans la région de Jitomir).
11h00: En ce qui concerne l’évacuation des civils, la situation est confuse. On reçoit encore des informations sur des milices ukrainiennes tâchant de les empêcher (par exemple à Marioupol, Volnovakha, Poltava. Mais il semble que les premiers convois de bus (35 à Poltava par exemple, nombre non précidsé à Soumy) soient sur place, prêts à emmener leurs voyageurs. Et le gouvernement ukrainien – ou ce qu’il en reste – commence à s’attribuer les mérites de ces transports encadrés par la Croix-Rouge. C’est semble-t-il le résultat tangible des négociations d’hier.
12h00: Les Etats-Unis deviennent fébriles. Ils aimeraient bien créer un front mondial uni contre la Russie. C’est dans ce sens que M.K. Bhadrakumar interprète la dernière réunion du « Quadrilatère » (Quad) USA-Inde-Japon-Australie. J’en donne un large extrait car le pays de Talleyrand a beaucoup désappris en termes d’analyse diplomatique. Il est temps de se remettre à penser le monde
« La réunion des dirigeants de la Quadrilatérale, jeudi, à l’initiative du président américain Joe Biden, a révélé des lignes de faille qui ont des conséquences sur la politique étrangère de l’Inde. Le compte-rendu conjoint publié après la réunion indique qu’il ne s’agissait pas d’un » business as usual « . Dans un paragraphe distinct, le compte-rendu souligne que les dirigeants de la Quadrilatérale « ont convenu de mettre en place un nouveau mécanisme d’assistance humanitaire et de secours en cas de catastrophe » qui pourrait « fournir un canal de communication alors qu’ils abordent et répondent chacun à la crise en Ukraine ».
Bien que formulé de manière inoffensive, un mécanisme est en train d’être établi qui fait du Quad une plateforme pour coordonner les réponses à la crise ukrainienne. Tel est le principal résultat de la réunion, qui a tout simplement ignoré l’ordre du jour proposé par le Premier ministre Narendra Modi dans son discours, comme la viabilité de la dette, les chaînes d’approvisionnement, l’énergie propre, la connectivité et le renforcement des capacités. De toute évidence, Biden a convoqué cette réunion imprévue avec un seul point à l’ordre du jour : l’hésitation de Delhi à s’identifier à Washington sur la question de l’Ukraine. Biden était déterminé à discipliner le retardataire.
Le compte-rendu conjoint laisse peu de place à l’imagination. Ce qui n’est pas clair, c’est si Modi s’est laissé guider vers une position commune avec ses partenaires du Quad, ou s’il a prudemment choisi de ne pas en faire un problème. Quoi qu’il en soit, la diplomatie indienne a atteint une « jonction en T ». La stratégie américaine visant à précipiter une confrontation historique avec la Russie au sujet de l’adhésion de l’Ukraine à l’OTAN est ancrée dans la quête de Washington d’un ordre mondial pour le 21e siècle, qu’il peut dominer. Ainsi, les opérations de la Russie découlent de ses préoccupations existentielles en matière de sécurité nationale. Le président Vladimir Poutine a énuméré ces préoccupations lors d’une conversation avec le chancelier allemand Olaf Scholz vendredi : Le statut neutre et dénucléarisé de l’Ukraine, la démilitarisation obligatoire du pays, la dénazification de l’État ukrainien, la reconnaissance de la Crimée comme faisant partie de la Russie et la souveraineté des républiques populaires de Donetsk et de Lougansk.
Aucune de ces questions ne concerne le Quad, même de loin, et, en fait, Modi a même « souligné que le Quad doit rester concentré sur son objectif principal de promotion de la paix, de la stabilité et de la prospérité dans la région indo-pacifique ». Washington a précipité la crise actuelle de manière très délibérée dans la perspective de la stratégie d' »endiguement » de Biden contre la Russie. C’est pourquoi le lien entre l’évolution de l’Ukraine et un « mécanisme » de la Quadrilatérale devient un sujet d’inquiétude. Washington espère créer une contradiction entre les relations de l’Inde avec la Russie et ses engagements envers la Quadrilatérale. La diplomatie américaine est réputée pour faire des liens. Des rapports suggèrent que certains législateurs américains montrent leur mécontentement à l’égard de la position de l’Inde sur l’Ukraine en menaçant d’imposer des sanctions à l’Inde en raison de sa coopération en matière de défense avec la Russie. Bien sûr, il doit s’agir de préliminaires grossiers mis en place en tandem par l’administration et le Congrès avant la rencontre de Biden avec Modi. Les Américains sont connus pour monter de telles mises en scène«
les US peuvent bien raconter ce qu’ils veulent, ils ont délibérément provoquer ce conflit:
https://t.me/intelslava/21743
Ils ne peuvent pas dire qu’ils ne savaient pas! 20/06/1997 !
et L’UE en caniche soumis fait souffrir sa population de pénurie en tout
Frexit vite
BLM est pathétique: la crise énergétique actuelle n’est que l’accélération de celle qui était largement prévisible de par les décisions gouvernementales qui ont privilégié l’idéologie européiste et climatique. Et que trouve à dire le ministre? Restreignez votre consommation.
Contrairement à bon nombre de Français, il ne doit pas faire très attention à ses factures!
Cette tentative d’intimidation grossière de l’Inde est inquiétante. Cependant les Américains ont-ils les moyens de leurs menaces ? l’Inde a une longue tradition de non-alignement, coopérant aussi bien avec la Russie qu’avec les USA. La France en a bien profité car l’Inde a été le premier acheteur d’importance pour le Rafale. Alors qu’en vingt ans les Américains avaient systématiquement torpillé toutes nos candidatures par divers chantages et pressions… L’Inde était l’un des rares pays à pouvoir se permettre de dire non aux Etats-Unis.
Si Modi a paru accepter le diktat américain, c’est sans doute parce qu’il a été pris de court. Nul doute qu’après le temps de la réflexion il trouvera une position plus cohérente avec la longue tradition diplomatique de son pays.
« La différence avec un “néo-libéral”, c’est qu’il regarde le réel. »
Je cite à ce propos le Pr. Pascal Salin :
« […] néolibéraux – expression qu’aiment bien utiliser les antilibéraux, mais que personne ne sait définir et dans laquelle un libéral ne se reconnait absolument pas »
« […] EN FRANCE OU L’INCULTURE ECONOMIQUE BAT PROBABLEMENT DES RECORDS MONDIAUX »
(« Revenir au capitalisme. Pour éviter les crises », p. 122-123)
« Ce qui caractérise le libéralisme c’est la reconnaissance des droits de propriété et de la liberté contractuelle. […] » (« Libéralisme », p. 10)
J’ai pour ma part du mal à voir la déconnection avec la réalité dans cette définition du libéralisme.
« On peut ainsi considérer que les « conservateurs » et les « progressistes » appartiennent tous deux au camp des constructivistes, lorsqu’ils désirent tous modeler la société selon leurs propres vues – les conservateurs désirant maintenir la société en l’état et les progressistes désirant la modifier.
Par opposition les libéraux soulignent seulement la nécessité de règles du jeu, sans que l’on puisse connaître à l’avance les résultats du « jeu » né des interactions entre individus.
La liberté n’est en tout cas pas une liberté anarchique de faire n’importe quoi, mais au contraire une liberté bornée par le respect du droit des autres. Encore faut-il comprendre ce que sont ces droits, comment ils sont définis, quelle est leur légitimité. » (« Libéralisme », p. 11)