On connaît désormais le montant du cadeau de Bruno Le Maire aux assureurs-vie, évoqué dans nos colonnes il y a quelques semaines. On se souvient que les assureurs mutualistes comme le Crédit Agricole avaient demandé un coup de pouce réglementaire à Bercy pour amenuiser l'effet des taux d'intérêt négatifs. Ce petit geste coûte virtuellement 40 milliards € aux épargnants.
Les assureurs-vie sont fortement éprouvés par les taux d’intérêt négatifs. Les risques que représentent les garanties de rendement dans cette période éprouvent fortement, pour des raisons liées à la directive Solvabilité 2, les marges de solvabilité imposées aux assureurs. Si les assureurs-vie “capitalistes” ont la faculté de piocher dans leur capital pour renforcer ses marges, les assureurs mutualistes sont à la peine pour faire face à la situation.
Pour contrer les malheurs du temps, ces assureurs ont obtenu de Bercy une disposition réglementaire en apparence anodine. Elle consiste à comptabiliser dans leurs fonds propres intégrés à leur ratio de solvabilité une partie des provisions pour participation aux bénéfices. Autrement dit, les assureurs-vie pourront revendiquer comme leurs les sommes appartenant aux clients épargnants.
On sait depuis quelques jours que cette somme (égale à 70% de la provision) équivaut à 40 milliards €. En principe exigibles par les épargnants, ces montants colossaux seront comptablement affichés comme des fonds propres des compagnies en 2020.
Petit problème : cette mesure prise par décret est contraire aux dispositions légales du Code des Assurances, selon lesquelles la participation aux bénéfices appartient aux souscripteurs. L’affaire avait déjà failli mal tourner lors d’un contentieux de 2007. Bercy n’apprend décidément rien de ses erreurs. Mais après tout qu’importe, le problème sera réglé par les successeurs de Bruno Le Maire.