La Fed (la réserve fédérale américaine) se rallie à peu près officiellement désormais à la théorie, émise par Nouriel Roubini, d’une crise en “l”, c’est-à-dire d’une chute libre de l’activité. Ce scénario inquiétant a donné lieu hier à une longue mise au point de Jérôme Powell, son président. Les perspectives économiques sont désormais plus que sombres, au moins aux États-Unis.
Le président de la FED, Jérôme Powell, n’a pas fait dans la dentelle lors d’un point largement relayé par la presse américaine ce mercredi. Les perspectives qu’il a dressées sont celles d’une reprise en “l”, c’est-à-dire d’une longue chute de l’activité suivie d’une stagnation. Il appelle à une forte relance publique.
La FED annonce une crise exceptionnelle
On lira avec intérêt les éléments écrits que Jérôme Powell a communiqués sur la nature de la crise ouverte par le déconfinement. Selon lui, cette crise n’a rien à avoir avec les crises précédentes.
“The scope and speed of this downturn are without modern precedent, significantly worse than any recession since World War II. We are seeing a severe decline in economic activity and in employment, and already the job gains of the past decade have been erased.” Le spectre et la vitesse de ce retournement sont sans précédents depuis 1945. Les créations d’emploi “gagnées” durant ces dernières décennies viennent d’être éradiquées en quelques semaines. Le discours ne peut pas être plus alarmiste.
Le ton grave de ces indications en dit long sur la suite des événements que redoute la réserve fédérale américaine.
The current downturn is unique in that it is attributable to the virus and the steps taken to limit its fallout. This time, high inflation was not a problem. There was no economy-threatening bubble to pop and no unsustainable boom to bust. The virus is the cause, not the usual suspects—something worth keeping in mind as we respond.
Jerome Powell Tweet
La maîtrise du virus, point-clé de la reprise
Selon le président de la Fed, la suite des événements sera fortement liée à notre capacité scientifique à maîtriser le virus. Soit une solution rapide permettra de contenir la contagion et l’épidémie, soit l’activité sera très durablement ralentie. Et dans ce cas, il est très probable que la panne économique soit longue.
“Since the answers are currently unknowable, policies will need to be ready to address a range of possible outcomes”, écrit Powell. Autrement dit, tant que les réponses scientifiques ne sont pas données, tout peut arriver. Et il faut s’y préparer.
Catastrophisme de la Fed…
Il est assez rare qu’un responsable à ce niveau se laisse aller à des considérations aussi catastrophistes et anxiogènes. En l’espèce, Jérôme Powell n’a pas mâché ses mots. “The record shows that deeper and longer recessions can leave behind lasting damage to the productive capacity of the economy. Avoidable household and business insolvencies can weigh on growth for years to come. Long stretches of unemployment can damage or end workers’ careers as their skills lose value and professional networks dry up, and leave families in greater debt. The loss of thousands of small- and medium-sized businesses across the country would destroy the life’s work and family legacy of many business and community leaders and limit the strength of the recovery when it comes. These businesses are a principal source of job creation—something we will sorely need as people seek to return to work. A prolonged recession and weak recovery could also discourage business investment and expansion, further limiting the resurgence of jobs as well as the growth of capital stock and the pace of technological advancement. The result could be an extended period of low productivity growth and stagnant incomes.”
Le résultat de ce marasme pourrait être une très longue période de faible hausse de la productivité et de stagnation de la croissance. Tout est dit.
Economic forecasts are uncertain in the best of times, and today the virus raises a new set of questions: How quickly and sustainably will it be brought under control? Can new outbreaks be avoided as social-distancing measures lapse? How long will it take for confidence to return and normal spending to resume? And what will be the scope and timing of new therapies, testing, or a vaccine?
Jérôme Powell Tweet
Où l’on retrouve la théorie de la crise en “l”
Nos lecteurs ne seront pas surpris par ces considérations, au demeurant, puisque nous expliquons depuis plusieurs semaines que le scénario de la crise n’est pas celui d’une reprise en “v” comme l’ont espéré beaucoup d’analystes, mais plutôt celui d’une crise civilisationnelle, comme l’a dit dans nos colonnes Michel Maffesoli, qui devrait donner lieu à une chute libre de l’activité, suivie d’une longue stagnation.
Là encore, nos lecteurs retrouvent la théorie de Roubini, que nous avons évoquée très tôt, d’une crise en “l”. Ce scénario peu encourageant exclut toute reprise d’activité rapide. Dans l’ensemble de nos anticipations, il faudra donc intégrer cette perspective d’un marasme long des marchés et de l’activité économique.
Le temps de retard de la France dans la prise de conscience
Comme toujours, la France continue à vivre ses rêves jusqu’au bout, et retarde le plus possible le retour à la réalité. On parle désormais de prolonger le chômage partiel pour ne pas créer de rupture sur le marché du travail. Cette rupture est pourtant inévitable et provoquera l’émergence d’un nouveau modèle de société dont les contours nous sont encore inconnus.
L’atterrissage sera socialement, économiquement, financièrement brutal et devrait donner lieu à de fortes tensions dans la société française. Celles-ci sont d’ailleurs déjà perceptibles. Le temps est à l’orage.
Il fallait s’en douter, il faut être complètement fou pour arrêter du jour au lendemain une économie. Aucun manuel n’en a jamais parlé et encore moins des solutions cela va de soi. Il y a chaque année plus de 400.000 morts du paludisme, arrête-ton l’économie mondiale pour autant?