L’attaque de la Préfecture de Police met directement en lumière les méfaits de la culture du “pas de vague” dans le service public, qui pousse au tabou et à ne jamais dénoncer les dysfonctionnements que les fonctionnaires constatent. La mort de quatre policiers sur leur lieu de travail a tragiquement illustré les risques de cette culture.
On a dans ce pays, passionné par la politique dit-on et dans lequel la plupart des élites ont été formées à la dissertation de Sciences-Pô, l’habitude de réduire les phénomènes sociaux à Une cause, de préférence politique ou géopolitique.
La récente affaire du présumé assassin de la préfecture de police illustre bien ce phénomène.
De quoi s’agit-il ?
Une personne, de catégorie C, c’est-à-dire personnel d’exécution au niveau le plus bas, est engagée pour assurer la maintenance du parc informatique d’un service de police, chargé du renseignement.
Sans signes avant-coureurs dit-on quant à son agressivité, un matin, il achète un couteau et en moins de dix minutes, tue quatre personnes et en blesse une cinquième. Il est abattu, après sommations, par un jeune stagiaire qu’il menace à son tour.
Ce fonctionnaire de police, agent administratif, c’est-à-dire chargé de l’intendance dans le service et non pas d’un travail policier, s’est converti à l’Islam, et a donné, notamment quatre ans auparavant, des signes laissant penser qu’il était en accord avec la mouvance terroriste de sa religion. Il a, comme on dit, donné des signes de radicalisation.
Depuis, le discours unanime des politiques et des médias cherche à comprendre pourquoi cet homme a pu se maintenir dans un service chargé du renseignement, c’est-à-dire aussi des informations concernant la menace terroriste interne au pays.
Ce que demandent politiques et journalistes, c’est comment détecter chez les fonctionnaires, mais aussi chez tous les professionnels chargés d’un service au public, des signes avant-coureur d’une allégeance à Daech. Signes faibles, car si on attend les signes forts, on est déjà post-attentat. Tels qu’évoqués par le procureur de la république, ces « signes de radicalisation » seraient : Un (un seul) propos tenu après les attentats de Charlie Hebdo ne condamnant pas l’attentat ; qu’il n’aurait plus serré depuis quelques temps les mains des femmes, en fait d’une seule femme, secrétaire dans son service ; qu’il aurait revêtu la tenue traditionnelle pour se rendre à la mosquée le vendredi. Tous signes non pas d’action militante, mais d’opinion.
On voit bien que ces signes faibles ne pouvaient pas justifier une révocation de la fonction publique, seule mesure susceptible de l’éloigner. En général, de tels signes ne pourraient pas permettre de refuser à quiconque l’accès à la fonction publique. On rappelle qu’en pleine guerre froide, le Conseil d’Etat avait jugé qu’un militant communiste avait le droit de s’inscrire au concours de l’ENA. (arrêt Barel, 1954[1]).
Mais on pourrait poser la question autrement.
Nous sommes dans un service de police et qui plus est dans un service de renseignements. Et donc il apparaît que ce service est sensible. C’est-à-dire qu’il faut vérifier qu’il n’y a pas de taupes dans ce service, taupes envoyés par Daech ou bien par la Russie ou bien par la Chine ou par n’importe quelle puissance étrangère. De même qu’on peut s’assurer que dans un service de police chargé du grand banditisme, il n’y a pas de taupe payée par des mafieux quelconques. De même que les employés d’une banque qui peuvent effectuer des mouvements de fonds sont surveillés : ils doivent avoir leurs comptes en banque dans l’établissement où ils travaillent et ceux-ci sont accessibles aux services de sécurité.
Il paraît du coup assez curieux que les personnels du service de renseignements de la police ne fassent pas l’objet d’un renouvellement d’accréditation secret défense plus souvent que tous les cinq ans et surtout que celui-ci ne soit pas l’occasion d’une évaluation de leur fiabilité plus approfondie.
Quant à l’exploitation des signes faibles, rapportés par ses collègues. Très clairement, ils ont été traités comme dans n’importe quel service et non pas comme un problème particulier de sécurité dans ce service. On imagine bien que les deux fonctionnaires de base qui ont rapporté les propos à leur chef de section n’ont pas voulu prendre le risque d’une « dénonciation écrite » et vu leur place dans la hiérarchie, ce n’était pas à eux de prendre une telle décision. Mais il devrait y avoir dans de tels services des procédures de suivi des agents qui permettent et obligent la hiérarchie à prendre ses responsabilités.
Très clairement, dans l’administration, règne la culture de la salle de classe : pas de dénonciation.
