Le Brexit a eu lieu le 31 janvier 2020... Et deux jours après sa mise en oeuvre, aucune pluie de sauterelles ne s'est abattue sur le pays. Et aucune des calamités annoncées par les élites françaises n'est survenue. Au contraire, la livre est vigoureuse et les marchés parient sur l'avenir économique britannique. Tiens ! les élites françaises se seraient-elles trompées ? ou auraient-elles menti sur les bienfaits de l'Union Européenne ?
Alors que le Brexit prenait enfin forme, 3 ans et demi après le vote britannique sur le sujet, les catastrophes annoncées par les élites françaises à l’époque où le referendum était débattu de l’autre côté de la Manche, ne se sont pas produites.
Le Brexit et la collapsologie des élites françaises
Souvenons-nous des tombereaux de haine et de mépris, dilués dans un épais catastrophisme, qui hantait les élites françaises à l’époque où les Britanniques discutaient âprement du Brexit. Beaucoup de donneurs de leçons europhiles expliquaient alors que, au nom de la démocratie, il fallait retirer le droit de vote à tous les partisans de la rupture avec cette grande conquête humaniste qu’est la Commission Européenne. Et leurs arguments annonçaient une déconfiture cataclysmique dès le Brexit prononcé.
Pour le rappeler, on reprendra ici le rapport du Sénat déposé le 1er juin 2016 par Albéric de Montgolfier, sénateur républicain d’Eure-et-Loire, et, de profession, avocat au Conseil d’État. Ce parangon des élites françaises dans ce qu’elles ont de plus arrogant et de plus crétin, écrivait sans rire :
L'idée selon laquelle un éventuel « Brexit » aurait, à très court terme, des incidences économiques négatives semble faire l'objet d'un relatif consensus. En effet, nul ne peut nier qu'une sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne aurait, dans l'immédiat, des effets déstabilisants tant pour l'économie britannique que pour celles des autres États membres. (...) De même, depuis la fin de l'année passée, l'OCDE a noté un net recul du taux de change de la livre sterling par rapport au dollar et à l'euro, qu'elle attribue aux craintes nées de la possibilité d'un « Brexit » ; les données les plus récentes font apparaître que ce recul n'est toujours pas résorbé (cf. graphique ci-après).
Ainsi, à l’époque, les beaux parleurs des beaux quartiers expliquaient sans ambages aux Français que le seul fait de prononcer le mot “Brexit” suffisait à provoquer l’Apocalypse. Quant au fait de voter en faveur du Brexit, c’était tout simplement du suicide. Les sept plaies d’Égypte devait s’abattre sur la Grande-Bretagne si le Brexit intervenait.
La livre sterling ragaillardie par le Brexit
Ces annonces sont malheureusement démenties par les faits. La livre sterling a fait un bond en avant à l’annonce du Brexit, vendredi, et a même provoqué un léger recul boursier. Les boursicoteurs craignent en effet que l’appréciation de la monnaie sécessionniste ne pénalise les exportations nationales. on assiste donc à l’inverse de ce que des gens prétendument très sérieux annonçaient avec arrogance et mépris.
Macron déconnecté des réalités
Dans son allocution télévisée le soir du Brexit, le Président Macron a persévéré dans l’erreur en expliquant aux Français que les Britanniques s’étaient trompés. Cette manie terrible des élites parisiennes d’expliquer au petit peuple qu’il se trompe lorsqu’il ne se range pas aux injonctions d’une minorité dominante imbue d’elle-même mais aux vues si courtes ! Le Président, qui continue à ne rien dire aux Français sur sa réforme des retraites, n’a manifestement pas mesuré la profondeur du fossé qu’il s’emploie à creuser entre lui et les Français ordinaires.
Plus aucun Français ne peut en effet ajouter la moindre foi aux discours catastrophistes des élites, alors même que la réalité la plus évidente en montre l’inanité.
Bientôt le Frexit ?
Au train où vont les choses, six mois ne se passeront pas avant que le mot “Frexit” ne soit sur toutes les bouches en France. Et cette mode sera entièrement imputable aux élites et à leur déni des réalités.
Tout indique en effet que l’économie britannique devrait profiter de cette décision difficile, alors même que, engluée dans une Union Européenne germano-centrée, la France est en panne de croissance.
À trop gouverner par la peur du changement, on crée des vocations de révolte…
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