On aurait pu imaginer au contraire que le chef de section rapporte ce fait à ses supérieurs, qui décident soit d’avoir un entretien avec l’intéressé, soit de faire une petite enquête sur ses fréquentations etc. En prenant eux la responsabilité. C’est d’ailleurs ainsi que les signalements en cas de mauvais traitements à enfants, de risques de mauvais traitements à personnes vulnérables sont traités : le nom des « informateurs » n’est pas communiqué à la personne signalée.
Toutes ces analyses montrent que la question bien posée n’est pas celle de la traque des signes de radicalisation, mais bien celles d’une part de la sécurisation de services secrets par rapport à toutes les dérives possible des personnels et d’autre part, celle d’un management des services non pas bureaucratique, mais avec des autorités responsables et impliquées.
Reste la question de l’information du ministre ou du préfet de police.
Cette question a été souvent posée : pourquoi tel ou tel ministre n’avait-il pas eu la note expliquant les dangers du sang contaminé ? Pourquoi le ministre de l’écologie n’est-il pas averti d’un rapport défavorable concernant la sécurité de tel ou tel site ?
Il m’est arrivé dans ma carrière d’inspecter un hôpital dans lequel plusieurs services étaient gravement défaillants : maltraitances des malades, conditions d’hébergement scandaleuses, absentéisme des médecins etc. La directrice n’avait en onze ans de direction rien constaté ni rien amélioré. Nous proposions sa suspension. Pendant plusieurs mois, rien ne se passa.
Par un hasard personnel, j’ai eu l’occasion de rencontrer le ministre de la santé, à qui j’ai fait part de mon étonnement. Le soir même, la directrice était suspendue, le ministre ayant bien compris à la lecture du rapport quel risque il courait lui-même du fait de cette absence de réaction.
Mais il est rare que les proches d’un ministre, son directeur de cabinet, ses directeurs d’administration centrale, ses conseillers, personne d’entre eux n’ose « annoncer la mauvaise nouvelle ». Craignant comme Tirésias la colère du roi, ils n’ont pas son courage pour l’informer de la vérité.
On peut imaginer un processus de ce type à l’intérieur de la préfecture de police : la hiérarchie intermédiaire répugnait à mettre en cause un agent, non pas tellement pour le protéger lui, que pour éviter un conflit et peut-être, car ce sont souvent là les arguments qui prévalent dans notre pauvre administration, pour ne pas risquer de perdre la seule personne compétente pour maintenir le « parc informatique » du service ! Il y aurait beaucoup à dire sur cette question si triviale de la pauvreté des moyens humains et matériels de l’administration qui participent aussi à ses dysfonctionnements. Mais ceci ne peut pas faire l’objet de grandes déclarations politiques !
Hélène Strohl, inspectrice générale des affaires sociales honoraire
Dernière publication, Michel Maffesoli, Hélène Strohl, La faillite des élites, éditions du Cerf, 2019
[1] Par l’affaire Barel, le Conseil d’État a jugé que l’administration ne pouvait, sans méconnaître le principe de l’égalité d’accès de tous les Français aux emplois et fonctions publics, inscrit dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, écarter quelqu’un de la liste des candidats au concours de l’E.N.A en se fondant exclusivement sur ses opinions politiques.
“il achète un couteau et en moins de dix minutes, tue quatre personnes et en blesse une cinquième. Il est abattu, après sommations, par un jeune stagiaire qu’il menace à son tour.”
Le principe du rasoir d’ockham, la solution la plus simple, ici avoir tiré sur l’assassin avec probablement la ferme intention de le tuer. Sinon ils n’insisteraient pas sur le coté “stagiaire” du policier qui a tiré, ce qui permet, l’air de rien, de ne pas assumer qu’en France, un policier puisse abattre un criminel, surtout si ce dernier revendique agir au nom de l’islam.
Merci donc à ce stagiaire de nous avoir épargner des années de palabres, jugements, et discours avariés, en mettant fin de façon radicale à la vie du thuriféraire de la religion d’amour.
“(…) qu’il était en accord avec la mouvance terroriste de sa religion” – il n’y a de pire sourd que celui qui ne VEUT entendre. Le Dr. Ahmed Ibrahim Khadr, dans https://www.gatestoneinstitute.org/8101/radical-moderate-islam (“‘Radical’ vs. ‘Moderate’ Islam: A Muslim View”), est formel: “(…) the division of Islam into ‘moderate Islam’ and ‘radical Islam’ has no basis in Islam — neither in its doctrines and rulings, nor in its understandings or reality // la division de l’islam en ‘islam modéré’ et ‘islam radical’ n’a aucune base dans l’islam – ni dans ses doctrines et décisions juridiques, ni dans son (auto-)compréhension ni dans la réalité”. Et Hilaire Belloc, au chap. 3 de “The great heresies” (paru en 1936, donc à une époque où l’actuelle “political correctness” ne sévissait pas encore) n’avait aucun doute à ce sujet non plus: “Il m’a toujours semblé possible et même probable, qu’il y aurait une résurrection de l’islam et que nos fils et petits-fils verraient la reprise de cette formidable lutte entre la culture chrétienne et ce qui pour plus de mille ans a été son plus grand opposant”. Confirmation de la part d’une source on ne peut plus autorisée: “Sheikh Muhammad Abdullah Nasr (…) refuse de dénoncer IS/Daech comme non-islamique, disant ‘je ne puis (condamner l’Etat Islamique comme non-islamique). L’Etat Islamique est un sous-produit (byproduct) des programmes d’al-Azhar. Ainsi, al-Azhar peut-elle se dénoncer elle-même comme non-islamique? Al-Azhar dit qu’il doit y avoir un califat et que c’est une obligation pour le monde musulman (de l’établir). Al-Azhar enseigne la loi de l’apostasie et de tuer l’apostat. Al-Azhar est hostile envers les minorités religieuses, et enseigne des choses comme de ne pas construire des églises, etc.. Al-Azhar maintient l’institution de la jizziya (extorsion de tributs des minorités religieuses). Al-Azhar enseigne de lapider les gens. Ainsi, al-Azhar peut-elle se dénoncer elle-même comme non-islamique?’…”, source: http://raymondibrahim.com/2015/11/18/al-azhar-and-isis-cause-and-effect/.
Un pays gouverné par des imbéciles est condamné nolens volens à en subir toutes les conséquences.
La question n’est pas ici de savoir si l’acte terroriste est favorisé par l’Islam disons radical, ou une forme d’intégrisme islamique. Sans doute. Mais chaque passage à l’acte est toujours multicausal. En l’occurrence ce terroriste était aussi Martiniquais et pouvait se considérer comme stigmatisé comme noir ; il était handicapé notamment dans ses relations à autrui et pouvait donc en concevoir du ressentiment etc. Si l’on pense que toutes les personnes pratiquant un rite islamiste intégriste et prônant l’application de la Charia étaient de futurs terroristes, il faudrait effectivement faire quoi d’ailleurs ? car à part les tuer préventivement ou expulser ceux qui ne sont pas Français (un petit nombre) ou interdire le culte musulman et pratiquer la guerre des religions ?
Il y a des débats qui ne servent à rien, celui sur la détection des “radicalisés” est de ceux là. En revanche tenter de surveiller les fréquentations et autres agissements de personnes ayant accès à des secrets défense est une façon plus efficace d’agir, me semble-t-il. Arrêtons de mélanger tous les registres de compréhension.
Mme Strohl.
Belles circonvolutions que les vôtres force langage choisi, mais ça ne prend pas. Le terroriste, car s’en est un, s’est revendiqué de l’islam, peu importe qu’il soit sourd, cul de jatte, noir, blanc, ou à rayures.
La France, pour parler de ce qui nous intéresse, c’est gargarisée de mots à la seule fin d’éviter les débats avec les problèmes posés par l’islam.
Radicalisme est un de ces mots, tout comme extrémiste, ce qui permet de comparer l’islam avec lui même, une composante violente et une autre qui ne l’est pas. Les 2 poses problème.
Qui impose le Hallal ? qui impose la Burqa ? qui impose le burkini ? qui impose la séparation des hommes et femmes dans le corps social ? qui est prosélyte ? qui est misogyne ? l’islam.
Arendt disait que le choix du moindre mal c’est toujours le choix du mal, l’islam n’est compatible avec aucune forme de démocratie puisque c’est avant toute chose un code civil.
La laïcité est battue en brèche, c’est une notion de droit, et nous cédons du terrain sous les coups de boutoir de l’islam qui maîtrise les arcanes juridiques.
Que faire ? simplement interdire le prosélytisme, cesser de subventionner les diverses associations qui se repaissent d’argent public à la seule fin de saper les fondements de notre démocratie et ce depuis la loi Pleven, interdire les vêtements ayant rapport avec l’islam. affirmer que la France n’est pas une terre d’islam, point.
Toutes vos envolées lyrique finissent par user (ici pas de ad personam, le vous est un nous), regardez où nous en sommes, auriez vous prétention à être la seule personne éclairée ? je ne le pense pas…
Il y a un problème, il est planétaire, il a pour nom l’islam. Les français comprennent parfaitement et ne mélange pas tous les registres, ils en ont marre, et à force de palabres vous aurez une guerre civile.
Un pays, comme une civilisation, lorsqu’il ne se défend pas, lorsqu’il ne se protège pas, lorsqu’il ne s’affirme pas, disparaît.
Pour ma part, entre fukuyama et Huntington, mon choix est fait.